TLemcen:
le Colonel Lotfi, le symbole de toute une génération.
un récit inédit et historique du Moudjahid Lemkami Mohammed ancien du Malg, sur le parcours du Chahid le Colonel Lotfi tombé au champs d’honneur à l’âge de 25 ans et 4 mois.
Dghine Bénali, fils de Abdelkrim dit Abdallah et de Lokbani Mansouria est né le 05 mai 1934 dans l'Allée des Sources du quartier d'El Kalaâ de Tlemcen. Cette rue de moins de 100 mètres a donné plus de vingt Chahids.
C'étaient non seulement des voisins de Bénali, mais des amis et plus
tard des compagnons d'armes. Effectivement, il faisait partie de ce cercle de
jeunes de l'Allée des Sources qui étaient tous voisins et avaient souvent des
liens familiaux. Déjà adolescent, il émergeait de lui la droiture et la
rationalité. Ses parents étaient de conditions modestes. Le père était un
simple employé de mairie, était marié à une seconde femme islamisée nommée El
Hadja Zizette qui était très proche du jeune Bénali.
Jeune garçon, il avait suivi ses parents à Alger ou son
père avait ouvert un petit commerce qui n'avait pas duré longtemps. L'école
primaire commencée à Tlemcen à l'école Déscieux (El Abili actuellement) s'était
poursuivie à Alger, puis retour à Tlemcen. Pendant environ une année, il s'était
éclipsé à Oujda pour consolider sa langue arabe au Collège Abdelmoumen et
préparer le concours d'entrée à la Médersa de Tlemcen.
C'était dans cette Médersa que probablement il
avait ouvert les yeux sur la politique car, c'était une véritable
fourmilière d'étudiants venant de toute l'Oranie. Chacun d'entre eux avait ses
propres convictions et nombre d'entre eux avaient très tôt rejoint le maquis
dont certains sont tombés plus tard au champs d'honneur.
Sa formation politique avait été certainement complétée
par Mustapha Berezoug, le mari de sa tante maternelle qu'il fréquentait
régulièrement. Ce dernier était un militant
actif du Parti du Peuple Algérien (PPA) ce qui lui avait coûté plusieurs
séjours en prison et à Djenien Bourezg, centre d'internement de réputation. A
la médersa, il fréquentait entre autres Djelad Ahmed et Larbi Bénamar. Le
premier, Lieutenant de l'Armée de Libération Nationale (ALN) est tombé au champ
d'honneur en 1959 a Béni Bahdel, Béni Snous. Le second était un ancien membre
de l'Organisation Secrète (OS), fait prisonnier en tant que membre de l'AlN en
1955, s'était évadé du tribunal de Tlemcen en 1956 au cours de son jugement
dira Lemkami Mohamed ancien officier au ministère de l’armement et des liaisons
générales.
Vers l'année 1952/1953, sur l'instigation de Larbi
Bénamar, un groupe informel d'amis et de confiance se rencontraient une fois
par semaine dans l'arrière-boutique de Ali
Khédim au quartier du Medress, comprenant Kerroum Kouider, du Collège de
Slane, futur étudiant en médecine à Alger ayant rejoint l'ALN à Sebdou après la
grève des étudiants et tombé au Champs d'Honneur dans la même région en 1956,
Abderrezak Bekhti du colège de Slane, tombé au champs d'honneur dans la région
de Sebra en 1956, Djelad Ahmed de la médersa puis universitaire à Alger ayant
rejoint l'AlN après la grève, tombé au champs d'honneur en 1959 a Béni Snous.
Lemkami Mohamed du collège de Slane ensuite instituteur,
ayant rejoint le maquis fin 1955. Pour mémoire, Khédim Ali le Major parce qu'il
était en plein exécution du service militaire dans l'armée française, avait
remplacé Lotfi à la tête de Tlemcen, tombé au champ d'honneur dans le quartier
de Sidi Chaker de Tlemcen en juillet 1957.
Au cours de nos débats dans nos rencontres, Bénali nous étonnait par ses capacités d'analyse et transcendait sur le plan politique malgré son jeune âge. Nous étions entre autres chargés de diffuser clandestinement des documents secrets et la presse du parti du PPA.
Le stage de préparation Militaire:
Bénali était un sportif. Il nous l'avait montré au cours
de notre stage commun de préparation militaire durant l'année 1953, sous le
commandement du Colonel Slimane Belhabich de l'armée française. Cette
préparation nous permettait d'avoir le sursis pour poursuivre ultérieurement nos
études. Elle nous avait surtout servi en
rejoignant plus tard les rangs de l'Armée de Libération Nationale.
En dehors de cela, Bénali invitait très souvent chez lui
des amis intimes en particulier ses proches voisins. Même certains Medersiens
et collégiens comme Ali Rebib, Djamal Brixi, Hocine Senoussi, y avaient
assisté. En ces occasions aussi, la politique prenait le dessus dans ses
discussions. Les thèmes d'actualité étaient débattus : la guerre du Vietnam,
l'Egypte, la Tunisie et le Maroc. Ali Rebib l'ancien voisin de table de Bénali
en classe de la médersa, avait rejoint le maquis dès le déclenchement de la
grève des études. Il avait été fait prisonnier le 13 février 1958. Hocine
Senoussi avait été parmi les premiers
stagiaires d'aviation de l'ALN envoyés en Egypte par le commandant de la
wilaya V, Si Mabrouk.
Ainsi les futurs premiers candidats à rejoindre l'Armée
de Libération Nationale dans ce quartier d'El Kalaâ de Tlemcen étaient Klouche
Djelloul, Dali Yahia Driss, Larbi Bénamar, Dghine Bénali, Kahia Tani Fethi,
Kahia Tani Hammi Bestaoui Sid Ahmed, Gaouar Djamal et Gaouar Sid Ahmed dit
Hammi.
Ils avaient avant le déclenchement, directement ou
indirectement contact avec Boussouf dit
à l'époque Si Larbi, responsable du PPA clandestin a Béni Snous
Tlemcen.
Dans l'Armée de Libération Nationale:
De Béni Snous à Tlemcen.
Dghine Bénali était à Tlemcen certainement parmi les
premiers militants du Front de Libération Nationale dès le déclenchement de la
Révolution le 1er Novembre 1954. Naturellement, sa première cellule organisée à
son initiative, réunissait des amis intimes et de confiance, garçons et filles,
parmi les voisins. On peut citer pour mémoire les Kahia Tani, Les Gaouar, les
Dali Yahya, les Sari, le Kara Terki, les Méghili. Certains parmi eux, garçons
et filles, avaient joué au départ comme agents de liaisons avant de rejoindre
l'ALN a Béni Hédyel Ain Ghoraba, soit à Béni Snous, soit à Sebra et même à
Ghazaouet et Nédroma.
Les premières réunions se tenaient chez les Dghine, dans
la petite chambre de Bénali en haut en entrant à gauche. Pour des raisons de
sécurité, d'autres lieux tenus secrets avaient servi à ces réunions. Les
services de sécurité et les forces militaires françaises procédaient à une
répression terrible suivie d'arrestations et d'exécutions sommaires à la suite des récentes opérations
d'envergure lancées par l'ALN à travers toute l'Oranie à partir du 1er octobre
1955.
Un matin du début d'octobre 1955, Bénali était en classe
à la médersa, quand subitement un ami intime à lui, Sid Ahmed Gaouar dit Hami,
ayant appris la très imminente arrestation de son ami, n'avait pas hésité à
pénétrer jusqu'en classe pour lui parler dans l'oreille. Sur le champ, sans
chercher à rejoindre son domicile, ni à se cacher quelque part en ville, Bénali
avait demandé à Hami de le déposer en voiture immédiatement dans une forêt
voisine. Il avait alors pris tout seul la direction des montagnes en direction
des Béni Snous pour rejoindre le maquis. C'était le début de son engagement
dans l'Armée de Libération Nationale. Il avait alors 21 ans.
Sans connaitre le terrain, il avait marché uniquement de
nuit. En arrivant dans l'un des villages de la vallée des Béni Snous, le
prenant pour un Européen et n'ayant aucune confiance en lui, certains habitants
du village (des Moussebillines), l'avaient arrêté et accompagné jusqu'au poste
de commandement du Secteur quatre ou se trouvaient le chef de secteur Jaber (
Métaîche Abdelkader) et par hasard Si Mabrouk ( Abdelhafid Boussouf) alors
Adjoint du Chef de la Zone V ( future Wilaya V) Larbi Ben M'hidi. Il s'était
avéré alors que l'un d'eux le connaissait probablement par l'intermédiaire de
Mustapha Berezoug, ancien militant et mandataire de profession ou par Larbi
Bénamar, ancien membre de l'organisation secrète (l'OS).
Pour quelques semaines Bénali, surnommé alors Si Kaddour,
allait remplir la fonction de secrétaire du chef de secteur Si Yahya (futur
Commandant Jabeur). Si Mabrouk le
désigna courant novembre de la même année responsable politico-militaire de la
ville de Tlemcen et sa banlieue réglant ainsi un litige entre deux chefs de
secteurs Tahar (futur commandant Farradj) et Mokhtar El Bouzidi dit Ogb Ellil
qui voulaient contrôler cette ville stratégique sur le plan approvisionnement.
Il prendra alors le surnom de guerre de Si Brahim.
Dès son installation, il entreprend l'organisation de son
territoire et parallèlement la formation de ses effectifs.
Le premier poste de commandement:
La ferme d'El Hadj Abdellah Benosmane, à Koudia au nord de Tlemcen proche d’ Abou
Tachfine (ex. Bréa) était devenue le premier poste de commandement de Si
Brahim. La famille d'El Hadj Abdallah Benosmane avait joué un rôle important,
malgré la présence de nombreuses fermes de colons aux alentours.
Les volontaires étaient très nombreux et Si Brahim
soumettait chaque nouveau candidat, en pleine cimetière et de nuit, à jurer
devant le drapeau étalé sur une tombe et le Coran, en présence de quelques
témoins, de défendre l'Algérie et sa patrie jusqu'à la mort sous les ordres du
Front de Libération Nationale et de l'Armée de Libération Nationale.
Si le nombre des candidats volontaires pour
rejoindre l'AlN, était appréciable, le
problème de l'armement se posait avec acuité.
Pour y remédier, il fallait s'attaquer aux casernements
de l'armée française et lancer des contacts multiples pour inciter les soldats
Algériens à déserter avec armes et bagages. Lors de sa prise de fonction à la
tête de Tlemcen, Jaber lui avait fait parvenir à partir de Tel Terny, près de Sebdou,
un lot d'armes, très insuffisant.
Tlemcen connaissait trois organisations : sous le
commandement de Si Brahim: une structure FLN avec ses cellules, dirigées par
Mustapha Benyellès secondé par Abdelkrim Bouayad; une organisation de Fidaîs et
de Fidaîates d'environ 60 membres dirigées par Rachid Bendimered et enfin un
commando de l'ALN d'environ 50
MoudjahIds dirigé par Si Brahim en personne.
La première action militaire de Si Brahim était dirigée
contre un poste de CRS à Bab Sidi Boumédiène, quartier populeux à l'Est de la
ville. Il était accompagné du jeune Bénali Kara Slimane. L'opération avait bien
réussie laissant plusieurs morts ennemis. Si Brahim avait été légèrement blessé
à la main. La seconde importante opération préparée par Si Brahim était dirigée
contre un nouveau casernement implanté récemment dans l'usine de tapis dit MTO
au quartier d’ El Hartoun au cours de laquelle des soldats algériens avaient
désertés avec armes et bagages. Cette action avait été l'œuvre du Chahid Aîssa
Bendiboun. De nombreuses armes, des chaussures et des tenues militaires et
d'autres équipements avaient été récupérés.
La troisième opération importante avait été un raid
contre les services de la commune mixte de Sebdou installés en pleine ville de
Tlemcen. Si Brahim avait utilisé la complicité d'un chauffeur de cette
institution nommé Bendahmane. Un lot d'armement important avait été récupéré:
20 mitraillettes, Thompson, 11 mass 36, 15 fusils Lebel, 3000 balles de 9 mm,
2000 balles de 8 mm, 7 Pm Mat 49, 1 ronéo, 4 machines à écrire et divers
documents secrets, 3 voitures de la commune détruites. Les bâtiments de cette
administration avaient été incendiés totalement.
Parallèlement à ces opérations contre les campements et
postes militaires des actions multiples de Fida et des sabotages des
infrastructures économiques coloniales n'avaient laissé aucun répit à l'ennemi
de novembre 1955 au mois de mai 1956 correspondant à la période sous
commandement de Si Brahim. A titre d'exemples, on peut citer l'exécution d'une
patronne de boîte qui recevait beaucoup d'officiers et qui refusait de
collaborer avec le FLN, lancement d'une grenade au café d'un pied noir rue du
théâtre, attaque du hall de l'hôtel Transatlantique fréquenté uniquement par
des militaires et des pieds noirs, destruction de ponts, de poteaux
téléphoniques et de pylônes électriques ainsi que plusieurs sabotages de la
voie ferrée.
L'ennemi qui avait rendu la ville de Tlemcen
méconnaissable par l'installation de barbelés et de chicanes partout, n'avait
pas cessé ses arrestations et ses liquidations physiques. Le couronnement avait
été le lâche assassinat du Docteur Bénaouda Benzerdjeb le 16 janvier 1956. Cela
avait provoqué spontanément une explosion populaire immense de la population,
particulièrement celle de la jeunesse et des intellectuels.
Des opérations de démonstration: Si Brahim ne pouvait
laisser impunis les assassins du premier médecin martyr de la Révolution du 1er
Novembre. Il allait leur démontrer par une opération unique au cours de toute
cette guerre de libération nationale de quoi était capable cette jeune Armée de
Libération Nationale: la fameuse fausse patrouille de police militaire.
Aidé par un ancien soldat algérien le déserteur de
l'armée ennemie surnommé Ho Chi Min, il avait durant plusieurs semaines dans la
clandestinité totale et dans le plus grand secret, dans la ferme de El Hadj
Benosmane monté cette opération.
Il avait sélectionné parmi ses effectifs, un certain
nombre de Moudjahids présentant physiquement un aspect européen et les a
enfermés dans cette ferme demandant même au propriétaire d'éloigner toute sa
famille pour quelques semaines. Il avait réuni tous les équipements
nécessaires: tenues militaires identiques à celles de l'ennemi avec chaussures, guêtres, gangs,
casques. Ces trois derniers articles de couleur blanche. Il avait récupéré un
nombre suffisant de matraques peintes en blanc, des fusils Garant, des
grenades.
Il avait dessiné les plans d'une partie de la ville pour
les démonstrations théoriques nécessaires avec les principales artères que
devait emprunter la patrouille. Il avait récupéré 3 tractions avant noires
identiques à celles utilisées par les autorités coloniales. Durant plusieurs
nuits, il avait fait marcher cette patrouille au même rythme que mettait une
vraie patrouille ennemie.
Le jour J du mois de mars 1956, cette fausse
patrouille s'était mise dans
l'après-midi à arpenter les principales artères de la ville, saluée au passage
par les soldats français qui se promenaient à pied. Il faut rappeler que le
couvre-feu qui était à 16 heures lors des manifestations de janvier suite à
l'assassinat du Docteur Benzerdjeb avait été reculé bien plus tard.
Juste après l'appel du Muezzin pour la prière du Maghreb
et du ftour, car c'était le Ramadhan, la fausse patrouille s'était pointée à la
Place des Victoires devant l'Auberge Normande servant de Mess aux officiers
ennemis. L'attaque surprise à la grenade suivie de mitraillage intense avait
laissé sur le carreau de très nombreux morts et blessé parmi les officiers de
l'armée française.
Leur mission terminée, les membres de la fausse
patrouille regagnèrent rapidement par un escalier, la rue Basse ou les
attendaient les trois tractions-avant. Ils avaient regagné, en faisant un grand
détour séparément, très tard la nuit leur base sains et saufs. L'assassinat du
Dr. Benzerdjeb Bénaouda venait d'être vengé. Si Brahim avait bien choisi
l'heure d'attaque, l'heure du ftour pendant laquelle les habitants sont chez
eux, leur évitant en partie la réaction répressive qui allait suivre.
Ainsi, se faisant tellement remarquer et apprécier par
ses responsables hiérarchiques, Si Brahim allait très vite gravir les échelons
et occuper d'importantes autres responsabilités. Il allait faire partie dès le
mois de juin 1956 des fameuses colonnes de pénétration, parties des Monts de
Tlemcen pour renforcer d'autres secteurs de la Zone V ( l'Oranie).
Sa désignation à
l'âge de 22 ans en qualité de coordinateur des Secteurs de Mécheria, Aîn Séfra,
El Bayadh, Aflou, Béchar, Tindouf, Adrar fut décidée suite à la demande introduite par des cadres
militants de ces région en l'occurrence Si Ali Laîdouni responsable du Secteur
d'Aîn Séfra et Si Ferhat responsable du Secteur de Béchar. Tout le Sud Oranais
comme le Grand Sud étaient depuis l'occupation coloniale Territoire militaire.
Ces derniers se déplacèrent vers le Nord, au PC de la
Zone V (Oranie) au mois de mars 1956, pour exposer à Si Mabrouk (Abdelhafid
Boussouf), adjoint du Commandant général de cette Zone, Si Larbi Ben M'hidi, la
situation de la résistance dans le Sud, caractérisée certes par des actions
éclatantes, mais manquant de responsable, de cohésion et de moyens.
Trois grands chefs militaires, Yousfi Bouchrit, Mohamed
Ben Abdelkader, Lamari et Moulay Brahim Abdelwahab commandaient chacun une
unité efficace de plus de 40 hommes, sans stratégie claire et sans orientation
politique définie ni coordination. Ils ne contrôlaient qu'un espace limité
autour d'El Bayadh, s'appuyant essentiellement sur leurs tribus
Ces trois responsables qui étaient déjà "hors la
loi" avaient déclenché la résistance et la lutte armée dès le 1er Novembre
1954. Ils avaient porté des coups très durs à l'armée ennemie en
francs-tireurs, car le contact avec le Front de Libération Nationale n'avait
pas encore été établi.
Il y a lieu de signaler néanmoins, qu'avant le
déclenchement du 1er Novembre, la présence du MTLD à Béchar, El Bayadh et Aîn Séfra était
conséquente selon les rapports des autorités coloniales, signalant le passage
de Ben Bella, Khider, Ben Abdelmalek Ramdane et Chihani Bachir à différentes
périodes dans le cadre de leurs activités militantes au sein du PPA.
De Tlemcen au
Grand Sud Oranais.
C'était donc la nouvelle mission que Boussouf avait
confié à Si Brahim, un jeune citadin Tlemcenien de 22 ans n'ayant jamais connu
ces très vastes territoires sahariens considérés par la France comme
Territoires militaires, ni leurs habitants. Lotfi quitte donc la zone nord en
avril 1956 à la tête d'une trentaine de djounouds, suivis quelques temps après
par un important groupe de déserteurs français basé à Kénitra dans l'Occident
marocain. Ce groupe était parvenu à Béni Smir sous le commandement de Moussa
Ben Ahmed dit Si Mourad. Ce renfort était bien armé et transportait en plus un
lot d'armes prélevées des apports du fameux bateau de plaisance de la princesse
jordanienne Dina.
Dès le mois de mai, Si Brahim entreprend la prise en main
des populations qu'il fédère autour du FLN après avoir longuement expliqué à
ces dernières au cours de plusieurs
réunions sous des tentes les objectifs de la Révolution en les invitant à unir
toutes nos forces contre l'unique ennemi, le colonialisme français. Par ses
raisonnements clairvoyants, il était arrivé peu à peur à les persuader et les
éloigner de certaines superstitions maraboutiques et l'esprit tribal au profit
du FLN et de l'ALN.
Profitant de la même occasion, il les met en garde contre
les velléités des groupes Bellounistes qui s'étaient aventurées dans les
régions de Laghouat, Aflou, Djelfa, Ksar Chéllala, Djebel Nador etc. C'était là
la mission politique première. Sa culture en arabe, son esprit ouvert et sa
logique l'avaient beaucoup aidé.
Une mission militaire consistait à former de nouvelles
compagnies en les armant et en orientant leurs actions vers des objectifs précis: casernement,
postes militaires, cibles stratégiques telles que les voies de chemin de fer
Saîda-Béchar et Oujda-Béchar.
Après le Congrès de la Soummam du 20 août 1956 l'ex-Zone
V était devenue la Wilaya V avec 8 Zones. Les anciens Secteurs 11,12, 13 et 14,
deviennent la Zone 8. Il en devient le Commandant en Chef politico-militaire
avec le grade de Capitaine à l'âge de 22 ans. Il restructure sa Zone en 4
Régions, chacune divisée en Secteurs.
Face aux coups de boutoir des nouvelles katibates de
l'ALN montées par le chef de Zone, l'armée française renforce le quadrillage du
Territoire militaire déjà existant
commandé par le général de Crevecoeur comprenant déjà 2 Régiments et 5
Compagnies spécialisées, par l'apport de deux divisions: la 4ème Division
d'Infanterie Mécanisée avec 5 Régiments motorisés, commandée par le général
d'Esneval; la 13ème Division d'infanterie avec ses 4 Régiments, sous les ordres
du général Aubert. Ces différentes forces ennemies sont assistées par d'autres
unités spécifiques de service que sont les
groupes d'artillerie, des unités du génie, des compagnies de transport
et surtout l'aviation de reconnaissance, d'appui et de bombardement.
Cette présence ne gêne pas le Capitaine Brahim qui
continue sa mission, qui se déplace constamment à travers sa Zone de Béni Smir
à l'ouest jusqu'à Djebel El Melh à l'Est. Dans cette dernière région ou ses
hommes repoussent les Bellounistes de Ziani, d’Achour et de Meftah jusqu'aux
limites de Messaâd et de Djelfa.
Installation du Poste de Commandement à Khneg
Abderrahmane: un relais très important.
Début 1957, il installe son Poste de Commandement à Khneg
Abderrahmane dans la Gaâda d'Aflou. De là, il envoi de nombreux émissaires et
reçoit de nombreuses délégations de Djelfa, de Laghouat, de Metlili, d'El Méniâ
et de Timimoun, renforçant l'autorité du FLN au détriment des Bellounistes. Le
coup de grâce sera donné à ces derniers lorsqu'il arrivera à attirer vers lui
deux importants responsables militaires des Hauts Plateaux du centre, Amor
Driss dit Fayçal et Tayeb Ferhat dit Chaouki.
Ayant rejoint définitivement le FLN, il les dote en armes
et de deux compagnies pour assoir leur autorité sur la zone sud de la Wilaya VI
baptisée provisoirement Zone 9. Dans la région de Metlili, Mohamed Djeraba
venait de rejoindre les forces de Si Brahim en cette même période.
Aux yeux de l'ennemi qui subissait de plus en plus de
pertes, Khneg Abderrahmane dans la Gaâda, était devenu une base ALN et un
relais très important. Sous le commandement du Général Gilles, une importante
opération y est engagée en juillet 1957. Au cours de rudes combats menés par
pas moins de 500 Moudjaheds, les troupes françaises avaient reçu une bonne leçon,
laissant sur le terrain de nombreuses pertes. Les forces de la Zone 8 avaient
été appuyées par une compagnie de transport de la Wilaya III qui était en
transit par là en cette période.
Craint par l'ennemi, admiré par ses hommes et respecté
par ses proches collaborateurs dont Kaid Ahmed dit Si Slimane, Moussa Ben Ahmed
dit Si Mourad continue sans cesse à renforcer son potentiel militaire. Les
effectifs avaient déjà atteint 2500 Combattants. Des renforts en encadrement
viennent étoffer l'Etat-major autour de Si Brahim: Akbi Abdelghani dit Amar,
Mohamed Ben Ahmed dit Abdelghani, Allali Kouider dit Youb, Kadi Mohamed dit
Boubeker, Djelloul Nemiche dit Bakhti etc.
Vers l'été 1957, le commandant Hansali, l'un des adjoints
de Si Mabrouk est tombé au champ d'honneur en Zone 2. Si Brahim avait été
chargé de le remplacer sur recommandation du chef de la wilaya et devient le
Commandant Si Lotfi donc automatiquement membre du Conseil National de la
Révolution Algérienne (CNRA) instance suprême de la révolution.
Il cède le commandement de la Zone 8 au Capitaine Si
Slimane (Kaîd Ahmed) et rejoint
l'État-major de la Wilaya V composé à l'époque outre le Colonel Si Mabrouk, les
Commandants Boumédiène et Chaâbane (Ahmed Taouti). Au mois d'octobre 1957, il
participe à la réunion des chefs de Zones de la Wilaya V présidée par Si
Mabrouk. Au cours de cette réunion, ce dernier devenu depuis août membre du CCE
chargé des Liaisons Générales et Communications, cède le Commandement de la
Wilaya V au Colonel Houari Boumédiène.
Fin janvier 1958, le Commandant Si Lotfi devrait se
rendre en Espagne en mission de logistique et profiter pour une consultation médicale auprès d'un
ophtalmologiste à Barcelone. Le responsable organique de la Fédération FLN au
Maroc, Si Allal avait chargé un militant Djaafar Skénazene de l'accompagner
comme chauffeur. La Fédération avait mis à leur disposition une voiture.
Arrivés à Algésiras, ils avaient été arrêtés à cause de cette voiture qui était
recherchée par les autorités sécuritaires espagnoles.
De prison en prison, ils avaient passé six mois
d'arrestation. Boussouf dès leur arrestation avait chargé M'Hamed Yousfi dit Mustapha Tankher de la logistique Europe
de mandater deux bons avocats pour leur défense. A leur libération, Si Lotfi
apprend des cadres de la logistique Europe basés à Madrid, qu'il venait d'être
nommé Colonel, Commandant en Chef de la Wilaya V en remplacement du Colonel Si
Boumédiène qui venait d'être désigné à
la tête d'une nouvelle institution créée par le CNRA, le COM Ouest (Commandement
des Opérations Militaires de l'Ouest). Il avait 24 ans.
Après les passations, il entreprend une tournée de
contrôle s'informant de la situation de sa Wilaya et surtout du problème de
l'acheminement des armes vers l'intérieur,
aussi bien pour sa Wilaya que pour les Wilayas 4 et 6. Son information
était surtout complétée par les services spéciaux des Liaisons Générales et
Renseignements dépendant de Boussouf. D'ailleurs, il n'hésitait jamais à rendre
visite très souvent à ces services pour s'informer et débattre librement de
tous les problèmes politiques, militaires et même économiques et sociaux avec
leurs cadres qui l'appréciaient énormément.
A la tête de la Wilaya V, il avait comme adjoints les
Commandants Si Slimane (Kaîd Ahmed), Si Farradj (Louadj Mohamed), Si Othmane (
Benhaddou Bouhedjar). Le Commandant Chaâbane (Ahmed Taouti) était tombé au
champ d'honneur au Pont de l'Isser au nord de Tlemcen en janvier 1958. Son
secrétariat était assuré par Ahmed Medeghri dit Hocine.
Lotfi, un pur produit du FLN et de l'ALN:
Si Lotfi, pur produit du FLN et de l'ALN, portera la
guerre même dans le Grand Erg Occidental au grand dam du haut commandement
français. L'année 1958, avec l'arrivée de De Gaulle au pouvoir en France, avait
connu en Zone 6 et 8 le début des opérations Challe avec la fermeture totale
des barrages frontaliers et le regroupement des populations pour isoler l'ALN.
C'était à cette occasion que l'aviation ennemie avaient procédé à de grands
bombardements au napalm sur les bases ALN du Djebel Mzi. Le Colonel Lotfi avait
donné des instructions dans la wilaya pour que toutes les grandes unités,
bataillons, compagnies et même sections doivent se disperser et les petites
unités devaient être très mobiles.
L'ennemie était allé, à la même époque, jusqu'à faire
jouer au Parti de l'Istiqlal de Allal Al Fassi dont il connaissait les
intentions, un rôle très négatif et dangereux: l'implantation au sud de la
frontière ouest en territoire marocain, de groupes de l'ALM ( Armée de
Libération du Maroc) alors que ce pays était déjà indépendant depuis 1956. Ces régions de
Boudnib, Figuig et Bouarfa servaient de base arrière importante pour l'ALN.
En tant que membre
du CNRA, le Colonel Lotfi s'était rendu en mission en 1959 à Tunis,
au Caire et enfin à Tripoli. Ces déplacements lui avaient
permis de faire la connaissance de la plupart des dirigeants de la Révolution.
Il entretenait des rapports suivis avec le Président
Ferhat Abbas qui l'avait intégré dans sa
délégation lors d'une visite officielle en juin de la même année en
Yougoslavie. Il avait aussi des
relations très proches avec Boussouf,
Ali Kafi, Amar Benaouda et le Docteur Lamine Khène.
En août 1959, il avait fit partie de la fameuse réunion
des Colonels au siège du MLGC provoquée
par Ferhat Abbas, dite Comité des 10, réunion qui avait duré plus de 3 mois
pour étudier tous les problèmes qui se posaient
à la Révolution sur les plans politique, diplomatique et militaire
particulièrement en vue du renforcement du front intérieur.
Cette réunion
s'était achevée vers la fin novembre et ses conclusions avaient été transmises
au CNRA.
Cette dernière institution, organe suprême de la
Révolution était entrée en session à Tripoli durant un mois, de la mi-décembre 1959 à la mi-janvier 1960. Elle
avait pris entre autres plusieurs décisions importantes:
1/ Maintien de Ferhat Abbas comme Président du GPRA, 2/
Dissolution du Ministère des Forces armées, remplacé par le Comité
interministériel de la Guerre (CIG) dont les titulaires étaient Krim Belkacem,
Lakhdar Ben Tobbal, et Abdelhafid Boussouf. 3/ Dissolution des deux
Commandements opérationnels militaires Est et Ouest. Création d'un Etat-major
Général de l'ALN, dirigé par le Colonel Houari Boumédiène secondé par les
Commandants Kaîd Ahmed dit Si Slimane, Ali Mendjeli et Azeddine. 4/
Développement de l'effort militaire par l'envoi d'armes à l'intérieur. 5/ Enfin
décision importante, tous les Commandants des Wilayas étaient tenus de
rejoindre leur wilaya respective à l'intérieur.
Lotfi sera le seul Colonel Commandant de Wilaya à
rejoindre sa wilaya accompagné par son Adjoint le Commandant Farradj, les deux
autres Commandants Othmane et Affane étaient depuis toujours à l'intérieur.
Pour les autres wilayas, seuls des commandants avaient regagné leur wilaya respective: le Commandant Tahar Zbiri
et le Commandant Souaî pour la Wilaya 1,
un autre Commandant de cette wilaya Ali
Redjaî était tombé au champ d'honneur au barrage frontalier, le Commandant
Abderrahmane Mira pour la Wilaya 3 et le Commandant Ahmed Ben Chérif pour la
wilaya 4.
De retour de la réunion du CNRA à Tripoli, Si Lotfi était
passé vers le début mars 1960 au Centre de la DDR (Direction de la
Documentation et de la Recherche) à Dar El Fassi près d'Oujda pour fêter avec
les Cadres de cette institution la fête d'Aîd El Kébir.
A la fin du repas organisé en son honneur, Si Lotfi avait
invité Abbas (Lemkami Mohamed) et Djilali (Elghazi Ahmed) anciens amis à
Tlemcen avant même la guerre de Libération à faire un tour dans un jardin de
cette maison. C'était là qu'il leur avait annoncé sa décision de regagner le
territoire national. A leur surprise et leur crainte, il leur avait précisé que
c'était une décision du CNRA pour tous les chefs de Wilayas et leurs adjoints.
La dernière rencontre d'Adieu:
C'était notre dernière rencontre, une rencontre d'Adieu.
Il devait tomber au champ d'honneur à Djebel Béchar le 27 mars 1960 en même
temps que le Commandant Ferradj (Louadj Mohamed
né en 1934 à Ain Ghoraba), Zaoui Cheikh né en 1938 à Abadla et Brik
Ahmed né à El Ménéa wilaya de Ghardaîa, et un seul survivant le moudjahid
Laroussi Aîssa. Il avait 25 ans et 4 mois. Sa mort précoce était une grande perte pour
l'Algérie.
C'était un homme qui avait une grande avance sur son
temps. Ainsi était son destin, une
Décision de Dieu.
Le centre d'écoute des transmissions de l'Armée de
Libération Nationale nous donna l'information immédiatement contrairement à la
propagande et à la tentative machiavélique de manipulation du Général Jacquier
et de ses services dira Lemkami Mohamed.
La jeunesse algérienne post-indépendance, actuelle et
future, ne devrait jamais oublier les héros de la trempe de Lotfi, car les
héros ne meurent pas. Ils ont écrit une riche et belle page de l'Histoire de
l'Algérie. A ce Chahid qui a su vivre et mourir pour son idéal avec tant de
simplicité et de grandeur, nous devons bien un hommage à la hauteur de son
sacrifice. En rendant hommage à tous les Héros de la Grande Révolution du 1er
Novembre 1954, les jeunes générations de l'Algérie indépendante contribuent à
renforcer davantage les valeurs de fraternité, d'humanisme, de tolérance et de
liberté au sein de ce grand peuple.
Il est mort en laissant deux enfants Lotfi et Chahida. Il
faut rappeler que le Colonel s'était
marié avec une Moudjahida Fatima Méchiche surnommée Khadidja, le 5 septembre
1958, ancienne Fidaîa à Tlemcen avant d'être affectée au Secrétariat de la Zone
1 Wilaya V puis au Commandement des Frontières (CDF).
En conclusion, Lemkami Mohammed ancien Officier du MALG
indiquera que Dghine Bénali dit Si Kaddour, Si Brahim, Si Lotfi, peu de temps
après son engagement dans l'ALN, repéré par Abdelhafid Boussouf, se voit
confier très vite, des responsabilités à Tlemcen. Après les remarquables
résultats de son action dans cette ville en un court laps de temps, il sera
jugé sur sa bravoure, son intelligence et le sens du jugement très aigu et très
apprécié, et malgré sa jeunesse, il lui confiera de lourdes responsabilités à
la tête d'un immense territoire jusque-là inconnu de lui. Dans le Sud Oranais,
il va encore rapidement gagner en popularité parmi ses compagnons d'armes ainsi
qu'au sein de la population.
Sa formation politique précoce complétée par sa culture
bilingue à la Médersa de Tlemcen, son courage et son intelligence, son
engagement et son action sur le terrain légitiment largement sa rapide
accession aux responsabilités politique et militaire. Il avait toujours voulu diriger son maquis de l'intérieur et
cherché à étendre l'influence de combat au plan national et ne pas rester
enfermé dans un cadre exclusivement régional.
Au cours de sa participation au Comité des Dix, puis au Conseil National de la
Révolution Algérienne à Tripoli, il avait le courage et la franchise d'exprimer
sa volonté de ne pas dissocier le politique du militaire. Sur cette question,
le grand témoignage du Président Ferhat Abbas publié dans son livre
"Autopsie d'une Guerre" rend compte de ses longues discussions avec
Lotfi.
De ses réflexions à la suite de ses lectures,
ressortissent des expériences connues dans le monde; ses positions affirment la
primauté et le respect des choix d'un Peuple Algérien uni, libre, souverain,
d'un peuple digne qui n'accepte aucune tutelle, ni soumission à une personne, à
un corps ou à une institution et ne crédibilise en permanence que le système auquel
il croit.
Lotfi se montre " intransigeant et refuse de mettre
le destin d'un peuple qui s'est lourdement sacrifié entre des mains
incompétentes". Ses idées, il les a partagées pas seulement avec le Président Ferhat Abbas,
mais aussi avec le Colonel Ali Kafi
juste avant sa mort.
Une haute considération pour la femme Algérienne.
Enfin, le Colonel Lotfi avait une haute considération
pour la femme algérienne dont il avait apprécié le comportement durant toute sa
carrière au maquis, qu'elles soient
Fidaîates à Tlemcen ou joundiates en Zone 8. Même la femme civile avait
joué un rôle anonyme considérable dans l'approvisionnement des combattants,
comme agents de liaisons et de renseignements. D'après lui, elles avaient
laissé tomber tous les tabous grâce à la Révolution.
Un message très significatif à son épouse.
Avant de partir vers son destin, il avait laissé un
message très significatif à son épouse..
La lettre intégrale datée du 16 mars 1960:
"A ma très
chère femme,
Je m'excuse à
l'avance de n'avoir pas osé t'annoncer de vive voix ce que je vais t'écrire.
J'espère que lorsque tu recevras cette lettre, je serais bien loin en Algérie,
ma patrie chérie.
En effet, je suis en pleins préparatifs et je dois
rejoindre l'intérieur dans les plus brefs délais. Je crois ne t'apprendre rien de neuf en te
disant que c'est la seule place possible pour moi en ce moment. Il m'est devenu
impossible, intolérable, insoutenable de continuer à vivre à l'extérieur, ceci
en dehors de toute considération de quel qu'ordre que ce soit. Ensuite, en tant que chef, que
Révolutionnaire, qu'idéaliste imbu de
principe, je dois être aux côtés de mes
hommes pour les soutenir et du Peuple pour le réconforter et renforcer son
moral.
De ton côté, je crois avoir tout fait pour t'ôter dès le premier
jour toute illusion concernant ma présence à tes côtés tant que durerait la
Révolution. je t'ai toujours dit que je n'ai été et que je ne suis que par la
Révolution et pour la Révolution. Il m'est même difficile pour moi d'envisager
une autre vie que la vie d'un Révolutionnaire. Je te demanderai donc de faire
preuve de beaucoup de courage et de patiente: je sais que tu en est capable.
De mon côté, j'espère que tout se passera bien. Dans le
cas contraire, j'aurais connu la plus belle fin qu'aurait pu souhaiter et rêver
un jeune Révolutionnaire.
Alors, il faudra que tu fasses preuve de beaucoup de
courage et encore. Tu pourras être très fière de ton mari et celui que je te
confie, mon fils, le sera également beaucoup de son père. Au nom de l'Algérie
pour laquelle j'aurai vécu et j'aurai tout donné, et au nom de notre amour, je
te recommande instamment de veiller sur mon fils, sur son éducation, de lui
donner une solide instruction et d'en faire surtout un grand Nationaliste et un
grand Révolutionnaire. Ce que son père n'aura pas pu faire, parce que la vie ne
lui aura pas accordé assez de temps.
En ce qui te concerne personnellement, je te recommande encore une dernière fois de t'améliorer de te perfectionner, d'approfondir tes connaissances et d'être toujours à l'avant-garde des jeunes femmes algériennes et un exemple sans reproche aucun. C'est tout.
Embrasse pour moi toute la
famille. Je t'embrasse".
Soulignons que
Lemkami est né le 1er décembre 1932 à Khémis, Béni Snous, universitaire, ancien Officier au Ministère
de l'Armement et des Liaisons Générales (MALG).
Il a édité un livre "les hommes de l'ombre" avec une deuxième édition de 630 pages, revue et corrigée.
Je remercie Lemkami Mohammed
de ce récit historique inédit qui a été publié en 2014 dans les médias.
Gadiri Mohamed octobre 2014
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