Tlemcen : Le président de la république Française François Hollande en visite dans la capitale des Zianides.
Tlemcen : Le président de la république Française François Hollande est attendu pour une visite dans la capitale des Zianides.
Le chef lieu de la wilaya de Tlemcen se prépare pour accueillir son excellence le président de la république Abdelaziz Bouteflika et le président de la république Française François Hollande le 20 novembre prochain.
C’est dans ce cadre que depuis deux semaines, les travailleurs de la commune et d’autres services techniques de la wilaya travaillent sans relâche et s’attellent à donner un visage nouveau à la capitale des Zianides de la route de l’aéroport, à Bab Wahran, au centre ville, El Méchouar, l’auditorium de la faculté de médecine université Aboubekr Belkaid, au plateau de lalla Setti et à d’autres sites historiques et touristiques.
Pour les citoyens de la région, cette visite sera une date historique et restera gravée dans la mémoire.
Et donc, l’accueil sera chaleureux. Toutes les discussions accordent une place importante à ce sujet qui est d’actualité.
C’est un évènement à ne pas rater dira un citoyen, pour voir de près les deux présidents dans notre wilaya. Tlemcen est aussi pavoisée avec les portraits des deux chefs de l’Etat.
Bienvenue au président de la république Abdelaziz Bouteflika et au président français François Hollande à Tlemcen.
Gadiri Mohamed 16 décembre 2012
Jeudi 20 décembre 2012.
Le président de la république française François Hollande a été accueilli par le président Abdelaziz Bouteflika à l'aéroport international Messali Hadj de Zenata ce jeudi 20 décembre 2012.
Apres un bain de foule au centre de la ville, le président s'est à l'auditorium de la faculté de l'Université ou il a reçu le Doctorat Honoris Causa du recteur de l'université, puis la visite de la mausolée de Sidi Boumédiene, le palais royal, l'institut français et enfin une conférence de presse tenue à l'hôtel renaissance du plateau Lalla Setti
gadiri
Gadiri Mohammed Presse Électronique d'informations Tlemcen.
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Déclaration d'Alger sur l'amitié et la coopération entre la France et l'Algérie
Préambule
La France et l’Algérie sont déterminées à ouvrir un nouveau chapitre de leurs relations, cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie.
Les deux parties partagent une longue histoire et ce passé a longtemps alimenté entre nous des conflits mémoriels auxquels il est nécessaire de mettre un terme. Elles doivent, pour cela, regarder le passé en face, ensemble, avec lucidité et objectivité, tout en recherchant une voie originale permettant une lecture objective de l’histoire.
La France et l’Algérie ont noué des liens humains, affectifs et culturels d’une exceptionnelle intensité, dans tous les domaines.
Le moment est maintenant venu de donner à ces liens une impulsion puissante pour porter ces relations à un niveau conforme à leur potentiel et aux aspirations de leurs peuples.
L’une et l’autre entendent jouer un rôle exceptionnel dans la construction d’un espace euro méditerranéen de paix et de sécurité, de démocratie, de justice et de liberté, de développement et de prospérité.
Les deux parties ont décidé de développer un partenariat exemplaire et ambitieux, fondé sur l’égalité, le respect mutuel, l’équilibre des intérêts et la solidarité. Ce partenariat stratégique devra inclure toutes les dimensions de notre relation et aura vocation à se développer rapidement dans tous les domaines.
I - Dialogue politique
La France et l’Algérie souhaitent trouver ensemble des réponses adaptées aux défis d’un monde en profonde mutation. Elles considèrent qu’elles ont, chacune, des atouts qu’elles peuvent valoriser dans le cadre d’un dialogue politique confiant et approfondi.
Elles décident, en conséquence, de renforcer leurs échanges à haut niveau sur les questions internationales et régionales d’intérêt commun et pour assurer le suivi de la relation bilatérale dans tous ses aspects.
Dans cette perspective, il est mis en place un ‘’Comité intergouvernemental de Haut Niveau’’, présidé par les deux Premiers Ministres. Ce comité tiendra sa première réunion en 2013. Il se réunira ensuite à intervalles réguliers selon des modalités qui seront définies ultérieurement.
II - Dimension Humaine
Les échanges humains qui témoignent des liens étroits entre les deux pays, représentent une richesse incomparable pour chacun d’eux.
La France et l’Algérie conviennent de favoriser le plus largement possible la mobilité de leurs ressortissants entre les deux pays. Les efforts engagés à cet effet donneront lieu à une concertation régulière au niveau diplomatique et consulaire.
La France et l’Algérie s’efforceront par ailleurs de répondre aux préoccupations exprimées par l’une des parties en ce qui concerne l’entrée et le séjour de ses ressortissants sur le territoire de l’autre, ainsi que le respect de leurs droits.
Dans ce contexte, la France réitère toute l’importance qu’elle accorde à la communauté algérienne établie en France qui a toute sa place dans la société française, à la prospérité de laquelle elle contribue activement.
III - Culture et éducation
La France et l’Algérie ont développé au fil des ans une coopération étroite dans de nombreux domaines.
Soucieux de poursuivre ces échanges, et de les intensifier, les deux parties ont élaboré conjointement un document définissant les axes de leur coopération pour la période 2013-2017.
Dans ce cadre, les deux parties souhaitent donner une claire priorité à l’éducation et à la formation. Elles ont décidé de donner une dimension prépondérante à la formation professionnelle des jeunes dans le nouveau Document Cadre de Partenariat.
Les deux parties conviennent de donner une impulsion significative à leurs relations et aux échanges culturels par la conclusion d’accords dans ce domaine et de faciliter chacune les activités des établissements éducatifs et culturels de l’autre sur son territoire.
Les deux parties décident de mettre en place toutes les facilités tendant à promouvoir et à encourager les initiatives permettant une meilleure connaissance réciproque de leurs jeunesses, en réponse à leurs attentes.
IV - Coopération économique
Les deux parties donneront un nouvel élan à leurs relations économiques. Dans ce but, elles entendent favoriser une relance équilibrée de leurs échanges et encourager le développement des investissements entre leurs entreprises.
Leurs économies doivent relever le défi du redressement productif et de la mondialisation. Elles présentent en outre de nombreux éléments de complémentarité.
Fortes de ce constat, les deux parties entendent valoriser leurs atouts et développer une stratégie visant à promouvoir les partenariats industriels entre opérateurs algériens et français. Cette stratégie devrait être mutuellement bénéfique et se traduire par le développement de l’investissement et la préservation ou la création d’emplois sur le territoire de chacune des parties, ainsi que par des transferts de compétences et de technologies. Les opérateurs économiques seront étroitement associés à sa définition et au suivi de sa mise en oeuvre.
A cette fin, elles ont décidé d’adopter une Déclaration conjointe pour un partenariat industriel et productif.
Un comité mixte de suivi de la relation économique bilatérale sera institué. Placé sous l’autorité des ministres désignés à cet effet, il présentera régulièrement un rapport aux deux Gouvernements sur l’état de cette relation et formulera à leur intention des recommandations en vue de son développement.
Alger, le 19 décembre 2012
François HOLLANDE
Président de la
République Française Abdelaziz BOUTEFLIKA
Président de la République Algérienne Démocratique et Populaire
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Conférence de presse de M. le Président de la République à Alger
Alger – Mercredi 19 décembre 2012
Mesdames, Messieurs, mon voyage en Algérie était attendu. C’est le premier que je fais ici comme Président de la République, le premier dans cette région. C’est un voyage qui vient en 2012 à un moment forcément symbolique, 50 ans après l’indépendance de l’Algérie. Ce voyage attendu, espéré, redouté, je ne sais comment il faut l’appeler. Ce voyage était nécessaire. Il vient comme un aboutissement, mais aussi comme le temps d’un nouvel âge que je veux engager entre la France et l’Algérie, 50 ans après.
Je remercie le Président BOUTEFLIKA pour non seulement son invitation, mais aussi son accueil. Je salue le peuple algérien qui m’a réservé avec enthousiasme, chaleur, une hospitalité remarquable. Je veux aussi reconnaître le travail qui a été mené par les deux gouvernements. Avant même que je ne vienne ici, pas moins de cinq ministres du gouvernement de Jean-Marc AYRAULT sont également venus en Algérie. Et nous pouvons signer avec le gouvernement algérien bon nombre d’accords dans tous les domaines.
Ces accords doivent avoir un sens, une signification. Il ne s’agit pas seulement de faire en sorte que nous améliorions pour un temps notre coopération. Ce que je veux définir avec l’Algérie c’est un partenariat stratégique d’égal à égal et qui permette justement d’entrer dans le nouvel âge de la relation entre la France et l’Algérie.
Il y aura donc une déclaration d’amitié et de coopération, c’était la meilleure formule pour nous dire ce que nous avions non seulement à nous déclarer, notre amitié, mais surtout à engager et à préparer. Ce document sera suivi par un autre qui est le document cadre du partenariat et qui est un programme de travail sur cinq ans dans les domaines économique, financier, culturel, agricole et même de défense et avec toujours l’idée d’améliorer la formation, d’accompagner les technologies et de pouvoir servir les intérêts et de l’Algérie et de la France.
Nous avons des liens et j’y reviendrai demain lors du discours que je prononcerai devant les deux assemblées. Nous avons des liens, des relations qui sont à la fois humaines, économiques, culturelles et que nous devons amplifier.
Il y a une vérité à dire sur le passé. Il y a surtout une volonté à prononcer pour l’avenir et ce voyage il est sur l’avenir. Il est pour engager une mobilisation de nos deux sociétés, au-delà de nos deux gouvernements, pour les Français et pour les Algériens. Une page se tourne, mais nous pourrions en écrire tellement d’autres.
Pour illustrer le déplacement et cette visite, il y a bien sûr ce que nous aurons à faire sur le plan des discours, ce que je ferai donc demain. Mais il y a aussi des annonces très fortes, par exemple la décision de Renault d’ouvrir une usine pour construire des automobiles non seulement pour le marché algérien, mais pour l’ensemble du continent et avec cette volonté de co-production que les ministres ont présenté, c’est-à-dire capacité à pouvoir faire que ce qui va être produit ici serve aux Algériens, mais que ce que nous pourrons également donner comme apport, comme encadrement, comme technologie, voire comme produit semi fini, serve aussi à l’Algérie et à la France.
Nous avons également une responsabilité, la France et l’Algérie. Nous sommes deux pays respectés dans le monde avec des principes pour la politique extérieure qui nous réunissent et nous en avons avec le Président BOUTEFLIKA donné un témoignage et une illustration sur les deux ou trois sujets qui sont pour nous les plus préoccupants. Le premier sujet c’est de faire en sorte que ce qui se passe en Syrie puisse aboutir enfin à une transition politique, faire en sorte que nous puissions lutter contre la prolifération nucléaire. Mais surtout lutter contre le terrorisme dont l’Algérie a suffisamment souffert pour nous livrer sa douloureuse expérience. Et aujourd’hui, un terrorisme s’est installé au Mali, pas simplement qu’au Mali et avec une confusion, avec un trafic de drogue et le trafic d’armes.
A partir de là, nous avons voulu soutenir tous les efforts de la communauté internationale, mais aussi du Mali pour lutter contre ce terrorisme et préserver l’intégrité territoriale du Mali.
Nous sommes en convergence avec le Président BOUTEFLIKA. Lui et moi, nous pensons qu’il convient de faire du dialogue politique, de faire tout pour qu’une négociation puisse permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale, mais uniquement avec les mouvements ou les forces qui se séparent du terrorisme, voire luttent directement contre le terrorisme. Nous sommes pour que le gouvernement malien, le Président du Mali et l’armée du Mali travaillent pour permettre la réunification.
Enfin, la France est partie prenante de l’initiative qui va conduire le Conseil de sécurité à prendre une résolution qui ouvrira la possibilité aux Africains d’intervenir aux côtés des Maliens pour les aider à retrouver la stabilité et l’unité. Mais ce sont les Africains qui sont les seuls à pouvoir décider et à mettre en œuvre, même si la France, -je l’ai plusieurs fois affirmé-, aura à donner son appui logistique et de formation.
Et l’Algérie joue un rôle très important à la fois pour lutter contre le terrorisme mais aussi pour favoriser la négociation politique, inséparable, donc, de ce que nous avons à faire sur le plan sécuritaire.
Voilà mesdames et messieurs, ce que je voulais dire en propos liminaire.
Je suis venu avec une délégation importante composée à la fois de responsables politiques, non seulement ceux qui sont membres du gouvernement, mais aussi d’autres, dont histoire est liée à l’Algérie, ou qui ont des responsabilités en lien avec ce pays, notamment Jean-Pierre RAFFARIN qui était chargé, c’était déjà vrai avant même mon élection de la relation avec l’Algérie sur un certain nombre de points. Je suis venu avec une délégation aussi d’élus locaux qui ont des liens avec l’Algérie, des coopérations, des jumelages. Je suis venu avec des responsables économiques très importants, des chefs d’entreprises de grandes, mais aussi de petites entreprises. Elles sont conscientes qu’ici en Algérie, il y a des potentiels considérables, mais à condition d’être les meilleurs dans beaucoup de domaines, télécommunication, infrastructure, énergie, automobile je ne vais pas les citer tous et toutes. Mais nous ne demandons rien, nous ne demandons aucune faveur. Ce n’est parce que nous sommes dans une relation d’amitié que nous aurions des privilèges, il n’y a pas de privilèges. Nous voulons simplement être au service de l’économie algérienne de la même manière que nous espérons que les Algériens peuvent être au service de notre propre économie. Nous en avons besoin. Puis nous avons à mener des politiques ensemble sur la Méditerranée, autour de la Méditerranée.
Et puis cette délégation est aussi composée de personnalités culturelles, artistiques qui peuvent avoir des origines ici en Algérie ou qui aiment l’Algérie. C’est aussi un symbole de savoir qui m’accompagne. Il y a tant de personnes qui sont intéressées par ce qui se passe en Algérie. Par ce que nous pouvons construire ensemble France et Algérie, par ce nouvel âge. Il y a d’abord les Algériens eux-mêmes, il y a aussi beaucoup de Français qui ont, avec l’Algérie, une relation humaine, singulière, particulière, parfois douloureuse. Et c’est justement, parce qu’il y a cette relation exceptionnelle que nous devons faire un partenariat d’égal à égal.
Je suis prêt à répondre à vos questions.
QUESTION – Apparemment Monsieur le Président, les usines d’armement subissent la même crise que les autres sociétés économiques et industrielles ce qui engendre l’encouragement ou plutôt la création de foyers de tension. Comment pensez-vous établir des relations tournées vers l’avenir, comme ne cesse de le répéter ces jours-ci votre ministre des Affaires étrangères avec notre pays dont les frontières sont menacées, tout en sachant que l’implication de la France n’est pas à démontrer.
LE PRESIDENT – Nous avons à définir des relations pour l’avenir. Nous sommes là pour préparer l’avenir, mais l’avenir dépend d’abord du présent, des conditions de sécurité, de stabilité, de l’équilibre dans région ce dont vous parlez. Donc, nous avons à régler les sources de conflit qui existent quelques fois depuis très longtemps, parfois depuis moins longtemps. Nous avons à faire en sorte qu’il n’y ait pas de tension entre les pays du Maghreb. Nous savons aussi ce qui se passe, dans les printemps arabes. Tout cela fait que nous ne pouvons pas simplement discuter entre Français et Algérien. Nous avons à porter une politique, qui sur bien des points est commune. Parce que la France et l’Algérie sont deux pays qui, au-delà de leur propre histoire, ont une responsabilité pour la méditerranée. Ce qui permet de parler du sujet de l’union pour la méditerranée. Vous vous souvenez de l’initiative qui avait pu être prise. L’idée mérite d’être retenue, mais elle doit être repensée. Et la France et l’Algérie doivent en être par leur situation, par leur position, par leur conception commune si je puis dire des moteurs. Donc nous allons y travailler.
J’étais il y a quelques semaines à Malte, à ce que l’on appelle la rencontre « cinq + cinq » et nous avons beaucoup réfléchi sur la manière de rapprocher Europe et Maghreb, ce qui suppose que l’Europe soit unie et que le Maghreb le soit aussi. Nous savons que ce n’est pas si simple.
C’est cette responsabilité commune que nous voulons évoquer au cours de ce déplacement.
QUESTION – Monsieur le Président, est-ce que vous pensez que l’Algérie est imperméable aux printemps arabes qui se sont développés autour dans la région et deuxième question, sur la Syrie. Visiblement vous dites qu’il y a convergence entre vous et le Président BOUTEFLIKA, mais il y a quand même une différence d’approche très claire entre la position algérienne sur la Syrie et la position française. Est-ce que vous pouvez un peu développer cela ?
LE PRESIDENT – Le point d’accord, c’est sur la mission qui a été confiée par les Nations Unies à Monsieur BRAHIMI en qui nous avons grande confiance et qui doit chercher des solutions pour la transition politique. Là, nous nous retrouvons.
Ensuite, sur la coalition que nous, nous avons reconnue. Il y a une différence, et je la respecte, mais nous nous avons considéré qu’il fallait, dès lors que nous souhaitions une transition, qu’il y ait bien un interlocuteur légitime qui représente la Syrie demain, c’est le choix que nous avons fait.
Sur l’autre sujet, moi, je ne veux pas me mêler des affaires intérieures mais, ce que disent les Algériens c’est qu’ils l’ont déjà vécu il y a longtemps, le printemps arabe.
QUESTION – Une question sur un sujet que vous allez aborder demain sur un sujet très délicat, celui de la question mémorielle. Est-ce que des voix s’élèvent en Algérie pour réclamer une repentance de la France, pour réclamer des excuses de la France ? Est-ce que ce sera la teneur du message que vous délivrerez demain au Parlement algérien ?
LE PRESIDENT – Qu’il y ait des voix qui s’élèvent, il y en a partout, et en France et en Algérie, par forcément pour dire la même chose. Ce qui compte c’est ce qui nous est demandé, à la fois par les autorités algériennes, elles nous disent, nous vous faisons confiance, c’est à vous de trouver les formes et les mots et moi, j’ai toujours été clair sur cette question : vérité sur le passé, vérité sur la colonisation, vérité sur la guerre avec ces drames, avec ces tragédies, vérité sur les mémoires blessées. Mais en même temps volonté de faire que le passé ne nous empêche pas de faire le travail pour l’avenir. Le passé doit, dès lors qu’il est reconnu, nous permettre d’aller beaucoup plus vite, beaucoup plus loin pour préparer l’avenir, c’est ce que je dirai demain aux parlementaires algériens et au-delà aux Français et aux Algériens.
QUESTION – Vous aviez dit avant cette visite que vous évoqueriez tous les sujets. Avez-vous parlé avec les président BOUTEFLIKA des moines de Tibhirine, que vous a-t-il dit ?
LE PRESIDENT – Je lui en ai parlé, puisque j’ai dit que tous les sujets seraient évoqués et celui-là fait partie de la sensibilité qui est forte, compte tenu de la tragédie, et le président BOUTEFLIKA mais vous l’interrogerez, m’a dit qu’il avait donné toutes instructions autant qu’il est possible à la justice pour aller jusqu’au bout de l’enquête.
QUESTION – Donc, s’il faut dire, s’il faut reconnaître la vérité, est-ce que sur les moines de Tibhirine il faut aussi demander pour que le passé ne repasse pas, est-ce que l’on doit aussi faire la lumière sur cette question ? Oui, parce que les autorités rouvrent le dossier pour qu’il y ait une autopsie, je crois que vous avez reçu une lettre des parties civiles en ce sens. Mais avez-vous une réponse claire ?
LE PRESIDENT – Ma réponse, elle est on ne peut plus claire, c’est à la justice algérienne, avec la justice française de faire toute la lumière sur ce qui s’est produit.
QUESTION – La révision de la loi de janvier 2010, dite Loi Morin portant sur l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français est-elle envisageable, sachant que les conditions qu’elles posent pour indemniser les victimes sont extrêmement restrictives ? Par ailleurs, où en est le dossier ou la question de la détermination des sites contaminés dans le Sahara et aussi les opérations de décontamination de ces sites algériens ?
LE PRESIDENT – Sur ce point-là, les démarches sont engagées, elles se poursuivent et nous ferons là aussi la transparence, c’est le principe que j’ai posé, la transparence.
Quant à la loi de 2010 que vous avez évoquée à juste raison, qui prévoit une indemnisation des victimes des essais nucléaires, elle doit être appliquée pleinement. Et s’il apparaît qu’il y a des conditions qui ne permettent pas à des victimes de faire leurs droits, nous regarderons comment faire. Mais pour l’instant, je veux que cette loi soit pleinement appliquée, elle ne l’a sans doute pas été avec la détermination nécessaire.
QUESTION – Quand vous dites que les Algériens ont vécu il y a longtemps le printemps arabe, que voulez-vous dire par là ?
LE PRESIDENT – Vous avez vu quand même ce que ce pays a traversé comme épreuve, c’est-à-dire un terrorisme qui s’était installé, le nombre de victimes, après un processus de réconciliation, de reconstruction et de rénovation. Je pense que le Parlement algérien va bientôt être saisi de la dernière étape de la révision constitutionnelle. Voilà, il y a des étapes, il ne m’apparaît qu’il y ait eu en Algérie les mêmes évènements que dans d’autres pays, cela ne s’est pas passé de la même manière, chaque pays a sa spécificité, a pu connaître ses propres problèmes, ses propres difficultés, mais moi, je veux saluer le courage des Algériens dans ce qui s’est produit durant toutes ces années et la manière avec laquelle ils ont réussi à rester unis et par rapport au printemps arabe, nous sommes conscients que cela a été un formidable espoir et qui doit maintenant être pleinement traduit sur le plan démocratique partout.
QUESTION - Comment la France a-t-elle vendu la marque Orangina aux Japonais puisqu’il s’agit d’une propriété algérienne ?
LE PRESIDENT – Voilà une information dont je n’avais pas connaissance et dès que le gouvernement japonais va être constitué, je viendrais à sa rencontre pour essayer de faire ce que je peux « en secouant beaucoup ». Pour le reste, et là le sujet est un sujet pleinement français parce que moi, je ne considère pas que des pays étrangers doivent se préoccuper de la représentation de l’Islam de France. Mais qu’il y ait des Algériens qui vivent en France et qui doivent pratiquer leur culte dans de bonnes conditions, je parle du culte musulman, oui, et cela renvoie, et là votre question est parfaitement légitime et pertinente à la représentativité du CFCM. Le ministre de l’Intérieur y travaille pour que nous puissions avoir un CFCM qui soit unit, cohérent, légitime pleinement, respecté par tous et que nous puissions travailler, parce que nous avons besoin de cette représentation.
QUESTION – Vous avez plusieurs fois indiqué dans votre propos liminaire vouloir engager l’Algérie et la France dans un nouvel âge. Est-ce à dire que vous revendiquez une rupture avec les pratiques de vos prédécesseurs, Messieurs CHIRAC et SARKOZY ?
LE PRESIDENT – Il y a des âges, vous le savez bien, nous le savons tous qui ne sont plus les mêmes, après 50 ans, là je ne parle que pour moi. Il est nécessaire d’ouvrir un nouveau temps, une nouvelle phase, une nouvelle période. 50 ans après une nouvelle période, nous sommes capables de jeter un regard lucide sur le passé, de faire l’expérience de tout ce que nous avons pu réaliser ensemble, la France et l’Algérie, donc, tous mes prédécesseurs, et puis, d’ouvrir une nouvelle page et donc de travailler maintenant avec le souci d’aller plus vite, d’aller plus loin. Je pense que c’est cela qui est demandé. Il y a tellement de besoins, tellement de ressources, tellement de volonté d’agir ensemble que nous devons faire davantage que ce que nous avons fait jusqu’à présent et cela tient aux deux pays, parce que nous avons toujours attendu tellement l’un de l’autre que nous avons peut-être laissé passer un certain nombre d’opportunités. Donc, maintenant, il se trouve, 50 ans après, l’élection présidentielle française est arrivée à ce moment-là, que nous pouvons ouvrir la nouvelle étape, le nouvel âge de la relation entre la France et l’Algérie. Tout cela n’est qu’une continuité, c’est vrai, mais il se trouve que c’est l’époque qui a changé.
QUESTION – Monsieur le Président, vous allez vous recueillir sur la place Maurice AUDIN à Alger. Auriez-vous une réponse à la demande de sa veuve en rentrant sur Paris ?
LE PRESIDENT – D’abord, j’ai effectivement souhaité avoir ce temps de recueillement et ensuite, j’ai demandé au ministre de la Défense de recevoir la veuve AUDIN pour que toutes les informations dont nous pouvons disposer puissent lui être communiquées, dans la transparence.
QUESTION – Monsieur le Président, comme par enchantement, d’un côté comme de l’autre, on entend plus parler de l’accord de 68, y aurait-il eu un compromis ? Vous venez d’évoquer l’Union pour la méditerranée, vous savez très bien Monsieur le Président, que le préalable du côté arabe, c’est le règlement du conflit israélo-arabe et du côté algérien, c’est le règlement du problème du Sahara occidental. Y aurait-il du nouveau positif au niveau de l’Elysée après votre arrivée en tant que Président ?
LE PRESIDENT – Du positif, j’espère bien qu’il y en a, mais je ne vais pas ici en parler, transformant cette conférence de presse en moyen de communication pour l’opinion publique française. Mais je vais répondre précisément à vos deux questions. Il y avait un dossier qui traînait depuis plusieurs années, une révision de cet accord, on ne savait pas d’ailleurs dans quel sens le réviser, le réviser pour être plus restrictif, ce n’est pas la position de l’Algérie, le réviser pour être plus ouvert, ce n’est pas forcément la position de la France. Donc, nous nous sommes dit, c’est un bon accord en réalité, est-ce que l’on peut améliorer son exécution ? Oui, et c’est ce que les deux ministres de l’Intérieur ont convenu de faire : aller plus vite, être plus respectueux, traiter avec toute la diligence nécessaire sur le plan administratif dans les consulats les demandes de visas. Parce que je pense que le mot clé qui doit nous définir, nos deux peuples, c’est celui de la dignité, de la reconnaissance, et nous avons, je l’ai dit des mémoires, mais nous avons aussi des vies, nous avons des relations humaines et à chaque fois c’est le principe de dignité et de considération qui doit l’emporter. Ce sera l’esprit de l’application de l’accord de 1968.
Ensuite, vous m’avez dit l’Union pour la méditerranée, elle ne peut pas avancer parce qu’il y a des préalables qui ne sont pas levés. Vous avez raison, c’est la raison pour laquelle cela n’a pas marché, parce que ce n’est pas dans l’Union pour la méditerranée que nous allons trouver la réponse au conflit israélo-palestinien. Ce n’est pas non plus dans l’Union pour la méditerranée que nous allons nous mettre d’accord pour la question du Sahara occidental. Ces questions-là doivent être traitées dans un cadre qui est celui des Nations unies et de la négociation directe pour Israël et la Palestine. Alors, est-ce que c’est parce qu’il y a ces préalables que nous ne pouvons pas avancer ? Eh bien, nous allons prendre un autre cadre. L’Union pour la Méditerranée cela existe, mais nous allons prendre d’autres moyens. J’ai cité le dialogue 5+5, il y a le processus de Barcelone, donc, nous allons travailler ensemble la France et l’Algérie pour que la Méditerranée ne soit pas la grande oubliée. Si on regarde nos intérêts géostratégiques à l’Algérie et à la France. La France, elle est située comme vous le savez en Europe et elle regarde vers la Méditerranée, il y a d’autres pays qui n’ont pas la même position géographique, l’Allemagne qui regarde vers l’est, c’est bien légitime, donc nous, notre relation elle doit être bien sûre ancrée dans l’Europe, mais elle doit être portée par une ambition qui est celle de la Méditerranée. L’Algérie, elle aussi elle regarde des deux côtés, dans le Maghreb, en Afrique et en même temps elle regarde vers l’Europe du Sud, parfois en s’inquiétant, parce que l’Europe du Sud ne va pas forcément au mieux sur le plan économique, donc à nous de faire de cette Méditerranée une zone de paix, de sécurité, de lutter contre les trafics, trafics de drogue, cela c’est un point très important la lutte contre le trafic de drogue, et qui touche tous les pays autour de la Méditerranée et nous devons aussi en faire une zone de développement, de coproduction et de croissance, voilà ce que nous avons à faire sur ce sujet.
QUESTION – L’accord avec Renault a été annoncé à la veille de votre visite, est-ce qu’il y a eu des pressions politiques sur les négociateurs pour faire aboutir le projet ? Et deuxième question, vous invitez les algériens à venir investir en France, et s’il y a la création d’un fonds souverain algérien, est-ce qu’il serait possible à l’Algérie d’investir dans des industries en France à l’exemple de Peugeot qui connaît actuellement beaucoup de difficultés ?
LE PRESIDENT –Nous sommes actionnaires, l’Etat français, donc, nous avons été en tant qu’actionnaire consulté sur cette opération. Le ministre du redressement productif a été forcément, non seulement informé, mais aussi partie prenante. Mais il n’y a pas eu besoin de faire pression, parce que c’est un bon projet, un bon projet pour l’Algérie, un bon projet pour Renault et un bon projet pour la France. Je rappelle que ce sont des automobiles qui seront destinées au marché algérien, mais pas qu’au marché algérien, à d’autres marchés extérieurs, et que ce ne sera pas une délocalisation, ce n’est pas une usine qui part de France pour aller en Algérie et on aura même de l’emploi en France parce qu’une partie des approvisionnements viendront de France. Donc, c’est une opération où il n’y aura, cela a été dit ce matin je crois par d’autres, que des gagnants.
Ensuite, est-ce qu’un fonds souverain algérien peut venir en France investir. Tous les fonds sont les bienvenus en France pour investir. Et nous avons un fonds chinois, un fonds qatari et d’autres fonds qui se sont mis en place, mais je ne vais pas demander aux Algériens de constituer un fonds souverain pour le bénéfice de la France, c’est aux Algériens de décider s’ils veulent investir en France et s’ils voulaient investir dans une entreprise, ils pourraient le faire librement en fonction des règles en vigueur.
QUESTION – Pour revenir à cet accord de 68, le nouvel âge, cette nouvelle étape qui va s’ouvrir, on va avoir l’impression que ce sera plus facile de permettre la circulation des marchandises et des biens matériels que des hommes. Nous sommes en 2012, cet accord date de 68, est-ce qu’il ne serait pas temps d’y voir vraiment une étape, parce que la population algérienne a beaucoup changé, parce que le niveau d’éducation a beaucoup changé, et parce que beaucoup plus d’algériens ont des visas rapidement, y compris pour aller pour quelques jours en France ?
Deuxième question. Aujourd’hui, vous avez en France beaucoup de réussites individuelles franco-algériennes culturelle, économique, scientifique. Est-ce que ce réseau qui a réussi en France et en Algérie ne pourrait pas servir de nouvel axe dans ce nouvel âge justement ?
LE PRESIDENT – Comme vous avez raison, toutes ces réussites, je ne vais pas les citer toutes, mais vous en avez évoqué de nombreuses sans les personnaliser. Réussite franco-algérienne, c’est-à-dire d’Algériens venus en France parfois enfant devenu Français, pleinement Français, mais avec cette origine algérienne. C’est une chance formidable pour nos deux pays parce qu’il n’y a non pas une perte d’identité, il n’y a pas une confusion, il y a au contraire un enrichissement. Et comment nous pouvons essayer de nouer ces relations ? Par des investissements qui peuvent se faire par ces Français d’origine algérienne ici en Algérie, mais il y a aussi Algériens qui ont envie de donner le meilleur d’eux-mêmes en France. C’est toute la question des visas pour des voyages artistiques, pour des séjours culturels, pour de la coopération scientifique ou universitaire. Alors, est-ce que l’accord de 68 est un accord qui est très restrictif ? Oui il est restrictif puisqu’il vise à maîtriser, mais il est moins restrictif que d’autres accords, chacun le sait. Tout est question d’application, ce qui est insupportable c’est d’attendre très longtemps ou de ne pas pouvoir pour des brefs séjours avoir le visa qui permet juste de faire un spectacle, un film ou une recherche de stage, cela peut arriver
Donc, c’est cela qui sera appliqué avec discernement et avec, je l’ai dit, respect. Je crois que c’était mieux de ne pas changer l’accord. Si nous avions changé l’accord, il y aurait toutes les interprétations, c’est-à-dire ceux qui auraient dit vous voyez, on restreint encore davantage, ceux qui auraient dit au contraire on ouvre davantage nous inspirant de ce qui avait été décidé en 68. C’était une période où il n’y avait pas les problèmes de chômage d’aujourd’hui. Mais nous le faisons avec discernement et respect.
QUESTION – Pour revenir sur les questions de mémoire, vous avez parlé des signes, des mots, des gestes que la France est prête à faire, attendez-vous à l’inverse des signes ou quelque chose du côté algérien et en matière des droits de l’homme notamment, est-ce que vous attendez un signal ou une parole forte de la présidence algérienne ?
LE PRESIDENT – J’ai invité le Président BOUTEFLIKA à venir en France pour une visite d’Etat au moment où il lui paraîtra possible de le faire. A ce moment-là, il aura aussi à s’adresser à la France. Je suis ici en Algérie comme Président de la République, je m’adresse à l’Algérie, mais aussi à la France pour dire que je suis lucide sur le passé, je suis surtout désireux de faire avancer la France et l’Algérie, de donner une nouvelle impulsion, un nouveau souffle, un nouvel élan, ce que j’ai appelé un nouvel âge.
Sur les droits de l’homme, je recevrai un certain nombre de représentants de la société civile algérienne et j’aurai aussi des discussions avec la jeunesse algérienne et je serai au parlement algérien demain. Les choses seront dites. Il y a toujours des améliorations à faire. Mais, comprenez bien qu’aujourd’hui je ne viens pas faire la leçon, je viens dire tout ce que j’espère de la relation entre la France et l’Algérie et tout ce que nous pouvons faire ensemble.
Vous savez, il se trouve que les communications entre la France et l’Algérie, au-delà de l’échange humain sont tellement nombreuses. Je ne dis pas cela pour influencer les chaînes de télévision française, mais vous êtes très regardés en Algérie. La vie politique française est très connue en Algérie. Donc, il y a une espèce d’intimité qui est créée et donc la question de la démocratie, des droits, je pense à une question présente partout et en Algérie il n’y a pas de limites au droit de l’information. Il y a une presse libre, une presse indépendante, comme peu de pays les connaissent. Je veux la saluer parce que c’était aussi un combat pour cette presse de rester libre et indépendante pendant les périodes les plus éprouvantes de l’histoire algérienne.
QUESTION – Au sujet du Mali, vous avez parlé de convergence entre l’Algérie et la France, au-delà de ce langage diplomatique, est-ce que pourriez détailler ces convergences sachant que la France voudrait appuyer logistiquement une intervention et que l’Algérie refuse toute idée d’intervention au Mali.
LE PRESIDENT – Non, ce n’est pas vrai. L’Algérie est, et nous aussi, en faveur de la négociation politique et elle est pour la lutte contre le terrorisme. C’est ce qui nous unit. La lutte contre le terrorisme ne peut pas accepter qu’AQMI s’installe sur une partie du Mali et impose sa loi. La négociation politique est indispensable parce qu’il y a des groupes, on les appellera les touaregs ou avec d’autres noms correspondant à leur mouvement qui doivent être réinsérés dans un processus politique. Après, sur l’intervention elle-même, c’est le Conseil de sécurité qui va en décider, ce n’est pas que la France. C’est le Conseil de Sécurité des Nations unies et ce Conseil de sécurité va laisser les Africains, je dis bien les Africains eux-mêmes notamment la CEDEAO décider d’une intervention en soutien du gouvernement malien qui lui-même a la seule légitimité pour en décider. Voilà ce qui nous rassemble.
QUESTION – Concernant le nombre de chefs d’Etat, de chefs d’entreprises qui vous accompagnent….
LE PRESIDENT – De chef d’Etat, je suis le seul,
QUESTION – Concernant le nombre de chefs d’entreprises qui vous accompagnent, il y en a une quarantaine ? En 2007, lors de la dernière visite d’Etat de Monsieur SARKOZY, il y en avait une centaine, on voit que le nombre a été réduit. Alors est-ce que c’est le contexte de crise qui fait qu’aujourd’hui en 2012 la France perd du terrain en matière commerciale ? Puis, le deuxième point concernant la région, votre prédécesseur avait effectué une tournée maghrébine, Tunisie, Maroc, Algérie, là vous ne ciblez que l’Algérie. Pourquoi ?
LE PRESIDENT – Alors le nombre de chefs d’entreprise, je ne veux pas faire un concours ni même dire qu’il y aurait ici la qualité quand il y avait la quantité, puisque ce sont souvent les mêmes. Nous, ce qui nous a paru nécessaire, c’est que ces chefs d’entreprises d’abord, puissent être en relation avec d’autres chefs d’entreprises ici en Algérie. Il y aura demain un forum économique qui permettra justement cette relation, cette liaison et ce travail. Ensuite, cela correspond à des projets qui existent. Mais ce qui va compter, au-delà de cette visite, c’est la qualité de la relation entre la France et l’Algérie, la volonté de donner une suite, mais également la performance des entreprises françaises. Je l’ai dit tout à l’heure. Les entreprises françaises, elles ne demandent pas des droits, elles n’ont aucun droit, simplement le devoir d’être les meilleures dans les compétitions qui sont organisées et face à des besoins que nous connaissons ici en Algérie et qui sont importants.
Voilà pourquoi ils sont là et ce n’est pas pour des raisons d’économie budgétaire. J’aurai pu utiliser cet argument, mais je considérais que c’était la bonne dimension et surtout le bon esprit.
Sur l’autre question, pourquoi commencer par l’Algérie. Parce que je voulais commencer par l’Algérie. Pour le 50ème anniversaire de l’Indépendance, c’était un temps qui était là. Parce que je considère qu’avec l’Algérie, nous avons des choses à nous dire et surtout des choses à faire. Et enfin, parce que j’ai moi-même une relation avec l’Algérie, personnelle, et parce que je sais que c’est très important pour beaucoup de nos concitoyens français la relation avec l’Algérie. Et pour l’Algérie, finalement, une attente très forte à l’égard de la France. Pour autant, moi j’ai la volonté d’avoir de bonnes relations avec tous les pays du Maghreb du printemps arabe ou pas du printemps arabe. Tous les pays du Maghreb. J’irai donc au Maroc au début de l’année prochaine et également en Tunisie, parce que je veux avoir les meilleures relations possibles avec l’ensemble des pays du Maghreb.
QUESTION – Monsieur le Président, le traité d’amitié entre l’Algérie et la France a été abandonné par Paris depuis longtemps. Aujourd’hui, vous avez lancé qu’un pacte d’amitié et de coopération sera signé entre l’Algérie et la France. Est-ce qu’on peut savoir si ce document est une continuation pour le traité 2003 qui n’a jamais été signé. Et pourquoi vous dites aujourd’hui que ce nouvel âge n’est pas une rupture avec la France de SARKOZY, de CHIRAC… Est-ce qu’on peut savoir aussi si la question de la mémoire sera posée dans ce traité ?
Monsieur le Président, le placard franco algérien pullule de dossiers très sensibles et intéressants, la question de la mémoire, la circulation des personnes, la crise au nord du Mali, le Sahara occidental, le business, avec quel ordre classez-vous ces dossiers Monsieur le Président ?
Vous êtes le troisième chef de l’Etat français a effectué une visite d’Etat en Algérie. A chaque fois, ces visites ont été porteuses d’espoir, à chaque fois ces espoirs ont été déçus, notamment beaucoup pour les Algériens. Est-ce qu’un Président de gauche fera mieux que ces prédécesseurs de droite ?
Il y a en France des personnalités qui ont un lien très forts avec l’Algérie ? Je pense par exemple à Enrico MACIAS, est-ce que vous espérez qu’un jour Enrico MACIAS pourra revenir en Algérie, est-ce que vous avez parlé de cela éventuellement avec le Président algérien ?
Le gouvernement français affiche une volonté d’accompagner des entreprises françaises désirant investir en Algérie. Cela ne rentrera-t-il pas en contradiction avec un souci de limiter les délocalisations ?
Monsieur le Président j’ai une question qui paraît plus ou moins explicite, est-ce que vous allez reconnaître au nom de la France les crimes commis durant la période coloniale et est-ce qu’on ira vers la repentance ou demander des excuses ?
LE PRESIDENT – Alors, je vais éviter les répétitions. Première question, elle est importante, le traité d’amitié avait été évoqué en 2003 et en réalité, il n’a jamais été signé, encore moins ratifié. Et cela a été une source de malentendus. Je parle du passé et plutôt que de chercher un traité d’amitié avec toutes les questions qui auraient été nécessairement posées et qui n’auraient peut-être pas été réglées puisque cela n’a pas été finalement concluant, nous avons préféré une autre méthode beaucoup plus simple, beaucoup plus forte, beaucoup plus efficace qui est une déclaration d’amitié, de coopération et un document cadre de partenariat. Ce qui nous est apparu plus fort ce n’est pas de nommer les mots, c’est de nommer les actions. L’amitié cela se démontre, cela se prouve et les paroles qui doivent être prononcées, elles ne sont pas dans un traité, elles sont dans les discours que je peux faire.
Donc, la méthode a changé. Vous m’interrogez sur la continuité, là, il y a un changement de méthode, un changement de moment et un changement de contenu. Changement de méthode, une déclaration un document cadre. Changement de moment, nous sommes 50 ans après, un nouvel âge commence. Et un changement de contenu, parce que nous allons signer un nombre d’accords dans tous les domaines aussi bien l’économie, la production que le domaine culturel, scientifique et même sur le plan de la langue nous commençons à retravailler sur le français.
Ensuite, le placard, moi je ne suis pas là pour ouvrir les placards, je suis là pour que nous construisions une nouvelle maison ensemble, c’est-à-dire que nous puissions travailler avec l’espoir de bâtir et pas simplement de faire que nous ne puissions pas avancer parce qu’il y aurait trop de sujets. Vous me demandez quel est le sujet le plus important, c’est l’avenir. Ce déplacement il est fondé sur l’avenir. Ensuite sur le passé, vérité ai-je dit, reconnaissance de ce qu’a été un système, le système colonial, j’aurai à m’exprimer, mais je ne viens pas ici, ce n’est ni ce qui m’est demandé, ni ce que je veux faire, faire repentance ou excuse. Je viens dire ce qu’est la vérité, ce qu’est l’histoire.
Ensuite, sur Enrico MACIAS, je ne peux pas vous répondre précisément. Je pense qu’il peut être invité par les autorités algériennes. Je ne sais pas quel est son souhait, mais je n’ai pas de réponse à votre question.
Sur les débats qui resurgissent régulièrement et qui ont été cités. Je pense que s’il y a un sens à donner à la qualité de l’accueil que j’ai reçu, c’est que nous sommes conscients de ce que nous avons à faire, à porter ensemble.
La gauche, puisque c’est la question qui est posée, elle est aussi dans l’histoire, elle a aussi sa part dans l’histoire. La vérité elle vaut aussi pour ce qu’a été la gauche dans l’histoire. Mais il se trouve qu’il y a eu beaucoup d’espoirs déçus, peut-être de part et d’autre d’ailleurs, de visites qui avaient été annoncées, qui devaient se traduire. Je veux être respectueux. Ce n’est pas une visite qui fait une relation, c’est un travail constant, une méthode qui doit être éprouvée par le temps et c’est une volonté.
Donc, un voyage, je ne sais pas si celui-là sera jugé comme réussi, je l’espère. Pour moi, le premier jour en témoigne. Mais un voyage doit ouvrir une période. Cela ne peut pas résumer une relation. C’est ensuite que nous devons donner toutes les preuves de cette réussite.
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Allocution devant les deux chambres réunies du Parlement algérien
Monsieur le Président du Conseil de la Nation,
Monsieur le Président de l’Assemblée populaire nationale,
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Parlementaires.
Vous me faites grand honneur en me recevant ici, en m’accueillant, comme le peuple algérien l’a fait hier. Je mesure l’importance de l’événement, mais aussi la grandeur de l’enjeu ouvrir un nouvel âge dans la relation entre la France et l’Algérie. Ma visite vient dans un moment chargé de sens et de symboles, il y a cinquante ans, l’Algérie accédait à l’indépendance, elle s’arrachait à la France, après une guerre longue de huit ans.
Elle devenait la République algérienne libre et souveraine. Elle conquérait ce droit, ce droit inaliénable, ce droit de pouvoir disposer pour un peuple de lui-même. Cinquante ans, c’est court à l’échelle de l’histoire, et pourtant, quel chemin a été parcouru par l’Algérie depuis 1962. L’Algérie est aujourd’hui un pays respecté sur la scène internationale, qui compte, qui pèse, l’Algérie est un pays dynamique, dont les ressources sont considérables, dont l’économie est en développement, et je mesure ces étapes chaque fois que je viens en Algérie, depuis 1978, lorsque jeune fonctionnaire français, j’étais pour huit mois à l’ambassade de France à Alger.
L’Algérie est un pays jeune, dont la moitié de la population a moins de 26 ans, et donc plein de promesses, l’Algérie est un pays courageux, il l’a prouvé dans son histoire, il l’a prouvé encore plus récemment face à l’épreuve terroriste qu’il a traversée – ce pays – avec dignité et unité. A cette Algérie, fière de son passé, consciente de ses forces, la France, à travers moi, adresse des vœux de prospérité et de réussite.
Mais la question qui est posée à nos deux pays, l’Algérie et la France, elle est simple, elle est grave : sommes-nous capables d’écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire ? Je le crois. Je le souhaite. Je le veux. Nous ne partons pas d’ailleurs de rien, puisque nous pouvons nous appuyer sur les liens humains que vous avez rappelés, Monsieur le Président, linguistiques, je parle une langue, le français, que vous connaissez et que vous parlez, des liens économiques, qui unissent aussi nos deux pays.
Mais cette amitié, pour vivre, pour se développer, elle doit s’appuyer sur un socle, ce socle, c’est la vérité. Cette vérité, nous la devons à tous ceux qui par leur histoire, par leur histoire douloureuse, blessés, veulent ouvrir une nouvelle page. Nous la devons à la jeunesse, à toutes les jeunesses, qui veulent avoir foi en leur avenir, et donc qui veulent savoir d’où elles viennent. Rien ne se construit dans la dissimulation, dans l’oubli, et encore moins dans le déni. La vérité, elle n’abîme pas, elle répare, la vérité, elle ne divise pas, elle rassemble.
Alors, l’histoire, même quand elle est tragique, même quand elle est douloureuse pour nos deux pays, elle doit être dite. Et la vérité je vais la dire ici, devant vous. Pendant 132 ans, l’Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal, ce système a un nom, c’est la colonisation, et je reconnais ici les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien. Parmi ces souffrances, il y a eu les massacres de Sétif, de Guelma, de Kherrata, qui, je sais, demeurent ancrés dans la conscience des Algériens, mais aussi des Français. Parce qu’à Sétif, le 8 mai 1945, le jour même où le monde triomphait de la barbarie, la France manquait à ses valeurs universelles.
La vérité, elle doit être dite aussi sur les circonstances dans lesquelles l’Algérie s’est délivrée du système colonial, sur cette guerre qui, longtemps, n’a pas dit son nom en France, la guerre d’Algérie. Voilà, nous avons le respect de la mémoire, de toutes les mémoires. Nous avons ce devoir de vérité sur la violence, sur les injustices, sur les massacres, sur la torture. Connaître, établir la vérité, c’est une obligation, et elle lie les Algériens et les Français. Et c’est pourquoi il est nécessaire que les historiens aient accès aux archives, et qu’une coopération dans ce domaine puisse être engagée, poursuivie, et que progressivement, cette vérité puisse être connue de tous.
La paix des mémoires, à laquelle j’aspire, repose sur la connaissance et la divulgation de l’histoire. Mais la nôtre est aussi une histoire humaine, car au-delà des blessures, au-delà des deuils, demeure la relation exceptionnelle nouée entre les Français et les Algériens ; les Français d’Algérie, instituteurs, médecins, architectes, professeurs, artistes, commerçants, agriculteurs qui, avec le peuple algérien, avaient su nouer, dans des conditions difficiles, intolérables parfois, des relations tellement humaines.
Je me rendrai à Tlemcen, la ville de Messali HADJ, l’un des fondateurs du nationalisme algérien, qui évoque lui-même, dans ses mémoires, les Français d’Algérie, en rappelant l’amitié et la confiance, en évoquant ses relations simples, quotidiennes, naturelles dont le souvenir nous appartient. Je n’oublie pas non plus tous ces coopérants qui étaient venus après l’indépendance de l’Algérie, à la fois par conviction, et par souci de promotion du savoir et de la connaissance, et qui voulaient rendre service à la République, la jeune République algérienne.
Notre histoire, cette histoire, c’est aussi celle de grandes consciences françaises, qui ont su s’élever contre l’injustice de l’ordre colonial, Georges CLEMENCEAU, dès 1885, trouvât les mots pour dénoncer l’abus pur et simple de la force pour s’approprier l’homme et ses richesses. André MANDOUZE, moins connu, et pourtant, tellement militant, qui, toute sa vie, fut fidèle à ses valeurs dans la résistance, mais également dans la conscience de l’indépendance algérienne. Germaine TILLION, qui fut la militante inlassable du dialogue entre les hommes et les femmes, entre les peuples, l’écrivain François MAURIAC, qui sut rappeler dans les moments difficiles la véritable grandeur d’un peuple qui ne repose pas sur sa force brutale, mais sur la puissance de son message universel.
Et puis, notre histoire, l’histoire de la France, c’est aussi Alger, qui fut la capitale dans les moments les plus sombres de la France libre, parce que c’est ici que s’était réfugié l’honneur de la France, à Alger, avec le Général De GAULLE à sa tête.
Voilà tout ce qui nous rassemble, nous réunit et nous permet après avoir regardé l’histoire, le passé, de pouvoir construire l’avenir. Je n’ai pas d’autres mots que ceux qu’employaient le président BOUTEFLIKA le 8 mai dernier à Sétif, qui appelait à une lecture objective de l’histoire loin des guerres de mémoires et des enjeux conjoncturels afin d’aider les deux parties à transcender les séquelles du passé et d’aller vers un avenir où puisse régner confiance, compréhension, respect mutuel, partenariat. Eh bien ces mots-là sont les miens encore aujourd'hui.
La proximité entre l’Algérie et la France n’est pas une incantation prononcée à chaque voyage d’un président de la République française en Algérie, la proximité dont je parle n’est pas une abstraction, n’est pas une construction elle est une réalité. Elle se fonde sur des liens intimes, profonds, uniques pour la France comme pour l’Algérie. Sur 900.000 Algériens qui résident à l’étrangers, 700.000 vivent en France et je ne peux pas compter tous ces Algériens venus à travers plusieurs générations donne leur force de travail pour permettre à la France d’être ce qu’elle est aujourd'hui.
Je pense aussi à ces jeunes Français nés de parents algériens qui sont pleinement Français, qui doivent être regardés toujours comme tels et qui en même temps sont en famille ici, chez vous en Algérie. Ces jeunes Français se sont engagés dans tous les domaines de l’économie, de la culture, du cinéma, de la littérature, du théâtre, du sport et même de la politique. Et nous avons attendu d’ailleurs trop longtemps ce moment, enfin les assemblées parlementaires françaises comptes désormais des élus d’origine algérienne.
Il y a aussi tous ces Français nés en Algérie et qui sont partis dans les conditions que chacun connait et avec le déchirement dont ils ne se sont pas remis mais qui portent toujours je vous l’assure, l’Algérie dans leur cœur. Je ne vais pas faire de comptabilité mais il y a des millions de mes concitoyens en France qui ont vis-à-vis de l’Algérie un fonds commun de références, de passion, d’émotions et qui loin d’affaiblir la France, renforce encore cette passion d’être ce qu’elle est aujourd'hui.
Voilà pourquoi nous sommes liés les uns aux autres mais la géographie aussi nous rapproche, la mer Méditerranée ne nous sépare pas elle nous unit mais elle nous confère aussi des responsabilités communes et exceptionnelles.
La Méditerranée c’est un espace politique, économique, diplomatique et nous avons le devoir de développer des projets qui bénéficient directement aux populations des deux rives. Je souhaite et je le dis devant vous, représentants du peuple algérien, je souhaite que la France et l’Algérie travaillent ensemble pour le projet méditerranéen.
De même que la France et l’Allemagne avaient été capables après une guerre tragique qui les avait opposé d’être les moteurs de la construction européenne eh bien l’Algérie et la France peuvent construire aussi l’union, l’unité méditerranéenne de demain.
Mais là aussi, non pas pour porter des projets chimériques mais des réalisations dans tous les domaines de l’énergie, des transports, de l’éducation, de la connaissance et du développement. Je parle d’éducation, de connaissance, de savoir, de recherche. La langue peut également nous servir de lien. L’Algérie chérit la langue arabe mais elle a su aussi se nourrir du français, se l’approprier comme un butin de guerre mais surtout, comme un instrument de connaissance, de diversité, de liberté.
Tant d’écrivains algériens ont apporté à la langue française leur génie, Kateb YACINE, Mohammed DIB, hier, Assiad DJEBAR, Anouar BENMALEK, Yasmina KHADRA, aujourd'hui et c’est Albert CAMUS, ce fils d’Alger dont nous célébrons l’an prochain l’anniversaire, le centième anniversaire de la naissance, qui a évoqué le premier cette communauté franco-arabe formée par tous les écrivains algériens dans l’égalité la plus parfaite. Merci à l’Algérie de donner aussi à la langue française sa diversité.
C’est fort de ces liens là, de cette responsabilité là qu’aujourd’hui à l’occasion de ma visite ici en Algérie, nos deux pays peuvent ouvrir une nouvelle page, un nouvel âge, à travers un partenariat stratégique d’égal à égal.
C’est ce que nous venons d’établir avec le président BOUTEFLIKA, une déclaration d’amitié ici à Alger et également un document qui scellera notre relation dans tant de domaines pour ce partenariat. Cinq ans, cinq ans d’actions communes si nous le voulons, si nous en décidons pour relever trois défis qui nous sont communs.
Le premier est économique, la France et l’Algérie doivent passer à la vitesse supérieure, doivent multiplier les échanges, les investissements, les réalisations communes. Oh nous connaissons les blocages, vous ici en Algérie, nous en France, nous savons les méfiances, les réticences mais nous savons aussi ce que nous pouvons faire ensemble.
Alors, faisons-le, dans le cadre de la transition énergétique, dans le cadre du partage des technologies, dans le cadre de la transition énergétique, dans le cadre du partage des technologies, dans le cadre de la formation des hommes et des femmes.
Nous pouvons partager nos savoir-faire, nos expériences, nos ressources, nous avons inventé parce que nous sommes la France, parce que vous êtes l’Algérie. Nous avons inventé de nouveaux modes de développement dans tous les domaines industriels, agricoles, et c’est pourquoi nous avons signé de nombreux accords de coopération ensemble à l’occasion de cette visite.
Je ne viens pas ici pour faire du commerce, je viens ici devant vous pour marquer un temps nouveau et en même temps 450 entreprises françaises, de grands groupes mais aussi des PME emploient directement 40.000 personnes, même 100.000 avec les emplois indirects en Algérie, nous pouvons faire davantage.
La France est le premier investisseur sur le territoire algérien, je m’en félicite mais nous pouvons faire encore mieux, elle est aussi son premier fournisseur, son troisième client, nous pouvons relever encore le niveau de nos échanges ; nous devons être prêts à aller plus loin et dans la délégation qui m’accompagne il y a toutes sortes de personnalités économiques, culturelles, scientifiques, artistiques, mais je veux que l’économie soit également au cœur de notre relation.
Hier RENAULT a signé un important accord en vue de produire dans votre pays une voiture destinée au marché local mais aussi régional, et j’allais dire même aussi international. Ce n’est pas une délocalisation, aucune entreprise française n’est venue s’installer au détriment de l’emploi français, c’est une entreprise RENAULT qui vient construire des véhicules pour qu’il y ait plus d’emplois en Algérie et plus d’emplois en France.
Voilà un bel accord que nous avons été capables de conclure sur le plan économique et il s’intégrera dans une déclaration de partenariat productif qui marquera cette idée de coproduction entre nos deux pays.
Le deuxième défi que nous avons à relever, en Algérie comme en France, c’est celui de la jeunesse, la formation, l’éducation, c’est une grande ambition de l’Algérie depuis l’indépendance, la formation, l’éducation c’est le grand message, c’est le rêve français depuis sa propre révolution.
Parce que nous avons tous conscience que la jeunesse n’est pas simplement un atout, une vitalité, c’est aussi une ressource que nous devons accompagner, encadrer, valoriser. Et dans tous les accords que nous avons passés entre l’Algérie et la France au cours de cette visite, ce sont des accords de formation et j’en ferai la démonstration à travers ce que nous allons faire pour des réseaux d’institut d’enseignement supérieur de technologie.
Quatre centres vont être crées qui, ensuite, serviront de référence pour être généralisés sur le territoire algérien, si vous en décidez. Ils aideront les jeunes à acquérir, dans un cycle court, les connaissances, les compétences qu’attendent les entreprises et permettront plus facilement de leur trouver du travail.
Notre partenariat, celui dont je parle, notre déclaration d’amitié doit s’adresser d’abord aux jeunes pour répondre concrètement à leurs attentes. Je pense aussi aux universitaires, à ces vingt-cinq mille Algériens qui étudient en France mais aussi à tous ceux qui s’intéressent en France à l’Algérie et qui veulent, là encore, nouer des relations à un niveau d’excellence, mais je veux que l’on accueille mieux et davantage les étudiants algériens.
C'est pourquoi je propose que puisse se construire une maison de l’Algérie à la cité internationale universitaire de Paris pour accueillir ces étudiants.
Nous pourrions nous dire qu’au niveau de la Méditerranée, nous pourrions faire ce qui a été réalisé au niveau de l’Europe, ces programmes d’échange universitaire, ce qu’on appelle ERASMUS. On trouvera un autre nom, d’un autre philosophe pour la Méditerranée mais c’est le même projet : permettre les échanges, la circulation.
J’ai parlé de circulation des personnes ; c’est le troisième défi que nous avons à régler. Près de deux cent mille Algériens reçoivent chaque année un visa dans nos consulats. Cette politique est indispensable, je la rappelle ici.
Nous devons, pour l’intérêt de l’Algérie et pour celui de la France, maîtriser les flux migratoires. Les jeunes que vous formez doivent trouver du travail ici, espérer faire leur vie ici, mais en même temps ils ont besoin aussi de circuler. Alors, nous ne devons pas faire de la demande d’un visa un parcours d’obstacle ou, pire encore, une humiliation. Au contraire ! Nous avons besoin que se poursuivent et même s’amplifient les allers-retours des étudiants, des entrepreneurs, des artistes, des familles. Bref, tout ce qui anime la relation entre la France et l’Algérie. Nous allons rester dans l’accord de 1968, mais nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour accueillir mieux les demandeurs de visa et pour que les documents soient délivrés plus vite par nos consulats. C'est une affaire de respect et d’intérêt mutuel. Dans le même temps, nous attendons de l’Algérie qu’elle ouvre plus largement ses portes aux Français qui souhaitent se rendre sur votre territoire, parce qu’ils y ont des souvenirs, des attaches familiales, affectives ou des projets professionnels ou personnels à réaliser.
Enfin, le dernier défi que nous avons à relever, il est pour la paix et la sécurité dans le monde.
Nous portons les mêmes principes au plan international : l’indépendance, la souveraineté, le respect des peuples.
Nous connaissons les mêmes menaces : le terrorisme, et vous, vous savez ce qu’est le terrorisme. Nous avons aussi les mêmes valeurs d’émancipation ; nous avons le même besoin de vivre dans un environnement de paix et de stabilité. Or, chacun le voit, le monde est en plein changements. Parfois ils vont dans le bon sens, parfois dans le pire. Mais il y a eu ces peuples qui se sont soulevés contre la dictature, des révolutions ont apporté l’espoir mais aussi, reconnaissons-le, soulevé des inquiétudes.
Chaque pays doit trouver sa propre voie et vous l’avez montrée. Il ne peut pas y avoir de réponse unique aux aspirations des citoyens, mais la leçon de ce qu’on a appelé le printemps arabe c’est que de toute manière, et partout dans le monde, les peuples entendent prendre en main leur destin.
Alors, le rôle de la France, celui de l’Algérie, c’est de les accompagner dans la voie de l’ouverture, de la démocratie, de la liberté. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne se discute pas, ne se marchande pas. Il en est ainsi du droit du peuple palestinien et, aux Nations Unies, l’Algérie et la France ont voté ensemble la résolution qui confère à la Palestine le statut d’État non-membre observateur.
Mais nous ne pouvons pas en rester là. Nous voyons les risques aussi d’un blocage, d’une fermeture, d’une violence.
Notre devoir, c’est de favoriser la négociation permettant la reconnaissance des deux Etats qui pourraient vivre en pleine sécurité, sûreté, respect, tout simplement en paix.
Enfin, il y a la crise du Sahel. Elle nous oblige aussi, et là-dessus je me félicite de voir que la Franceet l’Algérie partagent des principes communs. Nous devons affronter cette crise, mais nous devons laisser les Africains décider souverainement des opérations de soutien pour permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale.
Nous avons deux volontés qui ne se discutent pas. La première, c’est de favoriser la négociation politique, le dialogue pour que toutes les parties prenantes qui respectent l’unité du Mali, qui n’acceptent pas le terrorisme, puissent se retrouver ensemble avec des voix permettant aussi une certaine reconnaissance de la spécificité du nord-Mali.
Mais en même temps que nous poursuivons cet effort de négociation politique, nous devons montrer une détermination. Non pas la France, qui n’est plus dans ces interventions d’hier, mais la communauté internationale. Parce que si le conseil de sécurité en décide, et il en décidera, alors ce seront les Africains eux-mêmes qui voudront ou ne voudront pas – et je sais qu’ils le veulent – engager une opération pour l’intégrité du territoire malien.
Et je fais confiance à l’Algérie pour mener à sa place toutes les négociations, discussions politiques en plein accord avec la France.
Voilà tout ce que nous avons à faire, voilà ce qui nous rapproche, voilà ce qui nous unit, voilà ce qui peut pour de longues années – je n’ose pas dire cinquante ans – mais nous pouvons aussi penser que ce que nous pensons vaut bien plus que pour cinq ans. Parce qu’ici, ce n’est plus une question de personnes : c’est la France, c’est l’Algérie. Une déclaration d’amitié, je le disais, a été signée. C’est bien une déclaration, mais l’amitié ça se prouve. C’est un beau sentiment.
Elle se fonde sur trois exigences, celles que j’ai rappelées devant vous. La reconnaissance du passé dans le respect des mémoires, de toutes les mémoires. La seconde exigence, c’est la solidarité entre nos deux nations qui partagent tant de destins communs. Et enfin la troisième exigence, c’est de lever l’espérance. L’espérance pour la jeunesse, la jeunesse de l’Algérie, la jeunesse de la France, celle qui va demain décider du sort de nos deux nations.
C’est pour elle que nous formons cette déclaration d’amitié. C’est pour elle que nous engageons ce partenariat exceptionnel d’égal à égal. C’est pour elle, cette jeunesse de France, cette jeunesse d’Algérie, que je suis venu ici, en visite comme chef de l’État, comme président de la République, pour vous dire combien je crois à l’amitié entre la France et l’Algérie.
Merci.
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Discours de M. le Président de la République à l'université de Tlemcen
Monsieur le Président de la République, avec lequel j’ai descendu les avenues de Tlemcen, main dans la main, avec le sentiment de faire l’histoire à notre tour,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le recteur, qui me fait grand honneur aujourd'hui, non seulement en me remettant au nom de l’université de Tlemcen le titre de docteur honoris causa mais en plus en m’offrant tant d’ouvrages, tant de lectures, que je me demande encore comment je vais pouvoir trouver le temps de parcourir les livres, pourtant essentiels de l’histoire universelle.
Je vous fais une promesse: la nuit, je lirai ces œuvres, non pour trouver pour le sommeil comme certains pourraient l’imaginer mais pour rester éveillé par rapport à la contribution de ces auteurs à la science et à la philosophie. Je suis particulièrement sensible à l’accueil qui m’est réservé à Tlemcen aujourd'hui. Une ville si chère au Président Bouteflika, une ville multiséculaire dont les racines plongent au plus profond de l’histoire de l’Algérie.
Tlemcen fut en effet la capitale pendant trois siècles de la dynastie zianide, qui a profondément marqué le destin algérien, et dont la mosquée d’Alger demeure le plus beau des symboles.
Tlemcen, ville de culture qui a été l’an dernier capitale même de la culture islamique. Je sais l’importance que l’Algérie a attaché à cet événement, auquel elle a associé de nombreux partenaires, dont la France parce que c’était la place de la France, parce que mon pays reconnait le rôle éminent qu’occupe les cultures d’Islam dans le patrimoine commun de l’humanité.
J’ai eu à inaugurer, ce fut une fierté, comme Président de la République, le département des arts islamiques au Louvre qui porte témoignage de la richesse, de l’universalité de ces cultures, de leur diversité. Elles n’ont rien à voir avec le fanatisme dont l’Algérie a souffert pendant des années douloureuses. Je suis convaincu que les meilleures armes pour lutter contre ces dérives se trouvent à l’intérieur-même de l’islam.
Tlemcen illustre cette vocation universelle car cette ville s’est tournée dès le Moyen-Age vers l’Espagne chrétienne. Elle a aussi compté sur la communauté juive qui a ici tant apporté aux sciences, à la musique et aux traditions religieuses comme le pèlerinage au tombeau du rabbin Enkaoua, l’illustre si bien.
Tlemcen témoigne de l’existence d’une fraternité méditerranéenne dont notre rôle est de rappeler à chaque fois l’utilité et le sens.
L’université de Tlemcen, votre université, je salue ici les professeurs et tous ceux qui se consacrent à la diffusion de la connaissance et du savoir, l’université de Tlemcen est le symbole de cette expression universelle qui fait que nous pouvons tous contribuer aux échanges, à l’information et à la diffusion de l’excellence. Cette université est placée sous le patronage glorieux de Sidi Boumedienne, ce maître du soufisme médiéval. On l’appelait le professeur des professeurs et il fut lui-même un lien entre les peuples de la Méditerranée. Il était né à Séville. Il alla étudier dans l’Atlas avant de poursuivre son itinéraire en Arabie pour ensuite connaître la belle ville de Béjaïa et pour s’établir enfin, finalement après avoir tant voyagé, dans la ville des villes, c'est-à-dire Tlemcen. Il incarne lui-même l’islam des lumières.
Mais votre université est aussi le lieu où s’enseignent, au plus haut niveau, toutes les disciplines scientifiques, économiques, technologiques, qui font la force de l’Algérie d’aujourd’hui.
C’est donc pour moi un honneur, que de recevoir le titre de docteur honoris causa de votre université. Compte-tenu de la fonction qui est la mienne aujourd'hui en me remettant cette distinction, en me faisant docteur, c’est la France que vous honorez.
C’est un signe, un de plus, des liens qui vous unissent à la France, notamment à travers la communauté universitaire. Tlemcen est liée à l’université de Montpellier, rien que de plus normal, puisque Tlemcen a avec Montpellier une relation toute particulière, un jumelage. Mais Tlemcen est également comme université liée à l’université d’Evry, c’est le sens de la présence de Manuel Valls, ministre de l’Intérieur, il n’y en a pas d’autre! Mais après, je vais faire le tour de France car vous êtes aussi en relation avec l’université de Bordeaux, de Lyon, de Grenoble, de Valenciennes, et même de Nantes – je crois Monsieur le recteur est particulièrement attaché à cette ville et il n’est pas le seul.
Ce titre m’oblige au sens où je veux comme Président de la République française intensifier les relations scientifiques, culturelles, humaines entre les universités, autour notamment de la langue française car ici vous avez fait le choix d’enseigner du français. Vous participez au projet d’école doctorale de Français avec de plus de 50 magistères, 7 doctorats soutenus entre 2004 et 2008.
La francophonie, la langue française n’est pas un enjeu pour mon pays seulement. La langue française n’appartient pas à la France, elle appartient au monde tout entier. Nous la donnons, au sens où nous faisons en sorte que la langue puisse être pratiquée par tous. C'est une volonté, ce qu’on appelle la francophonie, volonté de pluralisme, volonté de diversité, volonté aussi de liberté. Car la langue porte aussi des valeurs.
Au-delà de cette de cette université, c’est pour faire rayonner la culture et la connaissance. Je veux saluer tout l’effort de formation qui est engagé en Algérie depuis l’indépendance, ce choix que vous avez fait de donner priorité à l’école. Sans doute est-ce aussi ce que vous aviez retenu de la France, de ce qu’elle a de meilleur, de ce qu’elle avait également porté au lendemain de sa propre révolution, celle de 1789, autour du projet de Condorcet pour permettre l’accès de tous à la connaissance et au savoir. Faire de l’école un projet de société, donner de l’égalité mais aussi de l’émancipation, de la liberté, de la fierté. Et encore aujourd’hui, je fais de l’école et de l’éducation la priorité de mon gouvernement et c’est pourquoi je veux m’adresser comme je l’ai fait, il y a encore quelques mois, pour la France, je veux m’adresser aux jeunes algériens.
La jeunesse est la richesse de votre pays. Près de 70% des Algériens ont moins de 35 ans. L’Algérie compte 1 300 000 étudiants, c’est considérable et bientôt 2 millions en 2015. C’est un immense atout, à la condition que cette formation débouche sur, non seulement des diplômes, non seulement des qualifications, mais des emplois. C’est là l’enjeu.
Vous avez, jeunesse algérienne, eu une enfance douloureuse parce que vous avez vécu dans des années de trouble. Vous avez dû faire face à de redoutables épreuves. Vous avez parfois grandi dans la peur. Mais aujourd’hui, à l’image de l’Algérie, vous êtes sortis victorieux de ce combat.
Vos parents se sont réconciliés et le mérite en revient au Président Bouteflika.
Mais se rassembler, se réunir ne suffit pas. Ce qu’il faut c’est porter un projet, c’est bâtir l’avenir. Alors comme toutes les jeunesses de la Méditerranée, vous sentez se lever des possibilités nouvelles, des occasions à saisir, des espoirs, des exigences de liberté, de dignité, de démocratie. Mais, en même temps, votre génération doute car elle est confrontée, comme partout, au chômage, à la précarité, à l’incertitude quant à l’avenir. Et parfois cette inquiétude conduit certains à vouloir quitter leur propre pays, malgré l’amour qu’ils lui portent et à regarder vers l’Europe, vers la France.
Nous nous sommes prêts à recevoir, bien sûr, des étudiants qui viennent se former, mais l’avenir des Algériens il est en Algérie.
La jeunesse française connaît les mêmes interrogations et les mêmes espérances. et c’est pourquoi, compte-tenu de l’histoire qui nous a séparés, mais qui nous a aussi unis à travers les liens humains, que jeunes Algériens et jeunes Français, par la géographie, par la culture, par la langue, par les familles peuvent se rapprocher et le partenariat que nous avons scellé avec le Président Bouteflika, avec les deux gouvernements français et algériens, c’est d’abord et avant tout un pacte pour la jeunesse.
Et cela passera par la formation, c’est-à-dire par la volonté qui sera la nôtre de contribuer à donner à toutes les universités les conditions de pouvoir davantage échanger. Cela passera par des centres de formation, notamment en technologie, qui bénéficieront de notre propre expérience des instituts supérieurs de technologie. Déjà 4 instituts d’enseignement supérieur algériens vont avoir notre accompagnement. L’information grâce à la langue puisque nous la mettons en partage, la formation aussi grâce à la mobilité entre la France et l’Algérie. Déjà près de 30 000 jeunes Algériens poursuivent leurs études en France. Je souhaite qu’il y ait un effort pour leur donner les meilleures conditions d’accueil et de réussite. Mais je souhaite aussi dans le cadre de la réciprocité des échanges que puisse s’intensifier l’accueil de jeunes Français étudiants, ici, dans vos universités.
Je souhaite aussi que les entreprises contribuent à cet effort de formation. Chaque fois qu’un investissement se fait en Algérie, il doit y avoir l’accompagnement par des mesures de qualification permettant à des jeunes de trouver un emploi durable.
Voilà ce que je voulais dire à la jeunesse algérienne, qu’elle ait confiance dans son destin, qu’elle ait foi dans sa réussite. Qu’elle sache bien que la France est son meilleur ami, son meilleur allié pour aller plus loin. Que les jeunes Français ne demandent qu’à mieux connaître les jeunes Algériens.
Votre génération, celle des moins de 25 ans, je pourrais dire, même celle des moins de 35 ans a toujours connu l’Algérie indépendante. Dès lors, vous êtes fiers de votre histoire, vous en connaissez les grandeurs et les douleurs. Vous êtes fiers du combat de vos parents pour la liberté. Mais en même temps, vous devez vivre maintenant dans la paix des mémoires, vous devez être tournés résolument vers l’avenir, ne plus regarder le passé comme une division, mais comme une nécessité de réunion et de rassemblement.
C’est ce message que je voulais venir délivrer, ici, devant vous, à l’université de Tlemcen. L’avenir, que nous avons maintenant en partage, l’avenir que nous devons construire ensemble, l’avenir que nos jeunesses demandent, nous devons être suffisamment responsables pour l'organiser en commun. Oui, vous pouvez, vous devez avoir confiance.
Ce que nous sommes en train de décider, aujourd’hui, à l’occasion de ce voyage c’est de donner une chance, une chance de plus, une grande chance pour l’amitié entre la France et l’Algérie. Cette chance là, jeunesse algérienne, saisissez là, elle est la vôtre.
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Conférence de presse conjointe du Président de la République et de M. BOUTEFLIKA, Président de la République algérienne démocratique et populaire.
TLEMCEN (ALGERIE)
Jeudi 20 décembre 2012
Mesdames, Messieurs,
Nous arrivons au terme de cette visite, exceptionnelle à bien des égards. Je veux remercier le président BOUTEFLIKA, son gouvernement, pour l’accueil et pour la construction d’une relation politique de haut niveau, ce partenariat d’égal à égal que j’avais appelé de mes vœux.
Je veux également saluer le peuple algérien pour l’accueil qui m’a été réservé, non pas à titre personnel, mais qui a été réservé à la France dans son ensemble. Ses messages, ses encouragements, ses mots d’amitiés n’étaient pas dirigés vers ma personne, mais étaient autant de messages de confiance à l’égard de la relation que nous pouvons nouer avec le peuple algérien.
La France a été bien accueillie ici, et il est attendu beaucoup de nous, non pas de revenir sur le passé, j’ai dit ce qui était la vérité, mais pour bâtir l’avenir, construire des projets, aussi bien dans le domaine économique, et il y a eu des accords très importants qui ont été signés , dans le domaine culturel où les algériens prennent conscience aussi de ce que peut être la langue française comme lien, mais aussi avec les échanges universitaires, et à cet égard, la réception qui a été faite à l’université de Tlemcen pour le président que je suis, mais pour la France, était autant d’appels pour des coopérations de haut-niveau.
Je ne vais pas être plus long parce que j’avais dit que je jugerais la réussite de cette visite à l’aune de ce que nous étions capables de dire sur le passé, et de faire pour l’avenir. Et j’avais placé mon rendez-vous avec l’Algérie autour de deux mots essentiels : la vérité pour évoquer l’histoire, et la volonté pour bâtir l’avenir, et c’est autour de ces deux mots que nous avons je le crois réussi cette visite.
QUESTION – Peut-on connaître les raisons qui ont motivées votre acquiescement au choix de Tlemcen, comme seconde et ultime étape de votre voyage en Algérie et si Tlemcen n’avait pas été choisie, qu’elle aurait été la ville que vous auriez choisie et qu’elles en seraient les raisons et également pouvez-vous nous dire quelque chose, quelques petits détails sur le livre que vous avez offert au président, hier à Alger ?
LE PRESIDENT - Oui, je voulais aller à Alger parce que c’est la capitale, parce que c’est là que sont situées les institutions algériennes, parce que c’est là que nous avons signé des accords et porté un partenariat. Mais j’avais souhaité, les autorités algériennes également, que nous puissions aussi nous rendre dans une ville, que je n’ose pas dire de province, ce terme n’existe pas ici en Algérie, c’est une conception française la province. Une autre grande ville d’Algérie pouvait se présenter à nous, la ville d’Oran parce que nous allons avoir l’installation de l’usine Renault. Il pouvait y avoir également Constantine, mais il y avait déjà eu un déplacement qui avait été fait à Constantine. Il faut changer. Je pouvais aller à Sétif, cela eut été sûrement un message en tant que tel, c’est la raison pour laquelle j’ai parlé de Sétif, ce matin. Pourquoi j’ai choisi Tlemcen ? Parce que je savais que c’était une ville chère au cœur du président BOUTEFLIKA, mais aussi parce que c’est une ville de rayonnement, de culture, d’unité et de rassemblement dans la diversité des religions.
J’ai parlé ici à Tlemcen, de l’Islam culturel, mais j’ai parlé aussi de la religion chrétienne, des Juifs, parce qu’ici à Tlemcen, il y a eu ce brassage qui fait que cette ville est exceptionnelle. Et puis enfin, j’aurais eu tort de ne pas choisir Tlemcen au regard de l’accueil qui m’a été réservé ainsi qu’au président BOUTEFLIKA. Donc, je remercie tous ceux qui ont permis ce déplacement.
Ensuite le livre, c’est un livre très ancien, qui justement évoque la chrétienté, toujours dans cette ouverture aux autres, ce souci du respect de toutes les religions. En France, nous appelons cela la laïcité qui nous permet de vivre ensemble et je suis aussi conscient de ce qu’est l’Islam de France, et de ce qu’il doit avoir comme respect. Avec le gouvernement, le ministre de l’Intérieur, nous veillons à ce qu’il n’y ait aucune confusion, aucun amalgame par rapport au fondamentalisme ou à l’intolérance et nous luttons contre toutes les discriminations.
Et je sais qu’en Algérie, ce sujet-là est sensible, parce que chaque fois qu’il y a une atteinte aux droits, une menace par rapport à l’égalité, les Algériens se sentent concernés, mais nous aussi nous sommes concernés. Nous voulons qu’en Algérie il y ait le respect de toutes les situations et j’ai été très heureux, je peux vous le dire d’être accueilli au cimetière d’Alger. Avec l’entretien qui est fait des sépultures, des tombes par l’Etat algérien, cela me permet de dire aux familles de Français nés en Algérie dont les parents sont morts en Algérie et qui ne savent pas toujours comment revenir pour honorer leurs morts de le faire, de le faire parce qu’ils y seront bien accueillis, parce que nous ferons tout pour qu’il en soit ainsi et les autorités algériennes également.
QUESTION – M. le Président, un mot sur ce français enlevé au Nigeria, de quelles informations disposez-vous, la France que compte-t-elle ou peut-elle faire ?
LE PRESIDENT – Je confirme d’abord que l’un de nos compatriotes a été enlevé dans le nord du Nigeria. Il y a eu deux morts nigérians, dans le cadre de cet assaut. Notre ressortissant a été emmené, nous cherchons tous les éléments qui nous permettent de le retrouver. Je suis en contact avec le gouvernement en France pour avoir toutes les informations. Ici, les ministres ont été tenus informés minute par minute, aussi bien le ministre des Affaires étrangères que le ministre de la Défense, et nous utiliserons tous les moyens pour retrouver notre ressortissant.
QUESTION – Vous avez appelé à orienter le regard vers l’avenir. Il se trouve que la France continue d’aborder ces relations avec le continent africain sur la base de l’héritage colonial. Donc, ma question est de savoir, est-ce que réellement la page du passé colonial a des chances d’être tournée ?
Vous avez dit dans votre discours à l’université de Tlemcen, en parlant justement de la réconciliation en Algérie que se réunir et se rassembler ne suffisaient pas, je vous invite à être plus explicite ?
LE PRESIDENT – Je vais l’être puisque vous m’y invitez en toute liberté. J’ai fait un discours à Dakar, il y a plusieurs semaines sur ce que je voulais trouver comme relation avec l’Afrique, c’est-à-dire là encore tournée vers l’avenir. La volonté de ne pas entretenir les confusions. La France a une relation qui doit être fondée sur des principes avec l’Afrique et avec tout autre continent. Mais encore davantage avec des pays qui ont pu être dans ce qu’on appelait l’empire colonial et avec lesquels nous devions être à égalité et dans le respect. Mais il ne faut pas non plus entretenir le passé comme une forme de récrimination. Nous avons dit ce qu’il convenait de dire sur le système colonial, je l’ai également abordé ce matin. Donc, nous pouvons travailler ensemble sur cette base-là de vérité, de respect et d’engagement pour l’avenir.
Pour ce qui concerne la réconciliation, elle était nécessaire, indispensable et j’ai salué le mouvement qui avait été engagé en son temps par le président BOUTEFLIKA qui a mis dix ans avant d’aboutir à une situation où la sécurité est revenue, la compréhension. Mais en même temps, je sais que l’Algérie ne veut pas en rester là. Si elle s’est réunie, si elle s’est rassemblée, si elle a été capable, là encore d’exorciser les peurs et d’éradiquer les intolérances et les violences, elle veut, l’Algérie, s’engager pour l’avenir et donc, nous la France, nous devons être présents au rendez-vous, que l’Algérie d’ailleurs a lancé à l’ensemble du monde, pas simplement à la France. Je ne demande aucune exclusivité, je dis simplement qu’entre la France et l’Algérie, il y a de telles relations, de tels liens que nous pouvons faire bien plus qu’aujourd’hui et c’est ce que nous allons montrer par la déclaration d’amitié, par le document qui permet d’engager une coopération sur cinq ans. Donc maintenant, ce sont les actes qui doivent venir parce que les paroles ont été prononcées, à l’occasion de cette visite, des accords ont été signés, mais maintenant, nous devons les traduire.
QUESTION – Pendant ces deux jours, il a été très peu question des problèmes internationaux. Je voudrais vous poser deux questions. La première porte sur la Syrie, vous avez dit que le devoir de la communauté internationale, si je ne trahis pas votre parole, c’est de hâter le régime du président ASSAD. Après Marrakech, que peut faire la communauté internationale et est-ce que vous considérez qu’il faut s’attendre quelque chose d’utile, de positif des négociations qui ont lieu actuellement entre les Russes et les Américains, avec Monsieur BRAHIMI ?
La deuxième question porte sur la colonisation israélienne dans l’Etat palestinien. Vous avez voté pour la reconnaissance de la Palestine en tant qu’Etat observateur, non-membre des Nations Unies. Or, depuis plusieurs semaines, la colonisation s’accélère à un rythme infernal, bientôt, il n’y aura plus la possibilité d’avoir cet Etat que vous appelez de vos vœux avec la continuité territoriale. Est-ce qu’on peut continuer comme cela à ne rien faire vis-à-vis de ce gros problème ?
LE PRESIDENT – D’abord, nous avons beaucoup parlé avec le président BOUTEFLIKA, de la situation internationale. Vous savez sa sagesse, sa connaissance, son expérience, elles nous sont précieuses. Et donc, nous avons abordé trois grands sujets. Le premier, c’est le Sahel, le Mali et avec, je l’ai rappelé hier, la même conception. La discussion politique, la négociation, là encore pour une réconciliation, mais uniquement avec les groupes qui ont rompu tout lien avec le terrorisme et qui acceptent le principe de l’intégrité du Mali et en même temps continuer la pression internationale. Aujourd’hui même, la résolution que nous attendions a été adoptée par le Conseil de sécurité et rend désormais possible si les Africains mettent en œuvre ses principes, une intervention dont la France ne sera pas partie prenante, mais que la France appuiera par des moyens de formation et de logistique. L’Algérie comprend cette position et elle sait pourquoi nous agissons, non pas pour nous-mêmes mais pour des principes. Non pas par nous-même, puisque ce sont les Africains qui en décideront.
Deuxième sujet que nous avons abordé, la question israélo-palestinienne et je savais que le vote aux Nations Unies n’allait pas provoquer immédiatement la consécration de l’Etat palestinien. Nous, nous avons mis notre acte en conformité avec notre parole, nous étions favorable à cette reconnaissance de la Palestine comme état non-membre observateur, mais nous savions bien que cela n’allait pas produire ce qui était peut-être espéré par certains. Il n’y a pas d’autre issue que la négociation et par rapport aux annonces de colonisation, nous avons condamné ces déclarations, nous savons qu’il y a des élections en Israël au mois de janvier et nous souhaitons qu’au lendemain de ces élections un processus de négociation puisse s’ouvrir enfin pour aboutir à la solution des deux Etats.
Le troisième sujet, c’est la Syrie, le groupe des amis de la Syrie s’est réuni à Marrakech et a continué à affirmer son soutien à une transition, c'est-à-dire au départ de Bachar EL-ASSAD.
Il y a eu aussi un travail avec la coalition nationale syrienne et pour répondre précisément à votre question, oui, nous soutenons tous les efforts de Monsieur BRAHIMI, qui est l’envoyé des Nations Unies pour, avec les Russes, avec les Américains aussi, mais surtout avec les Russes trouver une issue, puisque nous savons bien que le Conseil de Sécurité est bloqué compte tenu des positions de la Russie. Et, nous attendons que Monsieur BRAHIMI contribue à la solution politique. Là encore, les deux démarches ne sont pas contradictoires, l’une d’appui à l’opposition syrienne la nôtre, à travers le groupe des amis, l’autre, la recherche d’une solution politique à travers la démarche de l’envoyé spécial des Nations Unies.
QUESTION – Vous venez au début de votre conférence de presse de faire un premier bilan, si je peux l’appeler ainsi de votre visite que vous avez jugée très exceptionnelle. Je souhaiterais savoir quelle seront les résultats immédiats dans le cadre de cette refondation des relations, ou plutôt le recentrage de ces relations bilatérales, quelles seront les dividendes de cette visite dans l’immédiat ?
LE PRESIDENT – Les dividendes, c’est comme les fruits, il faut attendre qu’il y ait eu suffisamment d’investissements pour les retrouver ou les recouvrer. Je crois qu’il y a déjà un résultat immédiat qui est ce climat qui a été particulièrement favorable au cours de cette visite. Climat entre les deux présidents, les deux gouvernements, également l’accueil qui m’a été réservé, mais aussi les mots qui ont été choisis par les uns comme par les autres pour dépasser ce qui avait pu nous séparer, pour construire. Cela, c’est le résultat immédiat, c'est-à-dire une confiance, le souci d’aller de l’avant et puis cet appel à la jeunesse. Est-ce que concrètement nous pourrons avoir des résultats rapides, je le crois. Pour l’emploi, nous avons cette installation de Renault. Pour la coopération culturelle, cela ira vite, pour l’agriculture, les choses ont été également bien posées, pour la défense, ce n’était pas si évident de nouer un accord de défense. Il y a des progrès assez substantiels, mais vous avez raison, c’est sur le long terme que l’on jugera. Moi, je suis conscient de ce qui s’est produit dans le passé, des annonces, des espoirs, puis ensuite des déceptions.
Donc, nous allons être très vigilants, d’où également la méthode que nous avons utilisée, c'est-à-dire que chaque année il y aura une vérification du respect des accords et du document que nous avons signé
QUESTION – Monsieur le Président, vous avez dit à Alger être pour la vérité sur la guerre et la mémoire des blessés. Pouvons-nous d’emblée penser ou envisager un travail commun entre les historiens des deux parties ? La deuxième question en rapport avec l’assassinat des moines de Tibhirine, et donc l’enquête que la justice française compte mener ici même en Algérie, va-t-elle aussi donner des réponses ou peut-être plus de réponses sur l’affaire ?
LE PRESIDENT – J’ai souhaité que nous puissions ouvrir nos archives, permettre le travail des historiens, avoir une commission dans laquelle historiens français et historiens algériens puissent travailler ensemble. Cette volonté-là est commune aussi aux Algériens, et c’est la bonne méthode.
Ensuite, pour ce qui concerne la justice, il y a une enquête de la justice française. Il y a une enquête de la justice algérienne. Il y a des coopérations. Et nous devons faire travailler en toute indépendance, mais également en toute liberté la justice sur la question qui reste encore posée des moines de Tibhirine.
QUESTION – Monsieur le Président, j’ai deux questions à poser. La première, Tlemcen est située à un jet de pierres de la frontière marocaine. Est-ce qu’il a été question lors de vos discussions avec Monsieur le Président Bouteflika du dossier sahraoui. Est-ce qu’on peut espérer que la position française, que cette question soit revue ?
Deuxième question, des officiels français ont laissé entendre que Paris est disposé à vendre des armes à l’Algérie. Est-ce que vous avez reçu une demande bien claire et précise de la part des autorités algériennes ?
LE PRESIDENT – Nous avons parlé de la frontière fermée entre l’Algérie et le Maroc et de ses causes, c’est-à-dire le contentieux qui demeure par rapport à l’avenir du Sahara occidental. La position française, c’est la suivante : l’ONU, rien que l’ONU et toutes les résolutions des Nations Unies et nous n’en changerons pas.
Ensuite, j’irai, vous le savez, au Maroc, au début de l’année 2013 et, je ne suis pas médiateur, je n’ai pas à jouer un rôle d’intermédiaire, personne ne me le demande. Mais je dirai aussi bien aux Marocains ce que j’ai dit aux Algériens, c’est que nous devons aller vers l’application des résolutions de l’ONU et faire en sorte que ce qui a provoqué la fermeture de la frontière puisse être levé. Je crois que c’est l’intérêt du Maghreb.
Par rapport à l’armement, il y a un accord. Vous pourrez le lire, il n’est pas secret. Donc, il ne s’agit pas de matériel d’armement, ce sont des matériels qui sont prévus dans l’accord. Ce ne sont pas les armes comme on pourrait le penser.
QUESTION – Vous avez dit tout à l’heure qu’il est beaucoup attendu de la France. Est-ce qu’on peut savoir ce que vous a été demandé officiellement par les autorités algériennes. Qu’est-ce que la France attend aussi de l’Algérie.
Une deuxième question par rapport au dossier malien. Vous avez dit qu’il y a convergence entre les deux pays, alors que la France est favorable à une intervention militaire et l’Algérie défend toujours la solution politique. Pouvez-vous nous expliquer cette contradiction ?
LE PRESIDENT – Nous devons faire ensemble. Nous ne demandons rien comme concession aux Algériens, pas plus que les Algériens nous demandent des concessions à nous-mêmes. Nous avons à bâtir un certain nombre de relations nouvelles dans le cadre d’accords, c’est ce que nous avons fait dans de nombreux domaines. Nous ne nous sommes pas retrouvés en situation d’échange ou de troc. Nous avons voulu justement nous situer sur une autre démarche, c’est-à-dire tout simplement avancer, pas revenir sur le passé, pas échanger de la culture contre de l’économie, ou de la diplomatique contre de la formation. Nous avons voulu faire tout à la fois. Nous retrouver dans une relation politique, comme dans une relation économique tout en parlant aussi des aspects d’éducation et de culture.
Sur le Mali, que les choses soient claires, la France se situe dans le cadre des Nations Unies. Le Conseil de sécurité, à l’unanimité, vient de prendre une résolution sur le Mali. Ce n’est pas que la France, c’est les Nations Unies. C’est tous les pays membres du Conseil de sécurité. Est-ce que c’est contradictoire avec la position de l’Algérie ? Pas davantage, puisque l’Algérie souhaite des négociations politiques, nous aussi. En même temps, il y a une pression à exercer, sinon le terrorisme ne sera pas éradiqué.
QUESTION – On sait très bien que les relations entre l’Algérie et la France n’ont pas toujours été faciles, il y a eu beaucoup de haut, beaucoup de bas, pensez-vous, Monsieur le Président qu’aujourd’hui c’est le réalisme qui a pris le dessus sur la passion ?
Deuxième question, il y a à peine 30% des Français qui ont une bonne opinion sur la l’Algérie, donc loin derrière le Maroc et la Tunisie. Quel message vous pouvez adresser aux Français à partir de Tlemcen Monsieur le Président ?
LE PRESIDENT – Un peu de passion est utile, beaucoup de réalisme également. Il faut une part d’émotion. Il faut une part de conviction. Il faut une part de sentiments sans lesquels il n’y a rien de possible y compris pour le réalisme. Il y avait deux manières de faire : soit en rester aux incantations, aux paroles et ce voyage aurait peut-être apaisé ou satisfait certains plutôt que d’autres. Je n’ai pas voulu prendre cette méthode-là.
L’autre façon, c’était de ne faire que du réalisme économique, mais l’économie se nourrit aussi de confiance politique et de relation humaine. Nous avons plutôt fait une déclaration d’abord d’amitié pour porter la part d’émotion, de passion et d’humanité dans laquelle nous souhaitons inspirer la relation franco-algérienne et puis de l’autre nous avons voulu avancer.
C’est un voyage qui était tourné résolument vers l’avenir, qui ouvrait ce que j’ai appelé un nouvel âge, 50 ans après. Après 50 ans on doit passer vraiment au moment de réalisation de sa vie. Jusqu’à 50 ans on peut se poser des questions, on peut réfléchir, on peut parfois même changer. Mais après 50 ans il faut savoir ce que l’on veut.
Voilà, l’Algérie et la France savent maintenant ce qu’elles veulent.
Sur le message, oui, vous avez raison. Je pense que l’Algérie est encore mal connue des Français. Bien sûr que beaucoup de Français qui ont un lien avec l’Algérie ont une relation de cœur, parfois de ressentiment. Tout dépend de la situation. Mais beaucoup de Français pensent que venir en Algérie c’est compliqué. C’est simple pourtant. Beaucoup de Français pensent que le tourisme ce n’est pas en Algérie. Il suffit de visiter Tlemcen pour être convaincu du contraire. Beaucoup de Français pensent qu’il y a de l’insécurité en Algérie. Je peux comprendre qu’après la période très dure, très éprouvante, il y ait eu des interrogations. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Beaucoup de Français ne savent pas si les Algériens sont accueillants. J’espère que les images qui seront diffusées de ma visite démontreront tout l’inverse. J’ai rencontré des étudiants à l’université de Tlemcen. Ils étaient tous algériens sauf un qui était français et qui a fait cette confidence : « chaque fois que je viens à Tlemcen », il y venait régulièrement, « on me dit bienvenu, et on me dit bienvenu à la »rance".
Aujourd’hui comme hier, les Algériens ont dit « bienvenu » à la France et aux Français.
QUESTION – Vous avez déclaré ce matin, vous avez reconnu dans votre discours devant les parlementaires algériens que le système colonial qui a été injuste a infligé des souffrances pour le peuple algérien. Mais force est de constater que dans le pays dont vous êtes le Président, il y a une loi votée, la loi du 23 février qui glorifie malheureusement le colonialisme. Donc, il y a une sorte de contradiction. Est-ce qu’il n’y a pas lieu, avec la majorité que vous possédez au niveau de la chambre nationale, de revoir cette loi plutôt l’abrogée peut-être ?
LE PRESIDENT – Il y a tant à faire avec cette majorité, tant de lois à voter que l’on pourrait se dire que c’est inutile de revenir sur celle-là. Mais, nous n’avons pas besoin d’y revenir puisque c’est déjà fait. Puisque le Président CHIRAC avait eu l’intelligence de saisir le Conseil constitutionnel qui avait annulé ce point-là. Il n’y a plus rien dans la loi française qui fait référence au système colonial en Algérie
QUESTION – Vous avez beaucoup insisté au cours de toutes vos interventions sur le passé d’un côté, l’avenir de l’autre, autrement dit, un passage culturel pour un franchissement politique. Est-ce que vous pensez que pour la Méditerranée, il faut un tandem ou un moteur franco algérien comme il a fallu un moteur franco-allemand pour l’Europe ? Et un de vos amis me disait ce matin amusé : Monsieur HOLLANDE tient avec cette histoire de Méditerranée son futur prix Nobel ?
LE PRESIDENT – J’ai déjà été docteur honoris causa cet après-midi. Je ne voudrais pas gonfler d’importance. Mais, le 22 janvier, il va y avoir le 50ème anniversaire du traité de l’Elysée, 50 ans. 50 ans, pour l’amitié franco-allemande. 50 ans, après que le Général de GAULLE et Konrad ADENAUER, après une guerre terrible contre la barbarie nazie aient été capable de se retrouver ensemble pour ouvrir non seulement un nouveau temps pour la France et l’Allemagne, mais une nouvelle espérance pour le continent, l’Europe.
Aujourd’hui, 50 ans après, l’indépendance de l’Algérie, nous pouvons être capables, la France et l’Algérie d’ouvrir un nouveau temps, une nouvelle époque, une nouvelle histoire, pas simplement pour nos deux pays, mais pour la Méditerranée.
Voilà, c’est le message que j’ai prononcé à Alger ce matin. Je pense que nous pouvons en être capables. Demain, je suis convaincu que Français et Algériens seront fiers s’ils sont en mesure d’ouvrir ce processus. Et il se trouvera bien un Président de la République française qui viendra en Algérie après moi - elle finira par arriver - et qui pourra regarder ce que nous aurons fait.
Mais je souhaite que cette trace là soit laissée et que cette responsabilité nous engage. C’est dire le niveau auquel nous devons parvenir. C’est un grand enjeu pas simplement pour nos deux pays, . La France et l’Algérie ont des vocations universelles. Elles doivent ouvrir la voie aux autres comme la France et l’Allemagne l’ont fait pour l’Europe.
Merci à tous
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Gadiri Mohammed Presse Électronique d'informations Tlemcen.
Gadiri Mohammed Presse Électronique d'informations Tlemcen
Le chef lieu de la wilaya de Tlemcen se prépare pour accueillir son excellence le président de la république Abdelaziz Bouteflika et le président de la république Française François Hollande le 20 novembre prochain.
C’est dans ce cadre que depuis deux semaines, les travailleurs de la commune et d’autres services techniques de la wilaya travaillent sans relâche et s’attellent à donner un visage nouveau à la capitale des Zianides de la route de l’aéroport, à Bab Wahran, au centre ville, El Méchouar, l’auditorium de la faculté de médecine université Aboubekr Belkaid, au plateau de lalla Setti et à d’autres sites historiques et touristiques.
Pour les citoyens de la région, cette visite sera une date historique et restera gravée dans la mémoire.
Et donc, l’accueil sera chaleureux. Toutes les discussions accordent une place importante à ce sujet qui est d’actualité.
C’est un évènement à ne pas rater dira un citoyen, pour voir de près les deux présidents dans notre wilaya. Tlemcen est aussi pavoisée avec les portraits des deux chefs de l’Etat.
Bienvenue au président de la république Abdelaziz Bouteflika et au président français François Hollande à Tlemcen.
Gadiri Mohamed 16 décembre 2012
Jeudi 20 décembre 2012.
Le président de la république française François Hollande a été accueilli par le président Abdelaziz Bouteflika à l'aéroport international Messali Hadj de Zenata ce jeudi 20 décembre 2012.
Apres un bain de foule au centre de la ville, le président s'est à l'auditorium de la faculté de l'Université ou il a reçu le Doctorat Honoris Causa du recteur de l'université, puis la visite de la mausolée de Sidi Boumédiene, le palais royal, l'institut français et enfin une conférence de presse tenue à l'hôtel renaissance du plateau Lalla Setti
gadiri
Gadiri Mohammed Presse Électronique d'informations Tlemcen.
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Déclaration d'Alger sur l'amitié et la coopération entre la France et l'Algérie
Préambule
La France et l’Algérie sont déterminées à ouvrir un nouveau chapitre de leurs relations, cinquante ans après l’indépendance de l’Algérie.
Les deux parties partagent une longue histoire et ce passé a longtemps alimenté entre nous des conflits mémoriels auxquels il est nécessaire de mettre un terme. Elles doivent, pour cela, regarder le passé en face, ensemble, avec lucidité et objectivité, tout en recherchant une voie originale permettant une lecture objective de l’histoire.
La France et l’Algérie ont noué des liens humains, affectifs et culturels d’une exceptionnelle intensité, dans tous les domaines.
Le moment est maintenant venu de donner à ces liens une impulsion puissante pour porter ces relations à un niveau conforme à leur potentiel et aux aspirations de leurs peuples.
L’une et l’autre entendent jouer un rôle exceptionnel dans la construction d’un espace euro méditerranéen de paix et de sécurité, de démocratie, de justice et de liberté, de développement et de prospérité.
Les deux parties ont décidé de développer un partenariat exemplaire et ambitieux, fondé sur l’égalité, le respect mutuel, l’équilibre des intérêts et la solidarité. Ce partenariat stratégique devra inclure toutes les dimensions de notre relation et aura vocation à se développer rapidement dans tous les domaines.
I - Dialogue politique
La France et l’Algérie souhaitent trouver ensemble des réponses adaptées aux défis d’un monde en profonde mutation. Elles considèrent qu’elles ont, chacune, des atouts qu’elles peuvent valoriser dans le cadre d’un dialogue politique confiant et approfondi.
Elles décident, en conséquence, de renforcer leurs échanges à haut niveau sur les questions internationales et régionales d’intérêt commun et pour assurer le suivi de la relation bilatérale dans tous ses aspects.
Dans cette perspective, il est mis en place un ‘’Comité intergouvernemental de Haut Niveau’’, présidé par les deux Premiers Ministres. Ce comité tiendra sa première réunion en 2013. Il se réunira ensuite à intervalles réguliers selon des modalités qui seront définies ultérieurement.
II - Dimension Humaine
Les échanges humains qui témoignent des liens étroits entre les deux pays, représentent une richesse incomparable pour chacun d’eux.
La France et l’Algérie conviennent de favoriser le plus largement possible la mobilité de leurs ressortissants entre les deux pays. Les efforts engagés à cet effet donneront lieu à une concertation régulière au niveau diplomatique et consulaire.
La France et l’Algérie s’efforceront par ailleurs de répondre aux préoccupations exprimées par l’une des parties en ce qui concerne l’entrée et le séjour de ses ressortissants sur le territoire de l’autre, ainsi que le respect de leurs droits.
Dans ce contexte, la France réitère toute l’importance qu’elle accorde à la communauté algérienne établie en France qui a toute sa place dans la société française, à la prospérité de laquelle elle contribue activement.
III - Culture et éducation
La France et l’Algérie ont développé au fil des ans une coopération étroite dans de nombreux domaines.
Soucieux de poursuivre ces échanges, et de les intensifier, les deux parties ont élaboré conjointement un document définissant les axes de leur coopération pour la période 2013-2017.
Dans ce cadre, les deux parties souhaitent donner une claire priorité à l’éducation et à la formation. Elles ont décidé de donner une dimension prépondérante à la formation professionnelle des jeunes dans le nouveau Document Cadre de Partenariat.
Les deux parties conviennent de donner une impulsion significative à leurs relations et aux échanges culturels par la conclusion d’accords dans ce domaine et de faciliter chacune les activités des établissements éducatifs et culturels de l’autre sur son territoire.
Les deux parties décident de mettre en place toutes les facilités tendant à promouvoir et à encourager les initiatives permettant une meilleure connaissance réciproque de leurs jeunesses, en réponse à leurs attentes.
IV - Coopération économique
Les deux parties donneront un nouvel élan à leurs relations économiques. Dans ce but, elles entendent favoriser une relance équilibrée de leurs échanges et encourager le développement des investissements entre leurs entreprises.
Leurs économies doivent relever le défi du redressement productif et de la mondialisation. Elles présentent en outre de nombreux éléments de complémentarité.
Fortes de ce constat, les deux parties entendent valoriser leurs atouts et développer une stratégie visant à promouvoir les partenariats industriels entre opérateurs algériens et français. Cette stratégie devrait être mutuellement bénéfique et se traduire par le développement de l’investissement et la préservation ou la création d’emplois sur le territoire de chacune des parties, ainsi que par des transferts de compétences et de technologies. Les opérateurs économiques seront étroitement associés à sa définition et au suivi de sa mise en oeuvre.
A cette fin, elles ont décidé d’adopter une Déclaration conjointe pour un partenariat industriel et productif.
Un comité mixte de suivi de la relation économique bilatérale sera institué. Placé sous l’autorité des ministres désignés à cet effet, il présentera régulièrement un rapport aux deux Gouvernements sur l’état de cette relation et formulera à leur intention des recommandations en vue de son développement.
Alger, le 19 décembre 2012
François HOLLANDE
Président de la
République Française Abdelaziz BOUTEFLIKA
Président de la République Algérienne Démocratique et Populaire
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Conférence de presse de M. le Président de la République à Alger
Alger – Mercredi 19 décembre 2012
Mesdames, Messieurs, mon voyage en Algérie était attendu. C’est le premier que je fais ici comme Président de la République, le premier dans cette région. C’est un voyage qui vient en 2012 à un moment forcément symbolique, 50 ans après l’indépendance de l’Algérie. Ce voyage attendu, espéré, redouté, je ne sais comment il faut l’appeler. Ce voyage était nécessaire. Il vient comme un aboutissement, mais aussi comme le temps d’un nouvel âge que je veux engager entre la France et l’Algérie, 50 ans après.
Je remercie le Président BOUTEFLIKA pour non seulement son invitation, mais aussi son accueil. Je salue le peuple algérien qui m’a réservé avec enthousiasme, chaleur, une hospitalité remarquable. Je veux aussi reconnaître le travail qui a été mené par les deux gouvernements. Avant même que je ne vienne ici, pas moins de cinq ministres du gouvernement de Jean-Marc AYRAULT sont également venus en Algérie. Et nous pouvons signer avec le gouvernement algérien bon nombre d’accords dans tous les domaines.
Ces accords doivent avoir un sens, une signification. Il ne s’agit pas seulement de faire en sorte que nous améliorions pour un temps notre coopération. Ce que je veux définir avec l’Algérie c’est un partenariat stratégique d’égal à égal et qui permette justement d’entrer dans le nouvel âge de la relation entre la France et l’Algérie.
Il y aura donc une déclaration d’amitié et de coopération, c’était la meilleure formule pour nous dire ce que nous avions non seulement à nous déclarer, notre amitié, mais surtout à engager et à préparer. Ce document sera suivi par un autre qui est le document cadre du partenariat et qui est un programme de travail sur cinq ans dans les domaines économique, financier, culturel, agricole et même de défense et avec toujours l’idée d’améliorer la formation, d’accompagner les technologies et de pouvoir servir les intérêts et de l’Algérie et de la France.
Nous avons des liens et j’y reviendrai demain lors du discours que je prononcerai devant les deux assemblées. Nous avons des liens, des relations qui sont à la fois humaines, économiques, culturelles et que nous devons amplifier.
Il y a une vérité à dire sur le passé. Il y a surtout une volonté à prononcer pour l’avenir et ce voyage il est sur l’avenir. Il est pour engager une mobilisation de nos deux sociétés, au-delà de nos deux gouvernements, pour les Français et pour les Algériens. Une page se tourne, mais nous pourrions en écrire tellement d’autres.
Pour illustrer le déplacement et cette visite, il y a bien sûr ce que nous aurons à faire sur le plan des discours, ce que je ferai donc demain. Mais il y a aussi des annonces très fortes, par exemple la décision de Renault d’ouvrir une usine pour construire des automobiles non seulement pour le marché algérien, mais pour l’ensemble du continent et avec cette volonté de co-production que les ministres ont présenté, c’est-à-dire capacité à pouvoir faire que ce qui va être produit ici serve aux Algériens, mais que ce que nous pourrons également donner comme apport, comme encadrement, comme technologie, voire comme produit semi fini, serve aussi à l’Algérie et à la France.
Nous avons également une responsabilité, la France et l’Algérie. Nous sommes deux pays respectés dans le monde avec des principes pour la politique extérieure qui nous réunissent et nous en avons avec le Président BOUTEFLIKA donné un témoignage et une illustration sur les deux ou trois sujets qui sont pour nous les plus préoccupants. Le premier sujet c’est de faire en sorte que ce qui se passe en Syrie puisse aboutir enfin à une transition politique, faire en sorte que nous puissions lutter contre la prolifération nucléaire. Mais surtout lutter contre le terrorisme dont l’Algérie a suffisamment souffert pour nous livrer sa douloureuse expérience. Et aujourd’hui, un terrorisme s’est installé au Mali, pas simplement qu’au Mali et avec une confusion, avec un trafic de drogue et le trafic d’armes.
A partir de là, nous avons voulu soutenir tous les efforts de la communauté internationale, mais aussi du Mali pour lutter contre ce terrorisme et préserver l’intégrité territoriale du Mali.
Nous sommes en convergence avec le Président BOUTEFLIKA. Lui et moi, nous pensons qu’il convient de faire du dialogue politique, de faire tout pour qu’une négociation puisse permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale, mais uniquement avec les mouvements ou les forces qui se séparent du terrorisme, voire luttent directement contre le terrorisme. Nous sommes pour que le gouvernement malien, le Président du Mali et l’armée du Mali travaillent pour permettre la réunification.
Enfin, la France est partie prenante de l’initiative qui va conduire le Conseil de sécurité à prendre une résolution qui ouvrira la possibilité aux Africains d’intervenir aux côtés des Maliens pour les aider à retrouver la stabilité et l’unité. Mais ce sont les Africains qui sont les seuls à pouvoir décider et à mettre en œuvre, même si la France, -je l’ai plusieurs fois affirmé-, aura à donner son appui logistique et de formation.
Et l’Algérie joue un rôle très important à la fois pour lutter contre le terrorisme mais aussi pour favoriser la négociation politique, inséparable, donc, de ce que nous avons à faire sur le plan sécuritaire.
Voilà mesdames et messieurs, ce que je voulais dire en propos liminaire.
Je suis venu avec une délégation importante composée à la fois de responsables politiques, non seulement ceux qui sont membres du gouvernement, mais aussi d’autres, dont histoire est liée à l’Algérie, ou qui ont des responsabilités en lien avec ce pays, notamment Jean-Pierre RAFFARIN qui était chargé, c’était déjà vrai avant même mon élection de la relation avec l’Algérie sur un certain nombre de points. Je suis venu avec une délégation aussi d’élus locaux qui ont des liens avec l’Algérie, des coopérations, des jumelages. Je suis venu avec des responsables économiques très importants, des chefs d’entreprises de grandes, mais aussi de petites entreprises. Elles sont conscientes qu’ici en Algérie, il y a des potentiels considérables, mais à condition d’être les meilleurs dans beaucoup de domaines, télécommunication, infrastructure, énergie, automobile je ne vais pas les citer tous et toutes. Mais nous ne demandons rien, nous ne demandons aucune faveur. Ce n’est parce que nous sommes dans une relation d’amitié que nous aurions des privilèges, il n’y a pas de privilèges. Nous voulons simplement être au service de l’économie algérienne de la même manière que nous espérons que les Algériens peuvent être au service de notre propre économie. Nous en avons besoin. Puis nous avons à mener des politiques ensemble sur la Méditerranée, autour de la Méditerranée.
Et puis cette délégation est aussi composée de personnalités culturelles, artistiques qui peuvent avoir des origines ici en Algérie ou qui aiment l’Algérie. C’est aussi un symbole de savoir qui m’accompagne. Il y a tant de personnes qui sont intéressées par ce qui se passe en Algérie. Par ce que nous pouvons construire ensemble France et Algérie, par ce nouvel âge. Il y a d’abord les Algériens eux-mêmes, il y a aussi beaucoup de Français qui ont, avec l’Algérie, une relation humaine, singulière, particulière, parfois douloureuse. Et c’est justement, parce qu’il y a cette relation exceptionnelle que nous devons faire un partenariat d’égal à égal.
Je suis prêt à répondre à vos questions.
QUESTION – Apparemment Monsieur le Président, les usines d’armement subissent la même crise que les autres sociétés économiques et industrielles ce qui engendre l’encouragement ou plutôt la création de foyers de tension. Comment pensez-vous établir des relations tournées vers l’avenir, comme ne cesse de le répéter ces jours-ci votre ministre des Affaires étrangères avec notre pays dont les frontières sont menacées, tout en sachant que l’implication de la France n’est pas à démontrer.
LE PRESIDENT – Nous avons à définir des relations pour l’avenir. Nous sommes là pour préparer l’avenir, mais l’avenir dépend d’abord du présent, des conditions de sécurité, de stabilité, de l’équilibre dans région ce dont vous parlez. Donc, nous avons à régler les sources de conflit qui existent quelques fois depuis très longtemps, parfois depuis moins longtemps. Nous avons à faire en sorte qu’il n’y ait pas de tension entre les pays du Maghreb. Nous savons aussi ce qui se passe, dans les printemps arabes. Tout cela fait que nous ne pouvons pas simplement discuter entre Français et Algérien. Nous avons à porter une politique, qui sur bien des points est commune. Parce que la France et l’Algérie sont deux pays qui, au-delà de leur propre histoire, ont une responsabilité pour la méditerranée. Ce qui permet de parler du sujet de l’union pour la méditerranée. Vous vous souvenez de l’initiative qui avait pu être prise. L’idée mérite d’être retenue, mais elle doit être repensée. Et la France et l’Algérie doivent en être par leur situation, par leur position, par leur conception commune si je puis dire des moteurs. Donc nous allons y travailler.
J’étais il y a quelques semaines à Malte, à ce que l’on appelle la rencontre « cinq + cinq » et nous avons beaucoup réfléchi sur la manière de rapprocher Europe et Maghreb, ce qui suppose que l’Europe soit unie et que le Maghreb le soit aussi. Nous savons que ce n’est pas si simple.
C’est cette responsabilité commune que nous voulons évoquer au cours de ce déplacement.
QUESTION – Monsieur le Président, est-ce que vous pensez que l’Algérie est imperméable aux printemps arabes qui se sont développés autour dans la région et deuxième question, sur la Syrie. Visiblement vous dites qu’il y a convergence entre vous et le Président BOUTEFLIKA, mais il y a quand même une différence d’approche très claire entre la position algérienne sur la Syrie et la position française. Est-ce que vous pouvez un peu développer cela ?
LE PRESIDENT – Le point d’accord, c’est sur la mission qui a été confiée par les Nations Unies à Monsieur BRAHIMI en qui nous avons grande confiance et qui doit chercher des solutions pour la transition politique. Là, nous nous retrouvons.
Ensuite, sur la coalition que nous, nous avons reconnue. Il y a une différence, et je la respecte, mais nous nous avons considéré qu’il fallait, dès lors que nous souhaitions une transition, qu’il y ait bien un interlocuteur légitime qui représente la Syrie demain, c’est le choix que nous avons fait.
Sur l’autre sujet, moi, je ne veux pas me mêler des affaires intérieures mais, ce que disent les Algériens c’est qu’ils l’ont déjà vécu il y a longtemps, le printemps arabe.
QUESTION – Une question sur un sujet que vous allez aborder demain sur un sujet très délicat, celui de la question mémorielle. Est-ce que des voix s’élèvent en Algérie pour réclamer une repentance de la France, pour réclamer des excuses de la France ? Est-ce que ce sera la teneur du message que vous délivrerez demain au Parlement algérien ?
LE PRESIDENT – Qu’il y ait des voix qui s’élèvent, il y en a partout, et en France et en Algérie, par forcément pour dire la même chose. Ce qui compte c’est ce qui nous est demandé, à la fois par les autorités algériennes, elles nous disent, nous vous faisons confiance, c’est à vous de trouver les formes et les mots et moi, j’ai toujours été clair sur cette question : vérité sur le passé, vérité sur la colonisation, vérité sur la guerre avec ces drames, avec ces tragédies, vérité sur les mémoires blessées. Mais en même temps volonté de faire que le passé ne nous empêche pas de faire le travail pour l’avenir. Le passé doit, dès lors qu’il est reconnu, nous permettre d’aller beaucoup plus vite, beaucoup plus loin pour préparer l’avenir, c’est ce que je dirai demain aux parlementaires algériens et au-delà aux Français et aux Algériens.
QUESTION – Vous aviez dit avant cette visite que vous évoqueriez tous les sujets. Avez-vous parlé avec les président BOUTEFLIKA des moines de Tibhirine, que vous a-t-il dit ?
LE PRESIDENT – Je lui en ai parlé, puisque j’ai dit que tous les sujets seraient évoqués et celui-là fait partie de la sensibilité qui est forte, compte tenu de la tragédie, et le président BOUTEFLIKA mais vous l’interrogerez, m’a dit qu’il avait donné toutes instructions autant qu’il est possible à la justice pour aller jusqu’au bout de l’enquête.
QUESTION – Donc, s’il faut dire, s’il faut reconnaître la vérité, est-ce que sur les moines de Tibhirine il faut aussi demander pour que le passé ne repasse pas, est-ce que l’on doit aussi faire la lumière sur cette question ? Oui, parce que les autorités rouvrent le dossier pour qu’il y ait une autopsie, je crois que vous avez reçu une lettre des parties civiles en ce sens. Mais avez-vous une réponse claire ?
LE PRESIDENT – Ma réponse, elle est on ne peut plus claire, c’est à la justice algérienne, avec la justice française de faire toute la lumière sur ce qui s’est produit.
QUESTION – La révision de la loi de janvier 2010, dite Loi Morin portant sur l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français est-elle envisageable, sachant que les conditions qu’elles posent pour indemniser les victimes sont extrêmement restrictives ? Par ailleurs, où en est le dossier ou la question de la détermination des sites contaminés dans le Sahara et aussi les opérations de décontamination de ces sites algériens ?
LE PRESIDENT – Sur ce point-là, les démarches sont engagées, elles se poursuivent et nous ferons là aussi la transparence, c’est le principe que j’ai posé, la transparence.
Quant à la loi de 2010 que vous avez évoquée à juste raison, qui prévoit une indemnisation des victimes des essais nucléaires, elle doit être appliquée pleinement. Et s’il apparaît qu’il y a des conditions qui ne permettent pas à des victimes de faire leurs droits, nous regarderons comment faire. Mais pour l’instant, je veux que cette loi soit pleinement appliquée, elle ne l’a sans doute pas été avec la détermination nécessaire.
QUESTION – Quand vous dites que les Algériens ont vécu il y a longtemps le printemps arabe, que voulez-vous dire par là ?
LE PRESIDENT – Vous avez vu quand même ce que ce pays a traversé comme épreuve, c’est-à-dire un terrorisme qui s’était installé, le nombre de victimes, après un processus de réconciliation, de reconstruction et de rénovation. Je pense que le Parlement algérien va bientôt être saisi de la dernière étape de la révision constitutionnelle. Voilà, il y a des étapes, il ne m’apparaît qu’il y ait eu en Algérie les mêmes évènements que dans d’autres pays, cela ne s’est pas passé de la même manière, chaque pays a sa spécificité, a pu connaître ses propres problèmes, ses propres difficultés, mais moi, je veux saluer le courage des Algériens dans ce qui s’est produit durant toutes ces années et la manière avec laquelle ils ont réussi à rester unis et par rapport au printemps arabe, nous sommes conscients que cela a été un formidable espoir et qui doit maintenant être pleinement traduit sur le plan démocratique partout.
QUESTION - Comment la France a-t-elle vendu la marque Orangina aux Japonais puisqu’il s’agit d’une propriété algérienne ?
LE PRESIDENT – Voilà une information dont je n’avais pas connaissance et dès que le gouvernement japonais va être constitué, je viendrais à sa rencontre pour essayer de faire ce que je peux « en secouant beaucoup ». Pour le reste, et là le sujet est un sujet pleinement français parce que moi, je ne considère pas que des pays étrangers doivent se préoccuper de la représentation de l’Islam de France. Mais qu’il y ait des Algériens qui vivent en France et qui doivent pratiquer leur culte dans de bonnes conditions, je parle du culte musulman, oui, et cela renvoie, et là votre question est parfaitement légitime et pertinente à la représentativité du CFCM. Le ministre de l’Intérieur y travaille pour que nous puissions avoir un CFCM qui soit unit, cohérent, légitime pleinement, respecté par tous et que nous puissions travailler, parce que nous avons besoin de cette représentation.
QUESTION – Vous avez plusieurs fois indiqué dans votre propos liminaire vouloir engager l’Algérie et la France dans un nouvel âge. Est-ce à dire que vous revendiquez une rupture avec les pratiques de vos prédécesseurs, Messieurs CHIRAC et SARKOZY ?
LE PRESIDENT – Il y a des âges, vous le savez bien, nous le savons tous qui ne sont plus les mêmes, après 50 ans, là je ne parle que pour moi. Il est nécessaire d’ouvrir un nouveau temps, une nouvelle phase, une nouvelle période. 50 ans après une nouvelle période, nous sommes capables de jeter un regard lucide sur le passé, de faire l’expérience de tout ce que nous avons pu réaliser ensemble, la France et l’Algérie, donc, tous mes prédécesseurs, et puis, d’ouvrir une nouvelle page et donc de travailler maintenant avec le souci d’aller plus vite, d’aller plus loin. Je pense que c’est cela qui est demandé. Il y a tellement de besoins, tellement de ressources, tellement de volonté d’agir ensemble que nous devons faire davantage que ce que nous avons fait jusqu’à présent et cela tient aux deux pays, parce que nous avons toujours attendu tellement l’un de l’autre que nous avons peut-être laissé passer un certain nombre d’opportunités. Donc, maintenant, il se trouve, 50 ans après, l’élection présidentielle française est arrivée à ce moment-là, que nous pouvons ouvrir la nouvelle étape, le nouvel âge de la relation entre la France et l’Algérie. Tout cela n’est qu’une continuité, c’est vrai, mais il se trouve que c’est l’époque qui a changé.
QUESTION – Monsieur le Président, vous allez vous recueillir sur la place Maurice AUDIN à Alger. Auriez-vous une réponse à la demande de sa veuve en rentrant sur Paris ?
LE PRESIDENT – D’abord, j’ai effectivement souhaité avoir ce temps de recueillement et ensuite, j’ai demandé au ministre de la Défense de recevoir la veuve AUDIN pour que toutes les informations dont nous pouvons disposer puissent lui être communiquées, dans la transparence.
QUESTION – Monsieur le Président, comme par enchantement, d’un côté comme de l’autre, on entend plus parler de l’accord de 68, y aurait-il eu un compromis ? Vous venez d’évoquer l’Union pour la méditerranée, vous savez très bien Monsieur le Président, que le préalable du côté arabe, c’est le règlement du conflit israélo-arabe et du côté algérien, c’est le règlement du problème du Sahara occidental. Y aurait-il du nouveau positif au niveau de l’Elysée après votre arrivée en tant que Président ?
LE PRESIDENT – Du positif, j’espère bien qu’il y en a, mais je ne vais pas ici en parler, transformant cette conférence de presse en moyen de communication pour l’opinion publique française. Mais je vais répondre précisément à vos deux questions. Il y avait un dossier qui traînait depuis plusieurs années, une révision de cet accord, on ne savait pas d’ailleurs dans quel sens le réviser, le réviser pour être plus restrictif, ce n’est pas la position de l’Algérie, le réviser pour être plus ouvert, ce n’est pas forcément la position de la France. Donc, nous nous sommes dit, c’est un bon accord en réalité, est-ce que l’on peut améliorer son exécution ? Oui, et c’est ce que les deux ministres de l’Intérieur ont convenu de faire : aller plus vite, être plus respectueux, traiter avec toute la diligence nécessaire sur le plan administratif dans les consulats les demandes de visas. Parce que je pense que le mot clé qui doit nous définir, nos deux peuples, c’est celui de la dignité, de la reconnaissance, et nous avons, je l’ai dit des mémoires, mais nous avons aussi des vies, nous avons des relations humaines et à chaque fois c’est le principe de dignité et de considération qui doit l’emporter. Ce sera l’esprit de l’application de l’accord de 1968.
Ensuite, vous m’avez dit l’Union pour la méditerranée, elle ne peut pas avancer parce qu’il y a des préalables qui ne sont pas levés. Vous avez raison, c’est la raison pour laquelle cela n’a pas marché, parce que ce n’est pas dans l’Union pour la méditerranée que nous allons trouver la réponse au conflit israélo-palestinien. Ce n’est pas non plus dans l’Union pour la méditerranée que nous allons nous mettre d’accord pour la question du Sahara occidental. Ces questions-là doivent être traitées dans un cadre qui est celui des Nations unies et de la négociation directe pour Israël et la Palestine. Alors, est-ce que c’est parce qu’il y a ces préalables que nous ne pouvons pas avancer ? Eh bien, nous allons prendre un autre cadre. L’Union pour la Méditerranée cela existe, mais nous allons prendre d’autres moyens. J’ai cité le dialogue 5+5, il y a le processus de Barcelone, donc, nous allons travailler ensemble la France et l’Algérie pour que la Méditerranée ne soit pas la grande oubliée. Si on regarde nos intérêts géostratégiques à l’Algérie et à la France. La France, elle est située comme vous le savez en Europe et elle regarde vers la Méditerranée, il y a d’autres pays qui n’ont pas la même position géographique, l’Allemagne qui regarde vers l’est, c’est bien légitime, donc nous, notre relation elle doit être bien sûre ancrée dans l’Europe, mais elle doit être portée par une ambition qui est celle de la Méditerranée. L’Algérie, elle aussi elle regarde des deux côtés, dans le Maghreb, en Afrique et en même temps elle regarde vers l’Europe du Sud, parfois en s’inquiétant, parce que l’Europe du Sud ne va pas forcément au mieux sur le plan économique, donc à nous de faire de cette Méditerranée une zone de paix, de sécurité, de lutter contre les trafics, trafics de drogue, cela c’est un point très important la lutte contre le trafic de drogue, et qui touche tous les pays autour de la Méditerranée et nous devons aussi en faire une zone de développement, de coproduction et de croissance, voilà ce que nous avons à faire sur ce sujet.
QUESTION – L’accord avec Renault a été annoncé à la veille de votre visite, est-ce qu’il y a eu des pressions politiques sur les négociateurs pour faire aboutir le projet ? Et deuxième question, vous invitez les algériens à venir investir en France, et s’il y a la création d’un fonds souverain algérien, est-ce qu’il serait possible à l’Algérie d’investir dans des industries en France à l’exemple de Peugeot qui connaît actuellement beaucoup de difficultés ?
LE PRESIDENT –Nous sommes actionnaires, l’Etat français, donc, nous avons été en tant qu’actionnaire consulté sur cette opération. Le ministre du redressement productif a été forcément, non seulement informé, mais aussi partie prenante. Mais il n’y a pas eu besoin de faire pression, parce que c’est un bon projet, un bon projet pour l’Algérie, un bon projet pour Renault et un bon projet pour la France. Je rappelle que ce sont des automobiles qui seront destinées au marché algérien, mais pas qu’au marché algérien, à d’autres marchés extérieurs, et que ce ne sera pas une délocalisation, ce n’est pas une usine qui part de France pour aller en Algérie et on aura même de l’emploi en France parce qu’une partie des approvisionnements viendront de France. Donc, c’est une opération où il n’y aura, cela a été dit ce matin je crois par d’autres, que des gagnants.
Ensuite, est-ce qu’un fonds souverain algérien peut venir en France investir. Tous les fonds sont les bienvenus en France pour investir. Et nous avons un fonds chinois, un fonds qatari et d’autres fonds qui se sont mis en place, mais je ne vais pas demander aux Algériens de constituer un fonds souverain pour le bénéfice de la France, c’est aux Algériens de décider s’ils veulent investir en France et s’ils voulaient investir dans une entreprise, ils pourraient le faire librement en fonction des règles en vigueur.
QUESTION – Pour revenir à cet accord de 68, le nouvel âge, cette nouvelle étape qui va s’ouvrir, on va avoir l’impression que ce sera plus facile de permettre la circulation des marchandises et des biens matériels que des hommes. Nous sommes en 2012, cet accord date de 68, est-ce qu’il ne serait pas temps d’y voir vraiment une étape, parce que la population algérienne a beaucoup changé, parce que le niveau d’éducation a beaucoup changé, et parce que beaucoup plus d’algériens ont des visas rapidement, y compris pour aller pour quelques jours en France ?
Deuxième question. Aujourd’hui, vous avez en France beaucoup de réussites individuelles franco-algériennes culturelle, économique, scientifique. Est-ce que ce réseau qui a réussi en France et en Algérie ne pourrait pas servir de nouvel axe dans ce nouvel âge justement ?
LE PRESIDENT – Comme vous avez raison, toutes ces réussites, je ne vais pas les citer toutes, mais vous en avez évoqué de nombreuses sans les personnaliser. Réussite franco-algérienne, c’est-à-dire d’Algériens venus en France parfois enfant devenu Français, pleinement Français, mais avec cette origine algérienne. C’est une chance formidable pour nos deux pays parce qu’il n’y a non pas une perte d’identité, il n’y a pas une confusion, il y a au contraire un enrichissement. Et comment nous pouvons essayer de nouer ces relations ? Par des investissements qui peuvent se faire par ces Français d’origine algérienne ici en Algérie, mais il y a aussi Algériens qui ont envie de donner le meilleur d’eux-mêmes en France. C’est toute la question des visas pour des voyages artistiques, pour des séjours culturels, pour de la coopération scientifique ou universitaire. Alors, est-ce que l’accord de 68 est un accord qui est très restrictif ? Oui il est restrictif puisqu’il vise à maîtriser, mais il est moins restrictif que d’autres accords, chacun le sait. Tout est question d’application, ce qui est insupportable c’est d’attendre très longtemps ou de ne pas pouvoir pour des brefs séjours avoir le visa qui permet juste de faire un spectacle, un film ou une recherche de stage, cela peut arriver
Donc, c’est cela qui sera appliqué avec discernement et avec, je l’ai dit, respect. Je crois que c’était mieux de ne pas changer l’accord. Si nous avions changé l’accord, il y aurait toutes les interprétations, c’est-à-dire ceux qui auraient dit vous voyez, on restreint encore davantage, ceux qui auraient dit au contraire on ouvre davantage nous inspirant de ce qui avait été décidé en 68. C’était une période où il n’y avait pas les problèmes de chômage d’aujourd’hui. Mais nous le faisons avec discernement et respect.
QUESTION – Pour revenir sur les questions de mémoire, vous avez parlé des signes, des mots, des gestes que la France est prête à faire, attendez-vous à l’inverse des signes ou quelque chose du côté algérien et en matière des droits de l’homme notamment, est-ce que vous attendez un signal ou une parole forte de la présidence algérienne ?
LE PRESIDENT – J’ai invité le Président BOUTEFLIKA à venir en France pour une visite d’Etat au moment où il lui paraîtra possible de le faire. A ce moment-là, il aura aussi à s’adresser à la France. Je suis ici en Algérie comme Président de la République, je m’adresse à l’Algérie, mais aussi à la France pour dire que je suis lucide sur le passé, je suis surtout désireux de faire avancer la France et l’Algérie, de donner une nouvelle impulsion, un nouveau souffle, un nouvel élan, ce que j’ai appelé un nouvel âge.
Sur les droits de l’homme, je recevrai un certain nombre de représentants de la société civile algérienne et j’aurai aussi des discussions avec la jeunesse algérienne et je serai au parlement algérien demain. Les choses seront dites. Il y a toujours des améliorations à faire. Mais, comprenez bien qu’aujourd’hui je ne viens pas faire la leçon, je viens dire tout ce que j’espère de la relation entre la France et l’Algérie et tout ce que nous pouvons faire ensemble.
Vous savez, il se trouve que les communications entre la France et l’Algérie, au-delà de l’échange humain sont tellement nombreuses. Je ne dis pas cela pour influencer les chaînes de télévision française, mais vous êtes très regardés en Algérie. La vie politique française est très connue en Algérie. Donc, il y a une espèce d’intimité qui est créée et donc la question de la démocratie, des droits, je pense à une question présente partout et en Algérie il n’y a pas de limites au droit de l’information. Il y a une presse libre, une presse indépendante, comme peu de pays les connaissent. Je veux la saluer parce que c’était aussi un combat pour cette presse de rester libre et indépendante pendant les périodes les plus éprouvantes de l’histoire algérienne.
QUESTION – Au sujet du Mali, vous avez parlé de convergence entre l’Algérie et la France, au-delà de ce langage diplomatique, est-ce que pourriez détailler ces convergences sachant que la France voudrait appuyer logistiquement une intervention et que l’Algérie refuse toute idée d’intervention au Mali.
LE PRESIDENT – Non, ce n’est pas vrai. L’Algérie est, et nous aussi, en faveur de la négociation politique et elle est pour la lutte contre le terrorisme. C’est ce qui nous unit. La lutte contre le terrorisme ne peut pas accepter qu’AQMI s’installe sur une partie du Mali et impose sa loi. La négociation politique est indispensable parce qu’il y a des groupes, on les appellera les touaregs ou avec d’autres noms correspondant à leur mouvement qui doivent être réinsérés dans un processus politique. Après, sur l’intervention elle-même, c’est le Conseil de sécurité qui va en décider, ce n’est pas que la France. C’est le Conseil de Sécurité des Nations unies et ce Conseil de sécurité va laisser les Africains, je dis bien les Africains eux-mêmes notamment la CEDEAO décider d’une intervention en soutien du gouvernement malien qui lui-même a la seule légitimité pour en décider. Voilà ce qui nous rassemble.
QUESTION – Concernant le nombre de chefs d’Etat, de chefs d’entreprises qui vous accompagnent….
LE PRESIDENT – De chef d’Etat, je suis le seul,
QUESTION – Concernant le nombre de chefs d’entreprises qui vous accompagnent, il y en a une quarantaine ? En 2007, lors de la dernière visite d’Etat de Monsieur SARKOZY, il y en avait une centaine, on voit que le nombre a été réduit. Alors est-ce que c’est le contexte de crise qui fait qu’aujourd’hui en 2012 la France perd du terrain en matière commerciale ? Puis, le deuxième point concernant la région, votre prédécesseur avait effectué une tournée maghrébine, Tunisie, Maroc, Algérie, là vous ne ciblez que l’Algérie. Pourquoi ?
LE PRESIDENT – Alors le nombre de chefs d’entreprise, je ne veux pas faire un concours ni même dire qu’il y aurait ici la qualité quand il y avait la quantité, puisque ce sont souvent les mêmes. Nous, ce qui nous a paru nécessaire, c’est que ces chefs d’entreprises d’abord, puissent être en relation avec d’autres chefs d’entreprises ici en Algérie. Il y aura demain un forum économique qui permettra justement cette relation, cette liaison et ce travail. Ensuite, cela correspond à des projets qui existent. Mais ce qui va compter, au-delà de cette visite, c’est la qualité de la relation entre la France et l’Algérie, la volonté de donner une suite, mais également la performance des entreprises françaises. Je l’ai dit tout à l’heure. Les entreprises françaises, elles ne demandent pas des droits, elles n’ont aucun droit, simplement le devoir d’être les meilleures dans les compétitions qui sont organisées et face à des besoins que nous connaissons ici en Algérie et qui sont importants.
Voilà pourquoi ils sont là et ce n’est pas pour des raisons d’économie budgétaire. J’aurai pu utiliser cet argument, mais je considérais que c’était la bonne dimension et surtout le bon esprit.
Sur l’autre question, pourquoi commencer par l’Algérie. Parce que je voulais commencer par l’Algérie. Pour le 50ème anniversaire de l’Indépendance, c’était un temps qui était là. Parce que je considère qu’avec l’Algérie, nous avons des choses à nous dire et surtout des choses à faire. Et enfin, parce que j’ai moi-même une relation avec l’Algérie, personnelle, et parce que je sais que c’est très important pour beaucoup de nos concitoyens français la relation avec l’Algérie. Et pour l’Algérie, finalement, une attente très forte à l’égard de la France. Pour autant, moi j’ai la volonté d’avoir de bonnes relations avec tous les pays du Maghreb du printemps arabe ou pas du printemps arabe. Tous les pays du Maghreb. J’irai donc au Maroc au début de l’année prochaine et également en Tunisie, parce que je veux avoir les meilleures relations possibles avec l’ensemble des pays du Maghreb.
QUESTION – Monsieur le Président, le traité d’amitié entre l’Algérie et la France a été abandonné par Paris depuis longtemps. Aujourd’hui, vous avez lancé qu’un pacte d’amitié et de coopération sera signé entre l’Algérie et la France. Est-ce qu’on peut savoir si ce document est une continuation pour le traité 2003 qui n’a jamais été signé. Et pourquoi vous dites aujourd’hui que ce nouvel âge n’est pas une rupture avec la France de SARKOZY, de CHIRAC… Est-ce qu’on peut savoir aussi si la question de la mémoire sera posée dans ce traité ?
Monsieur le Président, le placard franco algérien pullule de dossiers très sensibles et intéressants, la question de la mémoire, la circulation des personnes, la crise au nord du Mali, le Sahara occidental, le business, avec quel ordre classez-vous ces dossiers Monsieur le Président ?
Vous êtes le troisième chef de l’Etat français a effectué une visite d’Etat en Algérie. A chaque fois, ces visites ont été porteuses d’espoir, à chaque fois ces espoirs ont été déçus, notamment beaucoup pour les Algériens. Est-ce qu’un Président de gauche fera mieux que ces prédécesseurs de droite ?
Il y a en France des personnalités qui ont un lien très forts avec l’Algérie ? Je pense par exemple à Enrico MACIAS, est-ce que vous espérez qu’un jour Enrico MACIAS pourra revenir en Algérie, est-ce que vous avez parlé de cela éventuellement avec le Président algérien ?
Le gouvernement français affiche une volonté d’accompagner des entreprises françaises désirant investir en Algérie. Cela ne rentrera-t-il pas en contradiction avec un souci de limiter les délocalisations ?
Monsieur le Président j’ai une question qui paraît plus ou moins explicite, est-ce que vous allez reconnaître au nom de la France les crimes commis durant la période coloniale et est-ce qu’on ira vers la repentance ou demander des excuses ?
LE PRESIDENT – Alors, je vais éviter les répétitions. Première question, elle est importante, le traité d’amitié avait été évoqué en 2003 et en réalité, il n’a jamais été signé, encore moins ratifié. Et cela a été une source de malentendus. Je parle du passé et plutôt que de chercher un traité d’amitié avec toutes les questions qui auraient été nécessairement posées et qui n’auraient peut-être pas été réglées puisque cela n’a pas été finalement concluant, nous avons préféré une autre méthode beaucoup plus simple, beaucoup plus forte, beaucoup plus efficace qui est une déclaration d’amitié, de coopération et un document cadre de partenariat. Ce qui nous est apparu plus fort ce n’est pas de nommer les mots, c’est de nommer les actions. L’amitié cela se démontre, cela se prouve et les paroles qui doivent être prononcées, elles ne sont pas dans un traité, elles sont dans les discours que je peux faire.
Donc, la méthode a changé. Vous m’interrogez sur la continuité, là, il y a un changement de méthode, un changement de moment et un changement de contenu. Changement de méthode, une déclaration un document cadre. Changement de moment, nous sommes 50 ans après, un nouvel âge commence. Et un changement de contenu, parce que nous allons signer un nombre d’accords dans tous les domaines aussi bien l’économie, la production que le domaine culturel, scientifique et même sur le plan de la langue nous commençons à retravailler sur le français.
Ensuite, le placard, moi je ne suis pas là pour ouvrir les placards, je suis là pour que nous construisions une nouvelle maison ensemble, c’est-à-dire que nous puissions travailler avec l’espoir de bâtir et pas simplement de faire que nous ne puissions pas avancer parce qu’il y aurait trop de sujets. Vous me demandez quel est le sujet le plus important, c’est l’avenir. Ce déplacement il est fondé sur l’avenir. Ensuite sur le passé, vérité ai-je dit, reconnaissance de ce qu’a été un système, le système colonial, j’aurai à m’exprimer, mais je ne viens pas ici, ce n’est ni ce qui m’est demandé, ni ce que je veux faire, faire repentance ou excuse. Je viens dire ce qu’est la vérité, ce qu’est l’histoire.
Ensuite, sur Enrico MACIAS, je ne peux pas vous répondre précisément. Je pense qu’il peut être invité par les autorités algériennes. Je ne sais pas quel est son souhait, mais je n’ai pas de réponse à votre question.
Sur les débats qui resurgissent régulièrement et qui ont été cités. Je pense que s’il y a un sens à donner à la qualité de l’accueil que j’ai reçu, c’est que nous sommes conscients de ce que nous avons à faire, à porter ensemble.
La gauche, puisque c’est la question qui est posée, elle est aussi dans l’histoire, elle a aussi sa part dans l’histoire. La vérité elle vaut aussi pour ce qu’a été la gauche dans l’histoire. Mais il se trouve qu’il y a eu beaucoup d’espoirs déçus, peut-être de part et d’autre d’ailleurs, de visites qui avaient été annoncées, qui devaient se traduire. Je veux être respectueux. Ce n’est pas une visite qui fait une relation, c’est un travail constant, une méthode qui doit être éprouvée par le temps et c’est une volonté.
Donc, un voyage, je ne sais pas si celui-là sera jugé comme réussi, je l’espère. Pour moi, le premier jour en témoigne. Mais un voyage doit ouvrir une période. Cela ne peut pas résumer une relation. C’est ensuite que nous devons donner toutes les preuves de cette réussite.
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Allocution devant les deux chambres réunies du Parlement algérien
Monsieur le Président du Conseil de la Nation,
Monsieur le Président de l’Assemblée populaire nationale,
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Parlementaires.
Vous me faites grand honneur en me recevant ici, en m’accueillant, comme le peuple algérien l’a fait hier. Je mesure l’importance de l’événement, mais aussi la grandeur de l’enjeu ouvrir un nouvel âge dans la relation entre la France et l’Algérie. Ma visite vient dans un moment chargé de sens et de symboles, il y a cinquante ans, l’Algérie accédait à l’indépendance, elle s’arrachait à la France, après une guerre longue de huit ans.
Elle devenait la République algérienne libre et souveraine. Elle conquérait ce droit, ce droit inaliénable, ce droit de pouvoir disposer pour un peuple de lui-même. Cinquante ans, c’est court à l’échelle de l’histoire, et pourtant, quel chemin a été parcouru par l’Algérie depuis 1962. L’Algérie est aujourd’hui un pays respecté sur la scène internationale, qui compte, qui pèse, l’Algérie est un pays dynamique, dont les ressources sont considérables, dont l’économie est en développement, et je mesure ces étapes chaque fois que je viens en Algérie, depuis 1978, lorsque jeune fonctionnaire français, j’étais pour huit mois à l’ambassade de France à Alger.
L’Algérie est un pays jeune, dont la moitié de la population a moins de 26 ans, et donc plein de promesses, l’Algérie est un pays courageux, il l’a prouvé dans son histoire, il l’a prouvé encore plus récemment face à l’épreuve terroriste qu’il a traversée – ce pays – avec dignité et unité. A cette Algérie, fière de son passé, consciente de ses forces, la France, à travers moi, adresse des vœux de prospérité et de réussite.
Mais la question qui est posée à nos deux pays, l’Algérie et la France, elle est simple, elle est grave : sommes-nous capables d’écrire ensemble une nouvelle page de notre histoire ? Je le crois. Je le souhaite. Je le veux. Nous ne partons pas d’ailleurs de rien, puisque nous pouvons nous appuyer sur les liens humains que vous avez rappelés, Monsieur le Président, linguistiques, je parle une langue, le français, que vous connaissez et que vous parlez, des liens économiques, qui unissent aussi nos deux pays.
Mais cette amitié, pour vivre, pour se développer, elle doit s’appuyer sur un socle, ce socle, c’est la vérité. Cette vérité, nous la devons à tous ceux qui par leur histoire, par leur histoire douloureuse, blessés, veulent ouvrir une nouvelle page. Nous la devons à la jeunesse, à toutes les jeunesses, qui veulent avoir foi en leur avenir, et donc qui veulent savoir d’où elles viennent. Rien ne se construit dans la dissimulation, dans l’oubli, et encore moins dans le déni. La vérité, elle n’abîme pas, elle répare, la vérité, elle ne divise pas, elle rassemble.
Alors, l’histoire, même quand elle est tragique, même quand elle est douloureuse pour nos deux pays, elle doit être dite. Et la vérité je vais la dire ici, devant vous. Pendant 132 ans, l’Algérie a été soumise à un système profondément injuste et brutal, ce système a un nom, c’est la colonisation, et je reconnais ici les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien. Parmi ces souffrances, il y a eu les massacres de Sétif, de Guelma, de Kherrata, qui, je sais, demeurent ancrés dans la conscience des Algériens, mais aussi des Français. Parce qu’à Sétif, le 8 mai 1945, le jour même où le monde triomphait de la barbarie, la France manquait à ses valeurs universelles.
La vérité, elle doit être dite aussi sur les circonstances dans lesquelles l’Algérie s’est délivrée du système colonial, sur cette guerre qui, longtemps, n’a pas dit son nom en France, la guerre d’Algérie. Voilà, nous avons le respect de la mémoire, de toutes les mémoires. Nous avons ce devoir de vérité sur la violence, sur les injustices, sur les massacres, sur la torture. Connaître, établir la vérité, c’est une obligation, et elle lie les Algériens et les Français. Et c’est pourquoi il est nécessaire que les historiens aient accès aux archives, et qu’une coopération dans ce domaine puisse être engagée, poursuivie, et que progressivement, cette vérité puisse être connue de tous.
La paix des mémoires, à laquelle j’aspire, repose sur la connaissance et la divulgation de l’histoire. Mais la nôtre est aussi une histoire humaine, car au-delà des blessures, au-delà des deuils, demeure la relation exceptionnelle nouée entre les Français et les Algériens ; les Français d’Algérie, instituteurs, médecins, architectes, professeurs, artistes, commerçants, agriculteurs qui, avec le peuple algérien, avaient su nouer, dans des conditions difficiles, intolérables parfois, des relations tellement humaines.
Je me rendrai à Tlemcen, la ville de Messali HADJ, l’un des fondateurs du nationalisme algérien, qui évoque lui-même, dans ses mémoires, les Français d’Algérie, en rappelant l’amitié et la confiance, en évoquant ses relations simples, quotidiennes, naturelles dont le souvenir nous appartient. Je n’oublie pas non plus tous ces coopérants qui étaient venus après l’indépendance de l’Algérie, à la fois par conviction, et par souci de promotion du savoir et de la connaissance, et qui voulaient rendre service à la République, la jeune République algérienne.
Notre histoire, cette histoire, c’est aussi celle de grandes consciences françaises, qui ont su s’élever contre l’injustice de l’ordre colonial, Georges CLEMENCEAU, dès 1885, trouvât les mots pour dénoncer l’abus pur et simple de la force pour s’approprier l’homme et ses richesses. André MANDOUZE, moins connu, et pourtant, tellement militant, qui, toute sa vie, fut fidèle à ses valeurs dans la résistance, mais également dans la conscience de l’indépendance algérienne. Germaine TILLION, qui fut la militante inlassable du dialogue entre les hommes et les femmes, entre les peuples, l’écrivain François MAURIAC, qui sut rappeler dans les moments difficiles la véritable grandeur d’un peuple qui ne repose pas sur sa force brutale, mais sur la puissance de son message universel.
Et puis, notre histoire, l’histoire de la France, c’est aussi Alger, qui fut la capitale dans les moments les plus sombres de la France libre, parce que c’est ici que s’était réfugié l’honneur de la France, à Alger, avec le Général De GAULLE à sa tête.
Voilà tout ce qui nous rassemble, nous réunit et nous permet après avoir regardé l’histoire, le passé, de pouvoir construire l’avenir. Je n’ai pas d’autres mots que ceux qu’employaient le président BOUTEFLIKA le 8 mai dernier à Sétif, qui appelait à une lecture objective de l’histoire loin des guerres de mémoires et des enjeux conjoncturels afin d’aider les deux parties à transcender les séquelles du passé et d’aller vers un avenir où puisse régner confiance, compréhension, respect mutuel, partenariat. Eh bien ces mots-là sont les miens encore aujourd'hui.
La proximité entre l’Algérie et la France n’est pas une incantation prononcée à chaque voyage d’un président de la République française en Algérie, la proximité dont je parle n’est pas une abstraction, n’est pas une construction elle est une réalité. Elle se fonde sur des liens intimes, profonds, uniques pour la France comme pour l’Algérie. Sur 900.000 Algériens qui résident à l’étrangers, 700.000 vivent en France et je ne peux pas compter tous ces Algériens venus à travers plusieurs générations donne leur force de travail pour permettre à la France d’être ce qu’elle est aujourd'hui.
Je pense aussi à ces jeunes Français nés de parents algériens qui sont pleinement Français, qui doivent être regardés toujours comme tels et qui en même temps sont en famille ici, chez vous en Algérie. Ces jeunes Français se sont engagés dans tous les domaines de l’économie, de la culture, du cinéma, de la littérature, du théâtre, du sport et même de la politique. Et nous avons attendu d’ailleurs trop longtemps ce moment, enfin les assemblées parlementaires françaises comptes désormais des élus d’origine algérienne.
Il y a aussi tous ces Français nés en Algérie et qui sont partis dans les conditions que chacun connait et avec le déchirement dont ils ne se sont pas remis mais qui portent toujours je vous l’assure, l’Algérie dans leur cœur. Je ne vais pas faire de comptabilité mais il y a des millions de mes concitoyens en France qui ont vis-à-vis de l’Algérie un fonds commun de références, de passion, d’émotions et qui loin d’affaiblir la France, renforce encore cette passion d’être ce qu’elle est aujourd'hui.
Voilà pourquoi nous sommes liés les uns aux autres mais la géographie aussi nous rapproche, la mer Méditerranée ne nous sépare pas elle nous unit mais elle nous confère aussi des responsabilités communes et exceptionnelles.
La Méditerranée c’est un espace politique, économique, diplomatique et nous avons le devoir de développer des projets qui bénéficient directement aux populations des deux rives. Je souhaite et je le dis devant vous, représentants du peuple algérien, je souhaite que la France et l’Algérie travaillent ensemble pour le projet méditerranéen.
De même que la France et l’Allemagne avaient été capables après une guerre tragique qui les avait opposé d’être les moteurs de la construction européenne eh bien l’Algérie et la France peuvent construire aussi l’union, l’unité méditerranéenne de demain.
Mais là aussi, non pas pour porter des projets chimériques mais des réalisations dans tous les domaines de l’énergie, des transports, de l’éducation, de la connaissance et du développement. Je parle d’éducation, de connaissance, de savoir, de recherche. La langue peut également nous servir de lien. L’Algérie chérit la langue arabe mais elle a su aussi se nourrir du français, se l’approprier comme un butin de guerre mais surtout, comme un instrument de connaissance, de diversité, de liberté.
Tant d’écrivains algériens ont apporté à la langue française leur génie, Kateb YACINE, Mohammed DIB, hier, Assiad DJEBAR, Anouar BENMALEK, Yasmina KHADRA, aujourd'hui et c’est Albert CAMUS, ce fils d’Alger dont nous célébrons l’an prochain l’anniversaire, le centième anniversaire de la naissance, qui a évoqué le premier cette communauté franco-arabe formée par tous les écrivains algériens dans l’égalité la plus parfaite. Merci à l’Algérie de donner aussi à la langue française sa diversité.
C’est fort de ces liens là, de cette responsabilité là qu’aujourd’hui à l’occasion de ma visite ici en Algérie, nos deux pays peuvent ouvrir une nouvelle page, un nouvel âge, à travers un partenariat stratégique d’égal à égal.
C’est ce que nous venons d’établir avec le président BOUTEFLIKA, une déclaration d’amitié ici à Alger et également un document qui scellera notre relation dans tant de domaines pour ce partenariat. Cinq ans, cinq ans d’actions communes si nous le voulons, si nous en décidons pour relever trois défis qui nous sont communs.
Le premier est économique, la France et l’Algérie doivent passer à la vitesse supérieure, doivent multiplier les échanges, les investissements, les réalisations communes. Oh nous connaissons les blocages, vous ici en Algérie, nous en France, nous savons les méfiances, les réticences mais nous savons aussi ce que nous pouvons faire ensemble.
Alors, faisons-le, dans le cadre de la transition énergétique, dans le cadre du partage des technologies, dans le cadre de la transition énergétique, dans le cadre du partage des technologies, dans le cadre de la formation des hommes et des femmes.
Nous pouvons partager nos savoir-faire, nos expériences, nos ressources, nous avons inventé parce que nous sommes la France, parce que vous êtes l’Algérie. Nous avons inventé de nouveaux modes de développement dans tous les domaines industriels, agricoles, et c’est pourquoi nous avons signé de nombreux accords de coopération ensemble à l’occasion de cette visite.
Je ne viens pas ici pour faire du commerce, je viens ici devant vous pour marquer un temps nouveau et en même temps 450 entreprises françaises, de grands groupes mais aussi des PME emploient directement 40.000 personnes, même 100.000 avec les emplois indirects en Algérie, nous pouvons faire davantage.
La France est le premier investisseur sur le territoire algérien, je m’en félicite mais nous pouvons faire encore mieux, elle est aussi son premier fournisseur, son troisième client, nous pouvons relever encore le niveau de nos échanges ; nous devons être prêts à aller plus loin et dans la délégation qui m’accompagne il y a toutes sortes de personnalités économiques, culturelles, scientifiques, artistiques, mais je veux que l’économie soit également au cœur de notre relation.
Hier RENAULT a signé un important accord en vue de produire dans votre pays une voiture destinée au marché local mais aussi régional, et j’allais dire même aussi international. Ce n’est pas une délocalisation, aucune entreprise française n’est venue s’installer au détriment de l’emploi français, c’est une entreprise RENAULT qui vient construire des véhicules pour qu’il y ait plus d’emplois en Algérie et plus d’emplois en France.
Voilà un bel accord que nous avons été capables de conclure sur le plan économique et il s’intégrera dans une déclaration de partenariat productif qui marquera cette idée de coproduction entre nos deux pays.
Le deuxième défi que nous avons à relever, en Algérie comme en France, c’est celui de la jeunesse, la formation, l’éducation, c’est une grande ambition de l’Algérie depuis l’indépendance, la formation, l’éducation c’est le grand message, c’est le rêve français depuis sa propre révolution.
Parce que nous avons tous conscience que la jeunesse n’est pas simplement un atout, une vitalité, c’est aussi une ressource que nous devons accompagner, encadrer, valoriser. Et dans tous les accords que nous avons passés entre l’Algérie et la France au cours de cette visite, ce sont des accords de formation et j’en ferai la démonstration à travers ce que nous allons faire pour des réseaux d’institut d’enseignement supérieur de technologie.
Quatre centres vont être crées qui, ensuite, serviront de référence pour être généralisés sur le territoire algérien, si vous en décidez. Ils aideront les jeunes à acquérir, dans un cycle court, les connaissances, les compétences qu’attendent les entreprises et permettront plus facilement de leur trouver du travail.
Notre partenariat, celui dont je parle, notre déclaration d’amitié doit s’adresser d’abord aux jeunes pour répondre concrètement à leurs attentes. Je pense aussi aux universitaires, à ces vingt-cinq mille Algériens qui étudient en France mais aussi à tous ceux qui s’intéressent en France à l’Algérie et qui veulent, là encore, nouer des relations à un niveau d’excellence, mais je veux que l’on accueille mieux et davantage les étudiants algériens.
C'est pourquoi je propose que puisse se construire une maison de l’Algérie à la cité internationale universitaire de Paris pour accueillir ces étudiants.
Nous pourrions nous dire qu’au niveau de la Méditerranée, nous pourrions faire ce qui a été réalisé au niveau de l’Europe, ces programmes d’échange universitaire, ce qu’on appelle ERASMUS. On trouvera un autre nom, d’un autre philosophe pour la Méditerranée mais c’est le même projet : permettre les échanges, la circulation.
J’ai parlé de circulation des personnes ; c’est le troisième défi que nous avons à régler. Près de deux cent mille Algériens reçoivent chaque année un visa dans nos consulats. Cette politique est indispensable, je la rappelle ici.
Nous devons, pour l’intérêt de l’Algérie et pour celui de la France, maîtriser les flux migratoires. Les jeunes que vous formez doivent trouver du travail ici, espérer faire leur vie ici, mais en même temps ils ont besoin aussi de circuler. Alors, nous ne devons pas faire de la demande d’un visa un parcours d’obstacle ou, pire encore, une humiliation. Au contraire ! Nous avons besoin que se poursuivent et même s’amplifient les allers-retours des étudiants, des entrepreneurs, des artistes, des familles. Bref, tout ce qui anime la relation entre la France et l’Algérie. Nous allons rester dans l’accord de 1968, mais nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour accueillir mieux les demandeurs de visa et pour que les documents soient délivrés plus vite par nos consulats. C'est une affaire de respect et d’intérêt mutuel. Dans le même temps, nous attendons de l’Algérie qu’elle ouvre plus largement ses portes aux Français qui souhaitent se rendre sur votre territoire, parce qu’ils y ont des souvenirs, des attaches familiales, affectives ou des projets professionnels ou personnels à réaliser.
Enfin, le dernier défi que nous avons à relever, il est pour la paix et la sécurité dans le monde.
Nous portons les mêmes principes au plan international : l’indépendance, la souveraineté, le respect des peuples.
Nous connaissons les mêmes menaces : le terrorisme, et vous, vous savez ce qu’est le terrorisme. Nous avons aussi les mêmes valeurs d’émancipation ; nous avons le même besoin de vivre dans un environnement de paix et de stabilité. Or, chacun le voit, le monde est en plein changements. Parfois ils vont dans le bon sens, parfois dans le pire. Mais il y a eu ces peuples qui se sont soulevés contre la dictature, des révolutions ont apporté l’espoir mais aussi, reconnaissons-le, soulevé des inquiétudes.
Chaque pays doit trouver sa propre voie et vous l’avez montrée. Il ne peut pas y avoir de réponse unique aux aspirations des citoyens, mais la leçon de ce qu’on a appelé le printemps arabe c’est que de toute manière, et partout dans le monde, les peuples entendent prendre en main leur destin.
Alors, le rôle de la France, celui de l’Algérie, c’est de les accompagner dans la voie de l’ouverture, de la démocratie, de la liberté. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne se discute pas, ne se marchande pas. Il en est ainsi du droit du peuple palestinien et, aux Nations Unies, l’Algérie et la France ont voté ensemble la résolution qui confère à la Palestine le statut d’État non-membre observateur.
Mais nous ne pouvons pas en rester là. Nous voyons les risques aussi d’un blocage, d’une fermeture, d’une violence.
Notre devoir, c’est de favoriser la négociation permettant la reconnaissance des deux Etats qui pourraient vivre en pleine sécurité, sûreté, respect, tout simplement en paix.
Enfin, il y a la crise du Sahel. Elle nous oblige aussi, et là-dessus je me félicite de voir que la Franceet l’Algérie partagent des principes communs. Nous devons affronter cette crise, mais nous devons laisser les Africains décider souverainement des opérations de soutien pour permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale.
Nous avons deux volontés qui ne se discutent pas. La première, c’est de favoriser la négociation politique, le dialogue pour que toutes les parties prenantes qui respectent l’unité du Mali, qui n’acceptent pas le terrorisme, puissent se retrouver ensemble avec des voix permettant aussi une certaine reconnaissance de la spécificité du nord-Mali.
Mais en même temps que nous poursuivons cet effort de négociation politique, nous devons montrer une détermination. Non pas la France, qui n’est plus dans ces interventions d’hier, mais la communauté internationale. Parce que si le conseil de sécurité en décide, et il en décidera, alors ce seront les Africains eux-mêmes qui voudront ou ne voudront pas – et je sais qu’ils le veulent – engager une opération pour l’intégrité du territoire malien.
Et je fais confiance à l’Algérie pour mener à sa place toutes les négociations, discussions politiques en plein accord avec la France.
Voilà tout ce que nous avons à faire, voilà ce qui nous rapproche, voilà ce qui nous unit, voilà ce qui peut pour de longues années – je n’ose pas dire cinquante ans – mais nous pouvons aussi penser que ce que nous pensons vaut bien plus que pour cinq ans. Parce qu’ici, ce n’est plus une question de personnes : c’est la France, c’est l’Algérie. Une déclaration d’amitié, je le disais, a été signée. C’est bien une déclaration, mais l’amitié ça se prouve. C’est un beau sentiment.
Elle se fonde sur trois exigences, celles que j’ai rappelées devant vous. La reconnaissance du passé dans le respect des mémoires, de toutes les mémoires. La seconde exigence, c’est la solidarité entre nos deux nations qui partagent tant de destins communs. Et enfin la troisième exigence, c’est de lever l’espérance. L’espérance pour la jeunesse, la jeunesse de l’Algérie, la jeunesse de la France, celle qui va demain décider du sort de nos deux nations.
C’est pour elle que nous formons cette déclaration d’amitié. C’est pour elle que nous engageons ce partenariat exceptionnel d’égal à égal. C’est pour elle, cette jeunesse de France, cette jeunesse d’Algérie, que je suis venu ici, en visite comme chef de l’État, comme président de la République, pour vous dire combien je crois à l’amitié entre la France et l’Algérie.
Merci.
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Discours de M. le Président de la République à l'université de Tlemcen
Monsieur le Président de la République, avec lequel j’ai descendu les avenues de Tlemcen, main dans la main, avec le sentiment de faire l’histoire à notre tour,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le recteur, qui me fait grand honneur aujourd'hui, non seulement en me remettant au nom de l’université de Tlemcen le titre de docteur honoris causa mais en plus en m’offrant tant d’ouvrages, tant de lectures, que je me demande encore comment je vais pouvoir trouver le temps de parcourir les livres, pourtant essentiels de l’histoire universelle.
Je vous fais une promesse: la nuit, je lirai ces œuvres, non pour trouver pour le sommeil comme certains pourraient l’imaginer mais pour rester éveillé par rapport à la contribution de ces auteurs à la science et à la philosophie. Je suis particulièrement sensible à l’accueil qui m’est réservé à Tlemcen aujourd'hui. Une ville si chère au Président Bouteflika, une ville multiséculaire dont les racines plongent au plus profond de l’histoire de l’Algérie.
Tlemcen fut en effet la capitale pendant trois siècles de la dynastie zianide, qui a profondément marqué le destin algérien, et dont la mosquée d’Alger demeure le plus beau des symboles.
Tlemcen, ville de culture qui a été l’an dernier capitale même de la culture islamique. Je sais l’importance que l’Algérie a attaché à cet événement, auquel elle a associé de nombreux partenaires, dont la France parce que c’était la place de la France, parce que mon pays reconnait le rôle éminent qu’occupe les cultures d’Islam dans le patrimoine commun de l’humanité.
J’ai eu à inaugurer, ce fut une fierté, comme Président de la République, le département des arts islamiques au Louvre qui porte témoignage de la richesse, de l’universalité de ces cultures, de leur diversité. Elles n’ont rien à voir avec le fanatisme dont l’Algérie a souffert pendant des années douloureuses. Je suis convaincu que les meilleures armes pour lutter contre ces dérives se trouvent à l’intérieur-même de l’islam.
Tlemcen illustre cette vocation universelle car cette ville s’est tournée dès le Moyen-Age vers l’Espagne chrétienne. Elle a aussi compté sur la communauté juive qui a ici tant apporté aux sciences, à la musique et aux traditions religieuses comme le pèlerinage au tombeau du rabbin Enkaoua, l’illustre si bien.
Tlemcen témoigne de l’existence d’une fraternité méditerranéenne dont notre rôle est de rappeler à chaque fois l’utilité et le sens.
L’université de Tlemcen, votre université, je salue ici les professeurs et tous ceux qui se consacrent à la diffusion de la connaissance et du savoir, l’université de Tlemcen est le symbole de cette expression universelle qui fait que nous pouvons tous contribuer aux échanges, à l’information et à la diffusion de l’excellence. Cette université est placée sous le patronage glorieux de Sidi Boumedienne, ce maître du soufisme médiéval. On l’appelait le professeur des professeurs et il fut lui-même un lien entre les peuples de la Méditerranée. Il était né à Séville. Il alla étudier dans l’Atlas avant de poursuivre son itinéraire en Arabie pour ensuite connaître la belle ville de Béjaïa et pour s’établir enfin, finalement après avoir tant voyagé, dans la ville des villes, c'est-à-dire Tlemcen. Il incarne lui-même l’islam des lumières.
Mais votre université est aussi le lieu où s’enseignent, au plus haut niveau, toutes les disciplines scientifiques, économiques, technologiques, qui font la force de l’Algérie d’aujourd’hui.
C’est donc pour moi un honneur, que de recevoir le titre de docteur honoris causa de votre université. Compte-tenu de la fonction qui est la mienne aujourd'hui en me remettant cette distinction, en me faisant docteur, c’est la France que vous honorez.
C’est un signe, un de plus, des liens qui vous unissent à la France, notamment à travers la communauté universitaire. Tlemcen est liée à l’université de Montpellier, rien que de plus normal, puisque Tlemcen a avec Montpellier une relation toute particulière, un jumelage. Mais Tlemcen est également comme université liée à l’université d’Evry, c’est le sens de la présence de Manuel Valls, ministre de l’Intérieur, il n’y en a pas d’autre! Mais après, je vais faire le tour de France car vous êtes aussi en relation avec l’université de Bordeaux, de Lyon, de Grenoble, de Valenciennes, et même de Nantes – je crois Monsieur le recteur est particulièrement attaché à cette ville et il n’est pas le seul.
Ce titre m’oblige au sens où je veux comme Président de la République française intensifier les relations scientifiques, culturelles, humaines entre les universités, autour notamment de la langue française car ici vous avez fait le choix d’enseigner du français. Vous participez au projet d’école doctorale de Français avec de plus de 50 magistères, 7 doctorats soutenus entre 2004 et 2008.
La francophonie, la langue française n’est pas un enjeu pour mon pays seulement. La langue française n’appartient pas à la France, elle appartient au monde tout entier. Nous la donnons, au sens où nous faisons en sorte que la langue puisse être pratiquée par tous. C'est une volonté, ce qu’on appelle la francophonie, volonté de pluralisme, volonté de diversité, volonté aussi de liberté. Car la langue porte aussi des valeurs.
Au-delà de cette de cette université, c’est pour faire rayonner la culture et la connaissance. Je veux saluer tout l’effort de formation qui est engagé en Algérie depuis l’indépendance, ce choix que vous avez fait de donner priorité à l’école. Sans doute est-ce aussi ce que vous aviez retenu de la France, de ce qu’elle a de meilleur, de ce qu’elle avait également porté au lendemain de sa propre révolution, celle de 1789, autour du projet de Condorcet pour permettre l’accès de tous à la connaissance et au savoir. Faire de l’école un projet de société, donner de l’égalité mais aussi de l’émancipation, de la liberté, de la fierté. Et encore aujourd’hui, je fais de l’école et de l’éducation la priorité de mon gouvernement et c’est pourquoi je veux m’adresser comme je l’ai fait, il y a encore quelques mois, pour la France, je veux m’adresser aux jeunes algériens.
La jeunesse est la richesse de votre pays. Près de 70% des Algériens ont moins de 35 ans. L’Algérie compte 1 300 000 étudiants, c’est considérable et bientôt 2 millions en 2015. C’est un immense atout, à la condition que cette formation débouche sur, non seulement des diplômes, non seulement des qualifications, mais des emplois. C’est là l’enjeu.
Vous avez, jeunesse algérienne, eu une enfance douloureuse parce que vous avez vécu dans des années de trouble. Vous avez dû faire face à de redoutables épreuves. Vous avez parfois grandi dans la peur. Mais aujourd’hui, à l’image de l’Algérie, vous êtes sortis victorieux de ce combat.
Vos parents se sont réconciliés et le mérite en revient au Président Bouteflika.
Mais se rassembler, se réunir ne suffit pas. Ce qu’il faut c’est porter un projet, c’est bâtir l’avenir. Alors comme toutes les jeunesses de la Méditerranée, vous sentez se lever des possibilités nouvelles, des occasions à saisir, des espoirs, des exigences de liberté, de dignité, de démocratie. Mais, en même temps, votre génération doute car elle est confrontée, comme partout, au chômage, à la précarité, à l’incertitude quant à l’avenir. Et parfois cette inquiétude conduit certains à vouloir quitter leur propre pays, malgré l’amour qu’ils lui portent et à regarder vers l’Europe, vers la France.
Nous nous sommes prêts à recevoir, bien sûr, des étudiants qui viennent se former, mais l’avenir des Algériens il est en Algérie.
La jeunesse française connaît les mêmes interrogations et les mêmes espérances. et c’est pourquoi, compte-tenu de l’histoire qui nous a séparés, mais qui nous a aussi unis à travers les liens humains, que jeunes Algériens et jeunes Français, par la géographie, par la culture, par la langue, par les familles peuvent se rapprocher et le partenariat que nous avons scellé avec le Président Bouteflika, avec les deux gouvernements français et algériens, c’est d’abord et avant tout un pacte pour la jeunesse.
Et cela passera par la formation, c’est-à-dire par la volonté qui sera la nôtre de contribuer à donner à toutes les universités les conditions de pouvoir davantage échanger. Cela passera par des centres de formation, notamment en technologie, qui bénéficieront de notre propre expérience des instituts supérieurs de technologie. Déjà 4 instituts d’enseignement supérieur algériens vont avoir notre accompagnement. L’information grâce à la langue puisque nous la mettons en partage, la formation aussi grâce à la mobilité entre la France et l’Algérie. Déjà près de 30 000 jeunes Algériens poursuivent leurs études en France. Je souhaite qu’il y ait un effort pour leur donner les meilleures conditions d’accueil et de réussite. Mais je souhaite aussi dans le cadre de la réciprocité des échanges que puisse s’intensifier l’accueil de jeunes Français étudiants, ici, dans vos universités.
Je souhaite aussi que les entreprises contribuent à cet effort de formation. Chaque fois qu’un investissement se fait en Algérie, il doit y avoir l’accompagnement par des mesures de qualification permettant à des jeunes de trouver un emploi durable.
Voilà ce que je voulais dire à la jeunesse algérienne, qu’elle ait confiance dans son destin, qu’elle ait foi dans sa réussite. Qu’elle sache bien que la France est son meilleur ami, son meilleur allié pour aller plus loin. Que les jeunes Français ne demandent qu’à mieux connaître les jeunes Algériens.
Votre génération, celle des moins de 25 ans, je pourrais dire, même celle des moins de 35 ans a toujours connu l’Algérie indépendante. Dès lors, vous êtes fiers de votre histoire, vous en connaissez les grandeurs et les douleurs. Vous êtes fiers du combat de vos parents pour la liberté. Mais en même temps, vous devez vivre maintenant dans la paix des mémoires, vous devez être tournés résolument vers l’avenir, ne plus regarder le passé comme une division, mais comme une nécessité de réunion et de rassemblement.
C’est ce message que je voulais venir délivrer, ici, devant vous, à l’université de Tlemcen. L’avenir, que nous avons maintenant en partage, l’avenir que nous devons construire ensemble, l’avenir que nos jeunesses demandent, nous devons être suffisamment responsables pour l'organiser en commun. Oui, vous pouvez, vous devez avoir confiance.
Ce que nous sommes en train de décider, aujourd’hui, à l’occasion de ce voyage c’est de donner une chance, une chance de plus, une grande chance pour l’amitié entre la France et l’Algérie. Cette chance là, jeunesse algérienne, saisissez là, elle est la vôtre.
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Conférence de presse conjointe du Président de la République et de M. BOUTEFLIKA, Président de la République algérienne démocratique et populaire.
TLEMCEN (ALGERIE)
Jeudi 20 décembre 2012
Mesdames, Messieurs,
Nous arrivons au terme de cette visite, exceptionnelle à bien des égards. Je veux remercier le président BOUTEFLIKA, son gouvernement, pour l’accueil et pour la construction d’une relation politique de haut niveau, ce partenariat d’égal à égal que j’avais appelé de mes vœux.
Je veux également saluer le peuple algérien pour l’accueil qui m’a été réservé, non pas à titre personnel, mais qui a été réservé à la France dans son ensemble. Ses messages, ses encouragements, ses mots d’amitiés n’étaient pas dirigés vers ma personne, mais étaient autant de messages de confiance à l’égard de la relation que nous pouvons nouer avec le peuple algérien.
La France a été bien accueillie ici, et il est attendu beaucoup de nous, non pas de revenir sur le passé, j’ai dit ce qui était la vérité, mais pour bâtir l’avenir, construire des projets, aussi bien dans le domaine économique, et il y a eu des accords très importants qui ont été signés , dans le domaine culturel où les algériens prennent conscience aussi de ce que peut être la langue française comme lien, mais aussi avec les échanges universitaires, et à cet égard, la réception qui a été faite à l’université de Tlemcen pour le président que je suis, mais pour la France, était autant d’appels pour des coopérations de haut-niveau.
Je ne vais pas être plus long parce que j’avais dit que je jugerais la réussite de cette visite à l’aune de ce que nous étions capables de dire sur le passé, et de faire pour l’avenir. Et j’avais placé mon rendez-vous avec l’Algérie autour de deux mots essentiels : la vérité pour évoquer l’histoire, et la volonté pour bâtir l’avenir, et c’est autour de ces deux mots que nous avons je le crois réussi cette visite.
QUESTION – Peut-on connaître les raisons qui ont motivées votre acquiescement au choix de Tlemcen, comme seconde et ultime étape de votre voyage en Algérie et si Tlemcen n’avait pas été choisie, qu’elle aurait été la ville que vous auriez choisie et qu’elles en seraient les raisons et également pouvez-vous nous dire quelque chose, quelques petits détails sur le livre que vous avez offert au président, hier à Alger ?
LE PRESIDENT - Oui, je voulais aller à Alger parce que c’est la capitale, parce que c’est là que sont situées les institutions algériennes, parce que c’est là que nous avons signé des accords et porté un partenariat. Mais j’avais souhaité, les autorités algériennes également, que nous puissions aussi nous rendre dans une ville, que je n’ose pas dire de province, ce terme n’existe pas ici en Algérie, c’est une conception française la province. Une autre grande ville d’Algérie pouvait se présenter à nous, la ville d’Oran parce que nous allons avoir l’installation de l’usine Renault. Il pouvait y avoir également Constantine, mais il y avait déjà eu un déplacement qui avait été fait à Constantine. Il faut changer. Je pouvais aller à Sétif, cela eut été sûrement un message en tant que tel, c’est la raison pour laquelle j’ai parlé de Sétif, ce matin. Pourquoi j’ai choisi Tlemcen ? Parce que je savais que c’était une ville chère au cœur du président BOUTEFLIKA, mais aussi parce que c’est une ville de rayonnement, de culture, d’unité et de rassemblement dans la diversité des religions.
J’ai parlé ici à Tlemcen, de l’Islam culturel, mais j’ai parlé aussi de la religion chrétienne, des Juifs, parce qu’ici à Tlemcen, il y a eu ce brassage qui fait que cette ville est exceptionnelle. Et puis enfin, j’aurais eu tort de ne pas choisir Tlemcen au regard de l’accueil qui m’a été réservé ainsi qu’au président BOUTEFLIKA. Donc, je remercie tous ceux qui ont permis ce déplacement.
Ensuite le livre, c’est un livre très ancien, qui justement évoque la chrétienté, toujours dans cette ouverture aux autres, ce souci du respect de toutes les religions. En France, nous appelons cela la laïcité qui nous permet de vivre ensemble et je suis aussi conscient de ce qu’est l’Islam de France, et de ce qu’il doit avoir comme respect. Avec le gouvernement, le ministre de l’Intérieur, nous veillons à ce qu’il n’y ait aucune confusion, aucun amalgame par rapport au fondamentalisme ou à l’intolérance et nous luttons contre toutes les discriminations.
Et je sais qu’en Algérie, ce sujet-là est sensible, parce que chaque fois qu’il y a une atteinte aux droits, une menace par rapport à l’égalité, les Algériens se sentent concernés, mais nous aussi nous sommes concernés. Nous voulons qu’en Algérie il y ait le respect de toutes les situations et j’ai été très heureux, je peux vous le dire d’être accueilli au cimetière d’Alger. Avec l’entretien qui est fait des sépultures, des tombes par l’Etat algérien, cela me permet de dire aux familles de Français nés en Algérie dont les parents sont morts en Algérie et qui ne savent pas toujours comment revenir pour honorer leurs morts de le faire, de le faire parce qu’ils y seront bien accueillis, parce que nous ferons tout pour qu’il en soit ainsi et les autorités algériennes également.
QUESTION – M. le Président, un mot sur ce français enlevé au Nigeria, de quelles informations disposez-vous, la France que compte-t-elle ou peut-elle faire ?
LE PRESIDENT – Je confirme d’abord que l’un de nos compatriotes a été enlevé dans le nord du Nigeria. Il y a eu deux morts nigérians, dans le cadre de cet assaut. Notre ressortissant a été emmené, nous cherchons tous les éléments qui nous permettent de le retrouver. Je suis en contact avec le gouvernement en France pour avoir toutes les informations. Ici, les ministres ont été tenus informés minute par minute, aussi bien le ministre des Affaires étrangères que le ministre de la Défense, et nous utiliserons tous les moyens pour retrouver notre ressortissant.
QUESTION – Vous avez appelé à orienter le regard vers l’avenir. Il se trouve que la France continue d’aborder ces relations avec le continent africain sur la base de l’héritage colonial. Donc, ma question est de savoir, est-ce que réellement la page du passé colonial a des chances d’être tournée ?
Vous avez dit dans votre discours à l’université de Tlemcen, en parlant justement de la réconciliation en Algérie que se réunir et se rassembler ne suffisaient pas, je vous invite à être plus explicite ?
LE PRESIDENT – Je vais l’être puisque vous m’y invitez en toute liberté. J’ai fait un discours à Dakar, il y a plusieurs semaines sur ce que je voulais trouver comme relation avec l’Afrique, c’est-à-dire là encore tournée vers l’avenir. La volonté de ne pas entretenir les confusions. La France a une relation qui doit être fondée sur des principes avec l’Afrique et avec tout autre continent. Mais encore davantage avec des pays qui ont pu être dans ce qu’on appelait l’empire colonial et avec lesquels nous devions être à égalité et dans le respect. Mais il ne faut pas non plus entretenir le passé comme une forme de récrimination. Nous avons dit ce qu’il convenait de dire sur le système colonial, je l’ai également abordé ce matin. Donc, nous pouvons travailler ensemble sur cette base-là de vérité, de respect et d’engagement pour l’avenir.
Pour ce qui concerne la réconciliation, elle était nécessaire, indispensable et j’ai salué le mouvement qui avait été engagé en son temps par le président BOUTEFLIKA qui a mis dix ans avant d’aboutir à une situation où la sécurité est revenue, la compréhension. Mais en même temps, je sais que l’Algérie ne veut pas en rester là. Si elle s’est réunie, si elle s’est rassemblée, si elle a été capable, là encore d’exorciser les peurs et d’éradiquer les intolérances et les violences, elle veut, l’Algérie, s’engager pour l’avenir et donc, nous la France, nous devons être présents au rendez-vous, que l’Algérie d’ailleurs a lancé à l’ensemble du monde, pas simplement à la France. Je ne demande aucune exclusivité, je dis simplement qu’entre la France et l’Algérie, il y a de telles relations, de tels liens que nous pouvons faire bien plus qu’aujourd’hui et c’est ce que nous allons montrer par la déclaration d’amitié, par le document qui permet d’engager une coopération sur cinq ans. Donc maintenant, ce sont les actes qui doivent venir parce que les paroles ont été prononcées, à l’occasion de cette visite, des accords ont été signés, mais maintenant, nous devons les traduire.
QUESTION – Pendant ces deux jours, il a été très peu question des problèmes internationaux. Je voudrais vous poser deux questions. La première porte sur la Syrie, vous avez dit que le devoir de la communauté internationale, si je ne trahis pas votre parole, c’est de hâter le régime du président ASSAD. Après Marrakech, que peut faire la communauté internationale et est-ce que vous considérez qu’il faut s’attendre quelque chose d’utile, de positif des négociations qui ont lieu actuellement entre les Russes et les Américains, avec Monsieur BRAHIMI ?
La deuxième question porte sur la colonisation israélienne dans l’Etat palestinien. Vous avez voté pour la reconnaissance de la Palestine en tant qu’Etat observateur, non-membre des Nations Unies. Or, depuis plusieurs semaines, la colonisation s’accélère à un rythme infernal, bientôt, il n’y aura plus la possibilité d’avoir cet Etat que vous appelez de vos vœux avec la continuité territoriale. Est-ce qu’on peut continuer comme cela à ne rien faire vis-à-vis de ce gros problème ?
LE PRESIDENT – D’abord, nous avons beaucoup parlé avec le président BOUTEFLIKA, de la situation internationale. Vous savez sa sagesse, sa connaissance, son expérience, elles nous sont précieuses. Et donc, nous avons abordé trois grands sujets. Le premier, c’est le Sahel, le Mali et avec, je l’ai rappelé hier, la même conception. La discussion politique, la négociation, là encore pour une réconciliation, mais uniquement avec les groupes qui ont rompu tout lien avec le terrorisme et qui acceptent le principe de l’intégrité du Mali et en même temps continuer la pression internationale. Aujourd’hui même, la résolution que nous attendions a été adoptée par le Conseil de sécurité et rend désormais possible si les Africains mettent en œuvre ses principes, une intervention dont la France ne sera pas partie prenante, mais que la France appuiera par des moyens de formation et de logistique. L’Algérie comprend cette position et elle sait pourquoi nous agissons, non pas pour nous-mêmes mais pour des principes. Non pas par nous-même, puisque ce sont les Africains qui en décideront.
Deuxième sujet que nous avons abordé, la question israélo-palestinienne et je savais que le vote aux Nations Unies n’allait pas provoquer immédiatement la consécration de l’Etat palestinien. Nous, nous avons mis notre acte en conformité avec notre parole, nous étions favorable à cette reconnaissance de la Palestine comme état non-membre observateur, mais nous savions bien que cela n’allait pas produire ce qui était peut-être espéré par certains. Il n’y a pas d’autre issue que la négociation et par rapport aux annonces de colonisation, nous avons condamné ces déclarations, nous savons qu’il y a des élections en Israël au mois de janvier et nous souhaitons qu’au lendemain de ces élections un processus de négociation puisse s’ouvrir enfin pour aboutir à la solution des deux Etats.
Le troisième sujet, c’est la Syrie, le groupe des amis de la Syrie s’est réuni à Marrakech et a continué à affirmer son soutien à une transition, c'est-à-dire au départ de Bachar EL-ASSAD.
Il y a eu aussi un travail avec la coalition nationale syrienne et pour répondre précisément à votre question, oui, nous soutenons tous les efforts de Monsieur BRAHIMI, qui est l’envoyé des Nations Unies pour, avec les Russes, avec les Américains aussi, mais surtout avec les Russes trouver une issue, puisque nous savons bien que le Conseil de Sécurité est bloqué compte tenu des positions de la Russie. Et, nous attendons que Monsieur BRAHIMI contribue à la solution politique. Là encore, les deux démarches ne sont pas contradictoires, l’une d’appui à l’opposition syrienne la nôtre, à travers le groupe des amis, l’autre, la recherche d’une solution politique à travers la démarche de l’envoyé spécial des Nations Unies.
QUESTION – Vous venez au début de votre conférence de presse de faire un premier bilan, si je peux l’appeler ainsi de votre visite que vous avez jugée très exceptionnelle. Je souhaiterais savoir quelle seront les résultats immédiats dans le cadre de cette refondation des relations, ou plutôt le recentrage de ces relations bilatérales, quelles seront les dividendes de cette visite dans l’immédiat ?
LE PRESIDENT – Les dividendes, c’est comme les fruits, il faut attendre qu’il y ait eu suffisamment d’investissements pour les retrouver ou les recouvrer. Je crois qu’il y a déjà un résultat immédiat qui est ce climat qui a été particulièrement favorable au cours de cette visite. Climat entre les deux présidents, les deux gouvernements, également l’accueil qui m’a été réservé, mais aussi les mots qui ont été choisis par les uns comme par les autres pour dépasser ce qui avait pu nous séparer, pour construire. Cela, c’est le résultat immédiat, c'est-à-dire une confiance, le souci d’aller de l’avant et puis cet appel à la jeunesse. Est-ce que concrètement nous pourrons avoir des résultats rapides, je le crois. Pour l’emploi, nous avons cette installation de Renault. Pour la coopération culturelle, cela ira vite, pour l’agriculture, les choses ont été également bien posées, pour la défense, ce n’était pas si évident de nouer un accord de défense. Il y a des progrès assez substantiels, mais vous avez raison, c’est sur le long terme que l’on jugera. Moi, je suis conscient de ce qui s’est produit dans le passé, des annonces, des espoirs, puis ensuite des déceptions.
Donc, nous allons être très vigilants, d’où également la méthode que nous avons utilisée, c'est-à-dire que chaque année il y aura une vérification du respect des accords et du document que nous avons signé
QUESTION – Monsieur le Président, vous avez dit à Alger être pour la vérité sur la guerre et la mémoire des blessés. Pouvons-nous d’emblée penser ou envisager un travail commun entre les historiens des deux parties ? La deuxième question en rapport avec l’assassinat des moines de Tibhirine, et donc l’enquête que la justice française compte mener ici même en Algérie, va-t-elle aussi donner des réponses ou peut-être plus de réponses sur l’affaire ?
LE PRESIDENT – J’ai souhaité que nous puissions ouvrir nos archives, permettre le travail des historiens, avoir une commission dans laquelle historiens français et historiens algériens puissent travailler ensemble. Cette volonté-là est commune aussi aux Algériens, et c’est la bonne méthode.
Ensuite, pour ce qui concerne la justice, il y a une enquête de la justice française. Il y a une enquête de la justice algérienne. Il y a des coopérations. Et nous devons faire travailler en toute indépendance, mais également en toute liberté la justice sur la question qui reste encore posée des moines de Tibhirine.
QUESTION – Monsieur le Président, j’ai deux questions à poser. La première, Tlemcen est située à un jet de pierres de la frontière marocaine. Est-ce qu’il a été question lors de vos discussions avec Monsieur le Président Bouteflika du dossier sahraoui. Est-ce qu’on peut espérer que la position française, que cette question soit revue ?
Deuxième question, des officiels français ont laissé entendre que Paris est disposé à vendre des armes à l’Algérie. Est-ce que vous avez reçu une demande bien claire et précise de la part des autorités algériennes ?
LE PRESIDENT – Nous avons parlé de la frontière fermée entre l’Algérie et le Maroc et de ses causes, c’est-à-dire le contentieux qui demeure par rapport à l’avenir du Sahara occidental. La position française, c’est la suivante : l’ONU, rien que l’ONU et toutes les résolutions des Nations Unies et nous n’en changerons pas.
Ensuite, j’irai, vous le savez, au Maroc, au début de l’année 2013 et, je ne suis pas médiateur, je n’ai pas à jouer un rôle d’intermédiaire, personne ne me le demande. Mais je dirai aussi bien aux Marocains ce que j’ai dit aux Algériens, c’est que nous devons aller vers l’application des résolutions de l’ONU et faire en sorte que ce qui a provoqué la fermeture de la frontière puisse être levé. Je crois que c’est l’intérêt du Maghreb.
Par rapport à l’armement, il y a un accord. Vous pourrez le lire, il n’est pas secret. Donc, il ne s’agit pas de matériel d’armement, ce sont des matériels qui sont prévus dans l’accord. Ce ne sont pas les armes comme on pourrait le penser.
QUESTION – Vous avez dit tout à l’heure qu’il est beaucoup attendu de la France. Est-ce qu’on peut savoir ce que vous a été demandé officiellement par les autorités algériennes. Qu’est-ce que la France attend aussi de l’Algérie.
Une deuxième question par rapport au dossier malien. Vous avez dit qu’il y a convergence entre les deux pays, alors que la France est favorable à une intervention militaire et l’Algérie défend toujours la solution politique. Pouvez-vous nous expliquer cette contradiction ?
LE PRESIDENT – Nous devons faire ensemble. Nous ne demandons rien comme concession aux Algériens, pas plus que les Algériens nous demandent des concessions à nous-mêmes. Nous avons à bâtir un certain nombre de relations nouvelles dans le cadre d’accords, c’est ce que nous avons fait dans de nombreux domaines. Nous ne nous sommes pas retrouvés en situation d’échange ou de troc. Nous avons voulu justement nous situer sur une autre démarche, c’est-à-dire tout simplement avancer, pas revenir sur le passé, pas échanger de la culture contre de l’économie, ou de la diplomatique contre de la formation. Nous avons voulu faire tout à la fois. Nous retrouver dans une relation politique, comme dans une relation économique tout en parlant aussi des aspects d’éducation et de culture.
Sur le Mali, que les choses soient claires, la France se situe dans le cadre des Nations Unies. Le Conseil de sécurité, à l’unanimité, vient de prendre une résolution sur le Mali. Ce n’est pas que la France, c’est les Nations Unies. C’est tous les pays membres du Conseil de sécurité. Est-ce que c’est contradictoire avec la position de l’Algérie ? Pas davantage, puisque l’Algérie souhaite des négociations politiques, nous aussi. En même temps, il y a une pression à exercer, sinon le terrorisme ne sera pas éradiqué.
QUESTION – On sait très bien que les relations entre l’Algérie et la France n’ont pas toujours été faciles, il y a eu beaucoup de haut, beaucoup de bas, pensez-vous, Monsieur le Président qu’aujourd’hui c’est le réalisme qui a pris le dessus sur la passion ?
Deuxième question, il y a à peine 30% des Français qui ont une bonne opinion sur la l’Algérie, donc loin derrière le Maroc et la Tunisie. Quel message vous pouvez adresser aux Français à partir de Tlemcen Monsieur le Président ?
LE PRESIDENT – Un peu de passion est utile, beaucoup de réalisme également. Il faut une part d’émotion. Il faut une part de conviction. Il faut une part de sentiments sans lesquels il n’y a rien de possible y compris pour le réalisme. Il y avait deux manières de faire : soit en rester aux incantations, aux paroles et ce voyage aurait peut-être apaisé ou satisfait certains plutôt que d’autres. Je n’ai pas voulu prendre cette méthode-là.
L’autre façon, c’était de ne faire que du réalisme économique, mais l’économie se nourrit aussi de confiance politique et de relation humaine. Nous avons plutôt fait une déclaration d’abord d’amitié pour porter la part d’émotion, de passion et d’humanité dans laquelle nous souhaitons inspirer la relation franco-algérienne et puis de l’autre nous avons voulu avancer.
C’est un voyage qui était tourné résolument vers l’avenir, qui ouvrait ce que j’ai appelé un nouvel âge, 50 ans après. Après 50 ans on doit passer vraiment au moment de réalisation de sa vie. Jusqu’à 50 ans on peut se poser des questions, on peut réfléchir, on peut parfois même changer. Mais après 50 ans il faut savoir ce que l’on veut.
Voilà, l’Algérie et la France savent maintenant ce qu’elles veulent.
Sur le message, oui, vous avez raison. Je pense que l’Algérie est encore mal connue des Français. Bien sûr que beaucoup de Français qui ont un lien avec l’Algérie ont une relation de cœur, parfois de ressentiment. Tout dépend de la situation. Mais beaucoup de Français pensent que venir en Algérie c’est compliqué. C’est simple pourtant. Beaucoup de Français pensent que le tourisme ce n’est pas en Algérie. Il suffit de visiter Tlemcen pour être convaincu du contraire. Beaucoup de Français pensent qu’il y a de l’insécurité en Algérie. Je peux comprendre qu’après la période très dure, très éprouvante, il y ait eu des interrogations. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Beaucoup de Français ne savent pas si les Algériens sont accueillants. J’espère que les images qui seront diffusées de ma visite démontreront tout l’inverse. J’ai rencontré des étudiants à l’université de Tlemcen. Ils étaient tous algériens sauf un qui était français et qui a fait cette confidence : « chaque fois que je viens à Tlemcen », il y venait régulièrement, « on me dit bienvenu, et on me dit bienvenu à la »rance".
Aujourd’hui comme hier, les Algériens ont dit « bienvenu » à la France et aux Français.
QUESTION – Vous avez déclaré ce matin, vous avez reconnu dans votre discours devant les parlementaires algériens que le système colonial qui a été injuste a infligé des souffrances pour le peuple algérien. Mais force est de constater que dans le pays dont vous êtes le Président, il y a une loi votée, la loi du 23 février qui glorifie malheureusement le colonialisme. Donc, il y a une sorte de contradiction. Est-ce qu’il n’y a pas lieu, avec la majorité que vous possédez au niveau de la chambre nationale, de revoir cette loi plutôt l’abrogée peut-être ?
LE PRESIDENT – Il y a tant à faire avec cette majorité, tant de lois à voter que l’on pourrait se dire que c’est inutile de revenir sur celle-là. Mais, nous n’avons pas besoin d’y revenir puisque c’est déjà fait. Puisque le Président CHIRAC avait eu l’intelligence de saisir le Conseil constitutionnel qui avait annulé ce point-là. Il n’y a plus rien dans la loi française qui fait référence au système colonial en Algérie
QUESTION – Vous avez beaucoup insisté au cours de toutes vos interventions sur le passé d’un côté, l’avenir de l’autre, autrement dit, un passage culturel pour un franchissement politique. Est-ce que vous pensez que pour la Méditerranée, il faut un tandem ou un moteur franco algérien comme il a fallu un moteur franco-allemand pour l’Europe ? Et un de vos amis me disait ce matin amusé : Monsieur HOLLANDE tient avec cette histoire de Méditerranée son futur prix Nobel ?
LE PRESIDENT – J’ai déjà été docteur honoris causa cet après-midi. Je ne voudrais pas gonfler d’importance. Mais, le 22 janvier, il va y avoir le 50ème anniversaire du traité de l’Elysée, 50 ans. 50 ans, pour l’amitié franco-allemande. 50 ans, après que le Général de GAULLE et Konrad ADENAUER, après une guerre terrible contre la barbarie nazie aient été capable de se retrouver ensemble pour ouvrir non seulement un nouveau temps pour la France et l’Allemagne, mais une nouvelle espérance pour le continent, l’Europe.
Aujourd’hui, 50 ans après, l’indépendance de l’Algérie, nous pouvons être capables, la France et l’Algérie d’ouvrir un nouveau temps, une nouvelle époque, une nouvelle histoire, pas simplement pour nos deux pays, mais pour la Méditerranée.
Voilà, c’est le message que j’ai prononcé à Alger ce matin. Je pense que nous pouvons en être capables. Demain, je suis convaincu que Français et Algériens seront fiers s’ils sont en mesure d’ouvrir ce processus. Et il se trouvera bien un Président de la République française qui viendra en Algérie après moi - elle finira par arriver - et qui pourra regarder ce que nous aurons fait.
Mais je souhaite que cette trace là soit laissée et que cette responsabilité nous engage. C’est dire le niveau auquel nous devons parvenir. C’est un grand enjeu pas simplement pour nos deux pays, . La France et l’Algérie ont des vocations universelles. Elles doivent ouvrir la voie aux autres comme la France et l’Allemagne l’ont fait pour l’Europe.
Merci à tous
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Gadiri Mohammed Presse Électronique d'informations Tlemcen.
Gadiri Mohammed Presse Électronique d'informations Tlemcen
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